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lundi 9 mars 2015

Assassinat de Nemtsov: des racines religieuses?



Suite à l'assassinat de Boris Nemtsov en face du Kremlin dans la nuit du 28 février, 5 suspects furent arrêtés et placés hier en détention préventive jusqu'au 28 avril par la justice. Deux d'entre eux reconnaissent leur cupabilité, trois invoquent leur innocence. Quant au motif, rien n'est encore claire, seules des "fuites" anonymes dans les milieux bien informés sous-entendent des motifs d'ordre religieux.

Zaour Dadaev et Anzor Gubachev sont suspectés d'être les organisateurs et les exécutants de l'assassinat de B. Nemtsov et ont fait des aveux. Les trois autres inculpés, invoquant leur innocence, seraient complices, mais leur rôle n'a pas encore été révélé. Lors de l'audience préliminaire de dimanche, les suspects furent placés en détention provisoire jusqu'au 28 avril, délai pendant lequel l'enquête va continuer.

Les suppositions et révélations de sources anonymes fleurissent dans les médias après avoir été divulguées par Rosbalt et Interfax. Il semblerait toutefois plus raisonnable, pour l'instant, de prendre avec beaucoup de recul les informations lancées dans la presse. Rappelons que les caméras de surveillance de la zone de l'attentat, soi-disant, ne fonctionnaient pas. Ce qui a permis aux enquêteurs de mener leurs investigations sans que les coupables ne se sentent inquiétés.

Avec toutes ces retenues, voici les principales versions développées dans les médias russes suite à ces arrestations.

En bons musulmans, Z. Dadaev et A. Gubachev se sont sentis blessés par les prises de position de B. Nemtsov sur l'Islam et le Prophète et se sont vengés. C'est en quelque sorte l'explication "Charlie Hebdo". Cette version est reprise à la lettre dans la presse d'opposition. Etrangement, les autres médias restent plus en retrait, comme hésitant.

Il y a pour l'instant une volonté (très, voire trop) affichée de ne pas faire apparaître de fondement politique, autre que celui cité plus haut. Mais en mettant en avant l'appartenance tout autant ethnique que religieuse, indirectement R. Kadyrov se retrouve sous le feu du projecteur. Surtout après sa Marche pour la paix à Grozny, regroupant un million de personnes pour le respect de l'Islam, en contre poids à la Marche de Paris faisant suite à l'attentat de Charlie Hebdo. Il est donc important, pour l'instant, de ne pas trop insister sur l'ampleur politique de ce meurtre d'une part, et d'autre part de dédouaner Kadyrov. Les explications sont pour l'instant extrêmement techniques. 

En ce qui concerne Kadyrov, afin d'affirmer sa totale absence de responsabilité dans les évènements, il vient en toute urgence et précipitation d'être décoré de l'ordre du mérite. La blogoshère souligne la précipitation du processus et son manque de fondement apparent et objectif. Par ailleurs, Dadev ayant été sous-commandant du bataillon tchétchène "Sever" (Nord), R. Kadyrov a demandé une enquête pour savoir quels furent les motifs de son revoie de l'armée.

En ce qui concerne les implications de politique intérieure, à l'inverse du Gouvernement français qui, en manque de légitimité, avait besoin de soutien populaire et a donc dû tout mettre en oeuvre pour favoriser et entretenir une coalition nationale autour des dirigeants, le pouvoir russe n'a pas besoin d'instrumentaliser l'évènement. Son intérêt est même d'en minimiser les enjeux politiques pour ne pas artificiellement stigmatiser des tensions interethniques. C'est en ce sens que les déclarations n'incistent pas particulièrement sur la volonté des organisateurs de destabiliser la situation intérieure. Il vaut mieux rester sur le plan de la tragédie personnelle.

Quoi qu'il en soit, l'enquête continue et les différentes fuites médiatiques doivent être prises avec précaution, car la situation générale est particulièrement complexe. Pour deux raisons: 
  • Si elles ont réellement eut lieu, les sources peuvent être plus ou moins fiables, plus ou moins proches de l'enquête. Car aucune déclaration officielle des enquêteurs, en ce sens, n'a été faite.
  • Ces déclarations peuvent être instrumentalisées, et elles le furent. On rappellera que la presse d'opposition s'en est immédiatement emparée, ce qui est de bonne guerre, pour reporter le soupçon sur Kadyrov, qui aurait pu inciter, même indirectement, les auteurs, et donc jeter l'ombre sur la protection dont Kadyrov bénéficie de la part du Kremlin.

1 commentaire:

  1. Tout bien réfléchi, cette version n'est peut être pas la bonne. Mais elle est certainement la meilleure. Bien joué.

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