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vendredi 14 février 2014

Ella Pamfilova sera le nouvel Ombudsman de la Fédération de Russie

Voir: http://www.rg.ru/2014/02/13/pamfilova-site.html
http://www.rg.ru/2014/01/23/putin-site.html

Элла Александровна Памфилова

La fonction d'Ombudsman est particulièrement délicate à remplir. Son titualire doit avoir la confiance des organes publics pour que ses recommandations puissent avoir un quelconque effet, tout en ayant la confiance de la société. L'Ombudsman doit donc à la fois être une figure respectée par la société et la société civile et par l'Etat. Ce grand écart n'est pas donné à tout le monde.
 
Les défenseurs des droits de l'homme avaient proposé la candidature de Ella Pamfilova, figure clée de la défense des droits de l'homme en Russie, qui avait en son temps présidé le Conseil des droits de l'homme auprès du Président de la Fédération de Russie et avait quitté son poste, estimant que les conditions n'étaient pas réunies pour qu'elle puisse assurer ses obligations.
 
Le Président Poutine a retenu sa candidature et l'a présentée à la Douma pour qu'elle se prononce, après avoir eu une discussion avec elle et l'encore actuel Ombudsman V. Lukine. Chacun est tombé d'accord sur la nécessité de la critique du pouvoir, qui seule permet de garantir un équilibre entre la défense des intérêts des citoyens et le fonctionnement normal des institutions. Mais cette critique doit se fonder, comme le rappelle E. Pamfilova, sur une information sûre et non erronée pour être efficace. En ce sens, seule la coopération entre la société et les organes de pouvoir sont à même d'assurer l'efficacité de la politique publique.
 
Elle envisage son travail comme devant mettre l'accent sur les problèmes systémiques en Russie, problèmes dont la résolution passe par la mise en place d'un réseau de coopération entre toute personne de bonne volonté, que ce soit dans les organes publiques ou dans les organes de la société civile.
 
Souhaitons lui bonne chance!

jeudi 13 février 2014

Il faut sauver le journaliste Viktor Shenderovitch!

Voir: http://www.echo.msk.ru/blog/shenderovich/1255508-echo/
http://izvestia.ru/news/565579

Pour ceux qui ne le connaissent pas, Viktor Shenderovitch est un journaliste, essayiste, aimant la satyre politique, devenu célèbre lors des marionnettes politiques sur NTV de 1994 à 2002. Il est dans l'opposition, rejette le système comme légitime et s'est fait battre aux élections législatives en 2005, ce qui lui a permis de sortir un livre sur son expérience de candidat perdant en 2006. Ca, vous n'êtes pas obligé de le savoir, cet ouvrage n'a laissé de traces ni dans la littérature, ni dans la politique.
Bref, la vie de Viktor Shenderovitch, dont le métier est de critiquer le régime, surtout sous les présidences Poutine, se complique et devient intenable avec les JO de Sotchi.
Tout d'abord, dans l'ensemble, la cérémonie d'ouverture a été reconnue à l'étranger comme une grande réussite. Et souvenez-vous, la présentation de l'alphabet cyrillique et des grands hommes qui ont fait l'histoire du pays, des grandes périodes de son évolution.
Cela devient très difficile pour Viktor Shendorovitch. Il déteste la Russie Poutine et voit partout l'ombre du Président. Un véritable cauchemard pour ses nerfs mis à rude épreuve après tant de combats pour la justice et la démocratie, pour les marionnettes etc.
Mais là, la coupe est pleine, notre héros craque. Une jeune patineuse de 15 ans, oui 15 ans, Yulia, Lipnitskaya, Russe ethnique donc symbole du poutinisme grandissant, fait une prestation qui retient l'attention et les applaudissements du monde entier. Et il n'en peut plus.
Alors tout sort dans un billet dégoulinant de haine aux Echos de Moscou. Non, il ne faut pas lui en vouloir. Lui-même parle de schizophrénie. Il ne supporte plus cet alphabet cyrillique (mais écrit en russe), il ne supporte pas l'histoire de ce pays, les grands hommes de ce pays - ce Gagarine quelle plaie! -, ces sportifs qui osent faire ... du sport et gagner des médailles ... sans faire de politique.
Et cette jeune fille! Trop jeune, trop russe, trop brillante! Elle lui fait penser à ces sportifs nazis en 1936, qui portaient les couleurs de ce régime O combien comparable à celui de Poutine. A l'époque aussi, ils étaient jeunes, beaux, en pleine santé et voyez ce qui s'est passé après.
Alors tout y passe, dans le désordre, la Tchécoslovaquie, Hitler, Kharlamov (légende du hockey soviétique), l'alphabet, Gagarine, Léningrad, Dachau etc.
Ne me demandez pas la logique de cet amalgame, il n'y en a pas. Comme l'auteur le dit lui-même, il est au bord de la schizophrénie.
Pour autant des députés n'ont pas particulièrement apprécié ses sorties plumitives et accusent son texte de fascisme. Ils se trompent. Son texte n'est pas fasciste, il est raciste. C'est du racisme basique anti-russe. Et là, ça pose un problème de formulation, en Russie comme ailleurs. On a l'habitude de protéger la société du racisme contre les noirs, les musulmans, les juifs, maintenant les arméniens, bref les minorités protégées. Mais que faire du racisme anti-russe? Du racisme contre une majorité?
Donc il faut aider Viktor Shenderovitch. J'en appelle à votre conscience, à votre humanité. Cet homme ne peut continuer à vivre ainsi, c'est trop destructeur pour lui. L'obliger à cotoyer un peuple et un pays dont il ne supporte plus ni l'histoire, ni la culture, c'est inhumain. Il pourrait certes aller rejoindre les siens à New York ou en Israel, mais il y a un problème. Il est bien qu'il soit en Russie pour écrire cela, sinon il ne représente aucun intérêt. Qui va donc le payer pour critiquer le pays dans lequel il vit? Dommage, c'est une impasse ...

mardi 11 février 2014

Pourquoi le referendum suisse sur la limitation de l'immigration a un écho particulier en Russie?

Voir: http://svpressa.ru/politic/article/82021/

Dimanche dernier, la Suisse, par referendum, s'est prononcée pour une immigration contrôlée. L'UE a violemment réagit, en paroles, montrant toute une surprise de façade face au raz-le-bol populaire du multiculturalisme dont les Etats européens n'ont plus les moyens. Cette situation n'est pourtant pas propre à l'Europe et le discours en Russie est plutôt favorable à la position suisse.
 
L'immigration de masse est considérée comme une bombre à retardement. Si l'immigration de travail est acceptable tant qu'il y a du travail pour tous, elle devient sujet à tensions sociales lorsque la situation socio-économique se dégrade. C'est une évidence. L'autre évidence est que l'Europe est en crise, économique et politique, le chômage est à son point le plus haut, les entreprises ont du mal à se développer, donc à créer des emplois qui ne soient pas subventionnés par l'Etat, bref de l'emploi réel, et les institutions sont en perte de confiance. Sur un autre plan, le manque d'intégration et le début de ghéttoisation des sociétés renforce un rejet de l'autre, rejet encore renforcé par la stigmatisation de la criminalité. Dans ce contexte, la surprise affichée par les autorités européennes, leur air outragé, surprend. Soit ils vivent dans un autre monde, sans immigrés clandestins qui luttent pour leur survie, sans immigrés qui ont une culture autre que la culture du pays d'accueil et ne soulève pas toujours l'emballement populaire des premiers jours, soit ils sont naïfs de penser que le multiculturalisme se résumme à de jolies expositions dans des salles modernes avec conférences et cocktail à la fin, soit ils sont hypocrites.
 
En Russie, la question de l'immigration se pose également d'une manière devenue cruciale. En hausse avec la chute de l'URSS, et comme le dit le proverbe, Moscou n'est pas élastique et compte environ 2 millions de clandestins. Les clandestins sont des esclaves modernes, vivant dans des conditions insalubres pour un salaires de misère. Salaire, par ailleurs, qui est réparti entre ses employeurs. Ainsi, un balayeur à Moscou qui a officiellement 50 000 roubles par mois (environ 1100 euros) n'en touche en réalité qu'un quart. Toute une partie des fonctionnaires vivent de ce bisness. Difficile à remettre les choses en cause dans ce cas, même si les tentatives ne manquent pas.
 
Pourtant, si un referendum était organisé aujourd'hui demandant aux moscovites s'ils veulent une limitation de l'immigration, plus de 60% se prononcerait positivement, selon les dires d'un député communiste.
 
Alors, pourquoi ne pas organiser de referendum sur les questions sociales importantes, comme en Suisse? Parce qu'en Russie, le recours au referendum est presque tombé dans les oubliettes au niveau fédéral, et extrêmement rare au niveau locale. Donc l'exemple suisse fait réfléchir ...
 
 

lundi 10 février 2014

La cérémonie d'ouverture des JO de Sotchi : symbolique et esthétique

Voir la vidéo ici: http://www.vesti.ru/videos?vid=575156

La cérémonie d'ouverture des JO de Sotchi fut une réussite sur tous les plans, et esthétiques et symboliques.
 
Profondément axée sur la culture classique russe et l'histoire, la cérémonie d'ouverture des JO a retracé tout en finesse et en touches l'évolution du pays, allant de la Russie kiévienne, effleurant avec un doigté incroyable la révolution d'octobre, montrant et la force et la violence de la période soviétique d'avant guerre, passant avec émotion sans appuyer la Seconde Guerre Mondiale pour montrer toute la complexité de la période soviétique d'après guerre. Sans culte de personnalités et sans complexes, c'est une Russie qui s'assume, qui assume la complexité et la richesse de son passé pour construire l'avenir. C'est cette nouvelle Russie que peu encore connaissent qui a été dévoilée.
 
Le choix esthétique, faisant ressurgir les caractéristiques culturelles de chaque époque, sans tomber dans la parodie, a permis de renforcer l'émotion tout au long de cette grande interrogation sur le destin d'un peuple.
 
Mais au-delà de la beauté visuelle, c'est aussi un message qui a été passé. Loin de la théorie politique très à la mode conduisant les nations à renier leur passé, à le noircir, à en faire table rase pour repartir sur des bases "saines" et "démocratiques", théorie parfaitement exportée dans l'espace post-soviétique, la Russie réaffirme avec force son attachement à ses traditions. Ses pilliers restent la famille, l'armée et la culture classique. ce qui fait la Russie éternelle. Ce qui, paradoxalement la rend aujourd'hui nouvelle. Elle n'a peur ni de son hymne, ni de son drapeau, qu'elle met fièrement en avant, comme la mise en scène l'a montré. Sans lourdeur, mais avec une force sereine.
 
Toutefois, ce choix la place également à contre courant des choix politiques fait en Europe, l'armée n'est plus aussi importante car l'Europe est placée sous protection de l'OTAN, la famille n'est plus un pillier face à l'Individu déifié.
 
Il devient évident, si le doute était encore permis, que la Russie veut se poser en choix de société alternatif à celui fait par l'Europe et les Etats Unis. Et elle le fait intelligemment.