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vendredi 19 octobre 2012

Projet de loi: libération anticipée et renforcement du rôle processuel de la victime

Voir: http://pravo.ru/news/view/78780/

La question de la participation, ou plutôt du degrè de participation, de la victime au procès pénal est une question toujours sensible. D'une part, elle doit avoir les moyens de défendre ses intérêts et d'obtenir réparation des dommages qui lui ont été causé (en général dans le cadre d'une action civile), d'autre part la question purement pénale (responsabilité et peine de la personne interpelée) se place sous l'angle de la défense de l'intérêt public et le rôle de la victime ne peut être que minime.
 
La Douma examine en ce moment un projet concernant le renforcement du rôle de la victime dans la procédure de libération anticipée. En gros, quand une personne a exécuté la moitié de sa peine d'emprisonnement, si sa bonne conduite est reconnue par les autorités pénitentiaires, il peut faire une demande de libération anticipée qui sera examinée par le juge. A ce jour, la victime ne participe pas à cette procédure. Et la question s'est posée de savoir comment l'intégrer, comment représenter ses intérêts. Un premier projet de loi, écarté, proposait d'ajouter en condition supplémentaire, le remboursement en tout ou partie du préjudice causé à la victime. Mais les députés ont trouvé la démarche par trop mercantile: un condamné ayant de l'argent ayant plus de chance de sortir qu'un condamné pauvre. Toutefois, cela permettait également d'apprécier la volonté du condamné de compenser le préjudice causé, donc sa bonne foi.
 
Un nouveau projet de loi s'organise autour de l'information de la victime de la demande de libération anticipée faite par le condamné, de la possibilité reconnue à la victime de s'exprimer sur la question, soit lors de l'audience par vidéo-conférence pour éviter le déplacement, parfois à l'autre bout du pays, ou en l'absence de moyens techniques, par courrier adressé au juge.
 
Cette idée peut être appréciée différemment. Il est évident que la victime, sur le plan humain, est intéressée à question de la libération, ou non, de la personne qui lui a porté préjudice. Mais au-delà de l'appréciation de la compensation du préjudice, quel peut être son rôle? Le juge ne peut évidemment pas faire entièrement reposer sa décision sur la position de la victime. Le rôle du juge est d'apprécier objectivement la situation, non seulement au regard de la compensation du préjudice, mais du danger social présenté par le condamné et donc de son repentir, de sa conduite. La personnalité du condamné est un élément important. Toutefois, l'appréciation faite par la victime peut évoluer depuis la condamnation, notamment en voyant le repentir du condamné. Mais, à l'inverse, si la victime s'oppose à la libération anticipée, alors que le condamné rempli tous les critères, il serait bon qu'elle argumente également sa position, afin d'éviter l'arbitraire. Bref, que le juge tienne compte de la position de victime, pourquoi pas, mais qu'il ne fasse que la retranscrire, serait une erreur.

jeudi 18 octobre 2012

Gudkov prépare les élections de Moscou

Voir: http://izvestia.ru/news/537925

Les prochaines élections des députés de la ville de Moscou se tiendront en 2013. Aux dernières élections, seulement deux partis ont pu passer la barrière des 7%, Edinaya Rossiya avec 32 mandats et les communistes avec 3 sièges.
 
Vu l'ampleur des mouvements contestataires à Moscou, et la ville ayant la réputation de ne pas voter comme toute la Russie, G. Gudkov veut préparer un front de l'opposition pour qu'elle puisse être représentée et participer aux affaires de la ville, donc remettre en cause le monopole de Edinaya Rossiya. Il s'agit de cibler les sièges attribués aux députés élus en leur nom dans les différents arrondissements de la ville. Pour cela, il est nécessaire de coordonner les forces opposantes, d'avancer un front commun et de présenter des personnalités fortes dans chaque arrondissement, mais surtout ne pas se concurrencer. Toutefois, réaliste, G. Gudkov reconnaît qu'il est encore trop tôt pour formaliser ce mouvement, cette "Union citoyenne".
 
Cette position n'a pas provoquer l'enthousiasme de Nemtsov, selon lequel il est encore trop tôt pour parler des élections de Moscou, mais le moment venu, cette technique pourrait être retenue.
 
Quant au député moscovite Edinaya Rossiya, il souligne que l'enjeu fondamental de l'opposition va être d'arriver à convaincre l'électorat qu'ils peuvent faire quelque chose de positif pour les moscovites.
 
Pour l'instant, effectivement, les élections à Moscou ne sont pas à l'ordre du jour. L'opposition parle beaucoup de regroupement, de cohésion, etc. Les résultats ne sont pas encore très convaincants. Mais peut être pourront-ils tirer des leçons des échecs passer, développer un discours constructifs et surtout apporter des réponses possibles aux attentes de l'électorat moscovite. Dans ce cas, il y a une chance. cela dépend en grande partie d'eux-même.

mercredi 17 octobre 2012

De l'américanisation du droit russe sous l'effet technologique des cabinets d'avocats, l'exemple Baker et McKenzie

Voir: http://pravo.ru/review/face/view/78625/
http://ru-ru.facebook.com/legalsuccess/posts/362821770459556
http://www.c5-online.com/anticorruptionRUS/agenda

Une lettre surprenante a fait sursauter la commauté juridique russe. Une lettre adressée par la compagnie Baker & McKenzie à Anton Ivanov, président de la Cour supérieure d'arbitrage de la Fédération de Russie. Qu'il n'y ait pas eu de réponse officielle, rien d'étonnant. Le plus intéressant est ailleurs. Dans le contenu. Et dans le contexte.
 
Après un échec en cassation pour une affaire dont le montant n'est pas significatif pour une compagnie comme Baker & McKenzie, une lettre est adressée au président de la Cour supérieure d'arbitrage, accusant les trois juges de corruption - sans en fournir de preuve et sans saisir les autorités compétantes - et proposant un certain nombre de recettes permettant de réduire d'un coup d'un seul la corruption des juges en Russie, sauvant ainsi le système judiciaire.
 
Reprenons dans l'ordre. L'affaire et le soupçon de corruption. Cette compagnie, un des plus importants bureau d'avocats américain, récupère au niveau de la cassation une affaire d'importance juste moyenne. Affaire qu'ils perdent en cassation. Ce à quoi ils pouvaient s'attendre, la cassation ne faisant qu'une analyse de la bonne ou mauvaise interprétation et utilisation des règles de droit, la règle n'est donc pas la remise en cause des jugements antérieurs, comme dans tout pays de droit européen. Pour exemple, la chambre criminelle de la Cour de cassation française a traité, en 2011, 7926 dossiers et a rendu 482 arrêts de cassation. Mais selon la compagnie américaine il y a corruption car les juges ne se sont pas conformés à la solution - inverse - apportée dans une affaire jugée par eux similaire en faits. Il faut également rappeler que la Russie n'est pas un pas ( encore ) un pays de droit anglo-saxon et son système judiciaire ne fonctionne pas totalement sur le principe du précédent.
 
Bref, ils demandent une rencontre avec le président de la Cour supérieure d'arbitrage, puisque les voies normales n'ont pas fonctionnées. Donc pour lutter contre la corruption et la pression sur les juges, ils veulent faire pression sur le président de la Cour supérieure d'arbitrage. Une logique imparable... Une première lettre non publiée n'a pas eu de réponse. On en envoie une seconde, publique. Soit, là non plus n'est pas le plus important. Ils veulent, je cite, "lui expliquer comment le système DOIT fonctionner". Il faut donc reprendre la logique des entreprises internationales - américaines - et, sur le fondement du Foreign Corrupt Act de 1977, créer une fonction spéciale au sein de la Cour supérieure pour lutter contre la corruption, attribuée à un vice-président de Ivanov, une sorte de Monsieur corruption. De cette manière, quand un juge prend une décision surprenante, il vérifie les faits de corruption. Toutefois, il ne peut pas remplacer le travail des enquêteurs ... donc on ne voit pas très bien en fait ce qu'il doit faire. Simplement donner son opinion. Et quand il y a soupçon de corruption dans une affaire, dans ce cas une formation spéciale de 12 juges doit vérifier l'affaire ... au regard de la corruption. Pour faciliter le travail de tout ce petit monde il faut mettre en place une base de données, comme aux Etats-Unis, qui va recenser les positions des cours sur les différentes questions concrètes. Si le juge s'en écarte: soupçon de corruption.
 
Non seulement c'est absurde, mais inefficace en droit, si tel était bien le but. Un Etat n'est pas une entreprise et ne se gère pas, ne s'administre pas de la même façon, du moins dans la conception continentale de l'Etat. Ensuite, il est du ressort du Comité d'enquête d'établir les faits de corruption. Ensuite, le présidium juge en nadzor (révision) les jugements rendus par les juridictions inférieures, non pas au regard de la corruption toute puissante, mais au regard tout bêtement du droit. Si ces mécanismes qui existent ne fonctionnent pas suffisamment bien pour lutter contre la corruption, cela ne signifie qu'il faille désorganiser tout le système. Encore un petit détail: cette fameuse base de données. On va rappeler que le système juridique russe est continental, autrement dit le juge applique la loi et n'est pas tenu par sa jurisprudence antérieure, ce qui s'appelle en bon français un revirement de jurisprudence, pratique bien connue dans nos tribunaux. Si le problème concerne la qualité de l'argumentation juridique des décisions, ce qui est indéniable bien souvent, une telle base de données ne résoudra aucun problème. Il s'agit plutôt de la question de la formation des juges.
 
Maintenant le contexte ... politique. De longues années durant, Thomas Firestone a exercé les fonction d'attaché juridique de l'ambassade des Etats Unis en Russie. Il est entré dans la compagnie Baker & McKenzie cet été. Avant même son entrée, il travaillait beaucoup sur les questions de corruption, et notamment sur le caractère prioritaire de l'implantation en Russie du schéma présenté plus haut. Peu après son entrée dans la compagnie, celle-ci se charge d'un dossier qui ne correspond pas à son envergure ... mais dont le potentiel politique est indéniable. Ils sont certains de perdre l'affaire en cassation et peuvent lancer le processus. C'est une nouvelle technologie, comme elle existe en politique, elle existe dans le droit.
 
Mais, évidemment, tous ceux qui n'y voient autre chose qu'une incroyable coïncidence, ont un point de vue faussé par la théorie du complot. Pourtant, ça tombe bien ...
 
 

mardi 16 octobre 2012

Projet de loi sur le contrôle du revenu des députés: les amendements de l'opposition en partie rejetés

Voir: http://pravo.ru/news/view/78665/

Début avril, un projet de loi a été déposé visant à renforcer le contrôle sur les revenus et les dépenses des fonctionnaires et des employés des entreprises publiques, prenant en compte également les revenus et dépenses de leur conjoit et de leurs enfants mineurs. Cela doit notamment viser les achats immobiliers importants, les achats de véhicules ou d'actions, dont le montant dépasse les revenus du couple sur trois ans. Ce qui serait plutôt une bonne chose.
 
Des députés de l'opposition ont toutefois proposé d'élargir la sphère des personnes contrôlées, en y incluant les enfants majeurs et les parents du couple. Il se pose, il est vrai, un problème juridique: ces personnes étant majeurs, disposent librement de leurs droits et ne sont pas soumis - juridiquement - à la volonté du couple. Un enfant mineur ne peut pas disposer de ses biens librement, il ne peut pas conclure de contrat, un majeur le peut. Indépendamment de la volonté du parent exerçant dans la fonction publique. Ce qui pose un problème en terme de rapport entre possibilité d'action et responsabilité. Pourtant ... Pourtant dans les faits, il serait intéressant de surveiller également de ce côté pour éviter de contourner trop facilement la législation...
 
Il fut également proposé de signaler tous les achats d'antiquités ou d'oeuvres d'art. Cela fut également refusé ... car la publication d'une telle information ne peut être fiable, la réalité du prix ne pouvant être contrôlée ... Sans oublier que cela indiquerait des cibles faciles pour les voleurs. Ces arguments sont évidemment absurdes. Les objets d'art ont une valeur vérifiable sur le marché de l'art, peut être pas au centime près, mais les fourchettes de prix peuvent être connues. Quant aux voleurs ...
 
La troisième proposition concerne le mode d'évaluation des objets à déclarer. Contrairement aux trois années proposées dans le projet de loi, l'amendement proposait de réduire le délai à une année de revenu. Or, le comité de la Douma a écarté cette proposition en se fondant sur le fait que les gros achats se font par une accumulation de ressources financières. Un délai d'un an n'aurait aucun sens. Soit ... Je serais toutefois curieuse de savoir combien de prêt à la consommation ou de prêt immobilier font les hauts fonctionnaires, ce serait une information intéressante, qui permettrait de lever un coin du voile.
 
En tout 213 amendements ont été proposé, 45 ont été adopté par le comité. C'est en général la règle du jeu: l'opposition politique a toujours du mal, dans tous les pays, à faire passer ses amendements. Mais elle peut faire valoir ses arguments lors des débats parlementaires. La discussion va se poursuivre en assemblée.

lundi 15 octobre 2012

Victoire d'Edinaya Rossiya aux élections locales

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/2012/10/13_a_4811365.shtml

Dans les cinq régions où les gouverneurs ont été élus selon la nouvelle législation, les candidats Edinaya Rossiya ont gagné. Et dans les élections locales, le parti est également en tête.
 
Mis à part la région de Briansk où les élections n'ont pu se passer de scandales, les élections des gouverneurs furent plutôt calmes, sans violations significatives et avec un taux de participation en hausse autour de 40-45%. Dans la région d'Amour, le gouverneur O. Kogemiako a été réélu avec 77,28% des voix. Dans la région de Belgorod, E. Savtchenko, gouverneur en place depuis plus de 20 ans a été réélu avec plus de 80% des voix, alors que la candidate LDPR, sa principale opposante, n'obtient que 10%. Dans la région de Novgorod, le gouverneur S. Mitine obtient environ 76%, quand ses opposants de LDPR Patrioty Rossii tournent autour de 10%.
 
Dans les régions de Briansk et de Riazian, des infractions ont été signalées. A Briansk, les chiffres officiels sont diamétralement opposés aux estimations faites à la sortie des bureaux de vote. La commission électorale décompte pour l'instant environ 66% pour le gouverneur-candidat N. Denine et 29% pour son opposant communiste V. Potomsky. Selon les estimations, les résultats sont inverses. Pour arranger le tout, des protocoles se contredisent et les résultats notés par les observateurs ne correspondent pas du tout aux données de la commission électorale. Il se pourrait que les résultats ne soient pas reconnus. A Riazian, de nombreuses violations ont été signalées, bourrage d'urne, caroussel, etc. Selon les données de la commission électorale, le gouverneur par interim O. Kovalev obtiendrait 66,76%, le candidat communiste V. Fedotkine 20,16%, le candidat LDPR A. Cherine 8,48% et la candidate Pravoe delo A. Perekhvatova 2,98%.
 
Pour les élections locales, le taux de participation est autour de 30%. En ce qui concerne les élections à Khimki, le maire par interim de la ville O. Chakhov a remporté les élections avec 47,7%, son opposante principale, l'activiste E. Tchirikova a obtenu 17,05% des voix. Ces élections ont battu le record d'observateurs. On en comptait 15 à 17 par bureau de vote.
 
Ces élections ont donc confirmé la domination de Edinaya Rossiya dans le paysage politique russe, ce qui n'est pas une surprise. Et ce qui ne doit pas décourager les autres partis, notamment nouveaux, de participer aux cycles électoraux, travailler leur réthorique politique et se faire une expérience. C'est le seul moyen - pacifique - de faire évoluer à terme la carte politique.