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vendredi 3 mai 2013

L'étrange ratio du Comité américain pour la protection des journalistes

Voir: http://www.newsru.ru/world/03may2013/cpj.html

Le Comité pour la défense des journalistes, basé à New York, établie le pourcentage d'assassinats non élucidés de journalistes en rapport avec la population globale du pays. Il en exclue les meurtres de journalistes en situation de guerre ou encore les journalistes tués lors d'enquêtes de rues en situation difficile. De cette manière, l'Afganistan est une promenade de santé pour les journalistes depuis 2008, confortant ainsi la grande révolution démocratique du pays, alors que l'Irak entre en tête de liste et ne semble donc pas être en guerre et les rues y sont sûres.
 
Pour entrer dans la liste, il faut donc que l'assassinat du journaliste n'ait pas donné lieu à un jugement de condamnation. Autrement dit, il ne s'agit pas pour les autorités publiques de ne pas mener l'enquête, mais de ne pas déterminer le responsable. Mais là ne s'arrête pas l'analyse: le Comité doit encore être convaincu que tous les responsables ont été sanctionnés.  
 
Et l'on obtient alors ces chiffres du nombre de journalistes assissinés par rapport à la population globale, ce qui donne la liste des pays où le meurtre de journalistes n'entraînerait peu ou pas de responsabilité, autrement dit serait donc couvert par les autorités.
  1. Irak: 93 pour 33 millions = 2,218
  2. Somalie: 23 pour 9,6 millions = 2,396
  3. Phillipinnes: 55 pour 94,9 millions = 0,580
  4. Sri Lanka: 9 pour 20,9 millions = 0,431
  5. Colombie: 8 pour 46,9 millions = 0,171
  6. Afganistan: 5 pour 35,3 millions = 0,142
  7. Mexique: 15 pour 114,8 millions = 0,131
  8. Pakistant: 23 pour 176,7 millions = 0,130
  9. Russie: 14 pour 141,9 millions = 0,099
  10. Brésil:  9 pour 196,7 millions = 0,046
  11. Niger:  5 pour 162,5 millions = 0,031
  12. Inde: 6 pour 1241 millions = 0,005
Quel est le sens du rapport du nombre de journalistes assassinés par rapport à la population? Il serait intéressant de voir le rapport entre les meurtres de journalistes élucidés et non élucidés, ou avec le chiffre de la criminalité en général de ce pays. Mais ce rapport est surprenant, il semble induire que la vie d'un journaliste dans un pays surpeuplé est moins importante que dans un pays où la population est plus faible. 
 

jeudi 2 mai 2013

Comment créer un concurrent à Edinaya Rossiya? L'idée de Surkov

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/news/2013/05/02/n_2887297.shtml

Selon les propos de Surkov, formulés à Londres jeudi dernier, il serait bon pour Edinaya Rossiya de se retrouver en concurrence réelle avec un parti à sa taille. Mais comme ce parti n'existe pas encore, il faudrait, sinon le créer, tout au moins en favoriser l'émergence.
 
Sur le fond l'idée est bonne. Seule une réelle concurrence peut "normaliser" le fonctionnement de la vie politique russe. Mais, justement, pour que cette concurrence soit réelle, est-il possible de "créer" ou "favoriser" la création d'un parti politique?
 
Quelques remarques.
 
S'il ne peut pas "émerger" naturellement, deux causes principales sont en jeu, juridiques ou politiques. Soit le système normatif ne permet pas l'émergence de ce parti, ce qui serait la raison juridique. Pourtant, les dernières réformes simplifiant au possible l'enregistrement des partis politiques laissent douter de la valeur d'un tel argument.
 
Soit, il faut analyser la question sur le plan politique. Et là on se trouve confronté à deux axes possibles: la question du leader et la question de l'électorat. Ce parti peut-il avoir un leader? Pourquoi pas, les technologies politiques aujourd'hui sont capables de le créer. Mais existe-t-il un électorat? Et c'est bien là que le bas blesse.
 
Le problème vient, bien sûr, du positionnement politique du parti Edinaya Rossiya, qui couvre différents courants, du libéral au patriotique et monopolise l'électorat. C'est surtout un parti "pragmatique", souvent qualifié de parti de fonctionnaires. Mais il commence à se politiser par la force des choses et les courants internes deviennent source de tensions internes. Pour laisser la place à un véritable parti faisant face à la machine Edinaya Rossiya, il faudrait tout d'abord que celui-ci finisse par définir son positionnement idéologique et précise sa ligne politique. Tant que cela n'est pas fait, le reste n'est que chastes paroles. Qui ne coûtent pas cher et n'engagent en rien.

mardi 30 avril 2013

Augmentation du nombre de recours contre les juges et renforcement de la consience sociale

Voir: http://izvestia.ru/news/549695

En 5 ans, de 2008 à 2013, la quantité de recours contre les juges a doublé. On en compte 4246 pour l'année dernière. Les interprétations évidemment divergent.

D'un côté, certains estiment qu'il est difficile de parler d'une amélioration du travail des juges si les recours augmentent. D'un autre côté, cela montre sans hésitation une modification dans la manière dont les requérants perçoivent le juge. Celui-ci n'est plus une figure abstraite et intouchable, mais un individu au service de la justice. Quand il ne la sert pas, les gens hésitent de moins en mois à s'adresser à l'organe compétent.
 
L'origine de ces recours est variée. L'année dernière, 806 ont été déposé par des détenus. Mais un nombre intéressant de magistrats eux-mêmes ou de membres de leur famille ont déposé ce type de recours - 586. Le nombre des avocats s'élève à 52. La plus grande partie est évidemment constituée par les requérants.
 
Les recours se fondent essentiellement sur la violation des délais de procédure (1090) et sur l'organisation du travail de la cour (683). 93 personnes ont soulevé la question de la corruption.

lundi 29 avril 2013

Pour revenir sur le financement étranger des ONG, approche comparée et enjeux de géopolitique contemporaine

Depuis la vague de vérifications des financements des ONG russes, la communauté internationale et la communauté des activistes russes est en plein émoi. On ne reviendra pas sur l'agence américaine FARA qui soumet à un enregistrement spécifique les ONG travaillant sur le territoire américain exerçant une activité "politique" financée par l'étranger et qualifiées d'agent étranger. C'est connu. Dans le rapport semestriel pour 2012, on y trouve, par exemple, le bureau du tourisme des Bahamas dont le but est la promotion du tourisme par la participation à des expositions, des conférences ou séminaires (Voir http://www.fara.gov/reports/SAR_JUNE_2012.pdf p. 24). Comment qualifier leur activité de politique?
 
En fait, le problème vient de là, la qualification d'une activité de politique. Prenons le cas du soutien de l'Etat français à la Palestine par l'intermédiaire d'ONG y travaillant. Le NGO-Monitor, organisme de sureillance des ONG (projet, selon le site, visant à dénoncer le tournant anti-américain de la France de la Ve République et la remise en cause des liens très particuliers noués avec Israel), dans un rapport initialement publié en anglais, condamne l'activité de l'Etat français en Palestine. Sous couvert de financement d'ONG travaillant dans le domaine des droits de l'homme ou de l'humanitaire, comme le Secours catholique ou Médecins du Monde, la France est accusée de former les esprits contre Israel et sa politique dans la région. (Voir http://www.objectif-info.com/index.php?id=746)
 
Donc l'ingérance d'un Etat étranger dans les affaires politiques d'un autre pays est condamnable et condamnée, peu importe que cela passe par une ingérence directe ou par l'instrumentalisation des ONG. Mais comme le premier moyen d'action est dépassé, le second est devenu le fer de lance de la géopolitique. Il ne s'agit même pas d'une critique, mais d'un fait. Chacun défend ses intérêts et à l'époque ou les intérêts de tout Etat dépassent largement le cadre de ses frontières, il serait naïf de croire qu'il ne cherche pas à créer un contexte politique favorable dans les pays où ses intérêts sont en jeu.
 
Donc la Russie défend ses intérêts. Les Etats Unis également, c'est de bonne guerre. Il est regrettable que dans cette histoire ce soient les droits de l'homme qui soient pris en otage, qu'ils aient été instrumentalisés pour finalement petit à petit se discréditer. Mais c'est un autre débat. Et les réactions sont irrationnelles.
 
Juste un exemple. Résidant en Russie depuis 10 ans, j'ai été contactée sur Facebook par un jeune homme (dont je ne divulguerai pas le nom), qui travaille dans l'association Memorial. Voici l'échange traduit en français:
Lui: Je voudrais vous poser une question, êtes vous française?
Moi: Oui, pourquoi?
Lui: Il y a une idée intéressante. Hier, la procuratura a dit au comptable de l'association Memorial de la région des Komis que s'ils touchaient encore une fois un financement de l'étranger, ils devraient s'enregistrer comme agent étranger. Voici l'idée. Et si l'on touche une somme de 10 euros, on sera quand même obligé?
Moi: Et pourquoi ne pas vous enregistrer, c'est difficile?
Lui: Premièrement, oui, c'est difficile. Deuxièmement, c'est comme devoir porter l'étoile de David  dans l'Allemagne nazie. Troisièmement, nous n'avons pas d'activité politique.
 
La question est donc idéologique. Le refus, quelle que soit la procédure (qui n'interdit pas l'activité), est un refus de principe. Et quand la procuratura veut simplement prévenir, et ne pas tout de suite aller au bout de la procédure comme avec l'association Golos, le but est de ridiculiser l'institution. La somme envisagée est volontairement minime. Soit la procuratura ne réagit pas et elle sera montrée du doigt comme inefficace. Soit elle réagit et elle sera montrée du doigt comme un organe répressif digne des nazis. C'est l'impasse. Et la mauvaise foi. Juste une question de défenses des intérêts nationaux croisés.