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vendredi 5 février 2016

World War Three Inside the War Room et la tentation totalitaire en Occident

war games
Image du film

Tout d'abord, il a eu Occupied, et j'ai décidé de me taire, car cette série sur l'intervention russe en Norvège sur demande de l'UE le tout sur fond de guerre énergétique contre l'écologie et d'une fausse interrogation sur un hypothétique devoir de résistance populaire, était d'une absurdité sans nom. Finalement, c'était peut-être une erreur. Il faut s'exprimer sous peine de cautionner. Mais en parler, c'est donner aussi de l'importance à l'objet de la discussion et il me débectait de donner de l'importance à ces élucubrations.

Maintenant, c'est la chaîne publique anglaise BBC 2 qui sort un film de fiction-documentaire selon lequel la Russie envahit la Lettonie et la question posée est de savoir s'il faut ou non massacrer quelques millions de russes. Encore un échelon a été franchi dans la guerre médiatique.

Et là, il n'est plus possible de se taire. Comment se taire devant l'émergence récurrente d'éléments de totalitarisme dans notre Europe si tolérante, avec les siens. Mais prête à poser la question du massacre de millions d'êtres humains. Sans sourciller. Comment en sommes-nous arrivés là?


En plein prime time, la BBC sort un docu-fiction. Vous pouvez le voir en intégralité en anglais ici: World War Three: Inside the War Room.

L'histoire de base est simple:
"D'après le scénario, la Russie envahit la Lettonie pour soutenir les séparatistes pro-Kremlin qui se sont emparés d'une vingtaine de villes le long de la frontière russe. Alors que l'Otan tarde à intervenir, le Royaume-Uni et les Etats-Unis décident d'aider la Lettonie et d'évincer les forces russes de son territoire. La Russie répond par une attaque nucléaire dans laquelle 1.200 militaires britanniques trouvent la mort. Le Royaume-Uni refuse de recourir aux armes nucléaires pour aider l'Otan à reprendre le contrôle du Latgale (région à l'est de la Lettonie), mais pas les Etats-Unis. Une Troisième guerre mondiale éclate."
Comme l'écrit le Telegraph, le scénario est des plus réalistes depuis que la "Russie a anexé la Crimée":
"Nato has long been worried about Russian interference in the Baltic States and senior personnel regularly take part in war games to test how Western leaders would respond to conflict there. These exercises are top secret but now the BBC has run its own such war game and a new film shows what might happen in real life. World War Three: Inside the War Room convenes a war cabinet of former military and diplomatic figures to react to a hypothetical but all too plausible confrontation in Eastern Europe, given Russia’s 2014 annexation of Crimea. "
Ainsi, le docu-fiction commence par une réécriture de l'histoire: après que la Russie ait bombardé la Géorgie en 2008 (ce n'est plus la Géorgie qui a attaqué l'Ossétie du Sud), après que les troupes russes aient envahies l'Ukraine en 2014 (ce n'est plus Kiev qui s'est lancé contre le Donbass), ces fameuses et mystiques troupes russes arrivent dans les pays baltes et envahissent la Lettonie. Des images montées des conflits, notamment dans le Donbass, sont arrangées, mélangées à des images fictions, des prises de vues de V. Poutine avec modification des textes sont données les unes au milieu des autres pour montrer comment la population russe prend le contrôle du pays, un drapeau russe est hissé et l'armée russe est envoyée en soutien des combattants.

Quelqu'un qui prend le film en cours de route ne peut pas savoir que c'est de la fiction, car il est tourné sur fond de documantaire. D'autant plus que pour continuer à maintenir la confusion dans les esprits, les personnes qui sont assises dans le QG sont de véritables personnages de la vie politique britanique. On comptera notamment:
  • Richard Shireff, général en retraite, ancien commandant suprême adjoint des forces alliées en Europe (OTAN- SACEAUR) - on notera son voyage à la tête d'une délégation de l'OTAN en Ukraine en 2012 pour soutenir le programme de réarmement du pays;
  • Baronesse Pauline Neville-Jones, nommée en 2010 par Cameron ministre d'état pour la sécurité et la lutte contre le terrorisme avec une position permanente au Conseil de sécurité, démissionne en 2011; de 1998 à 2004, elle fait partie du Comité d'audit de la BBC (coïncidence);
  • Christopher Meyer, ex-ambassadeur de Grande Bretagne aux Etats Unis (1997-2003), donc notamment à l'occasion de l'invasion américaine de l'Irak;
  • Sir Tony Brenton, ex-ambassadeur de Grande Bretagne en Russie (2004-2008);
  • Alan West, Baron West of Spithead, ministre de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme (2007-2010), membre à vie du Conseil privé de la Reine.
Ces personnes doivent répondre au début à une question simple: doivent-ils envoyer des troupes combattre contre les russes pour soutenir les lettoniens?

Réponse cynique: on ne va pas risquer une Troisième guerre mondiale pour même pas deux millions d'habitants, quelques quartiers dans une mégapole. 

Mais la situation se corse lorsque, dans le scénario, la Russie menace d'envoyer une bombe sur le Parlement britanique. Finalement la décision est prise de ne pas suivre les Etats Unis et de ne pas bombarder la Russie et sa population. Ne croyez surtout pas à un sursaut d'humanisme, la raison est un argument digne des nazis:
"La question est de savoir est-ce que l'on va tuer pour rien plusieurs millions de russes. J'en aurais bien tué quelques dizaines de milliers, mais si nous s'arrivons pas à leur faire peur de cette façon, ça ne sert à rien"
Dixit Sir Tony Brenton, ex ambassadeur de Grande Bretagne en Russie

Donc si c'était utile, on aurait pu rayer de la surface du monde quelques millions d'être humains... Vous trouverez ces paroles à la minute 3.15:



Ces personnes ne jouent pas à la russophobie, ils le sont simplement. Pour eux la Russie est l'ennemi. L'ennemi total. Donc l'ennemi qu'il faut détruire. La seule chose qui leur fasse réellement peur est le souvenir de l'échec d'Hitler lors de la Seconde Guerre Mondiale, la vraie: la destruction physique des populations slaves ne fait que renforcer la rage de vaincre des populations. Plus de 20 millions de morts n'ont servi à rien pour faire plier les peuples d'URSS. En cela, c'est vrai, la Russie se distingue des autres pays européens. Mais se rendent-ils compte des paroles qu'ils prononcent? 

Comment peut-on discuter de la mort de millions de personnes, d'êtres humains et ensuite faire de grands discours sur les droits de l'homme? A moins de ne pas considérer ces personnes comme humaines, justement. C'est cela qui ressort de l'argumentation totalitaire. 

Ce n'est qu'un documentaire? Certes, mais comme le souligne les critiques des journaux anglais, les "experts" sont des professionnels mis en situation et doivent régler une situation comme ils la règleraient hors caméra, si cela se passait vraiment. Nous entendons donc ce que pensent réellement ces personnes qui ont occupé des postes importants. Ca fait froid dans le dos.

Deux remarques ici:
  1. Il est complètement fou d'imaginer un tel scénario réaliste, mais la propagande guerrière a atteint un tel niveau en Occident que nous en sommes arrivés là;
  2. Comme il faut un ennemi, on ravive l'image du méchant russe. Mais comme il est impossible de faire un vrai film documentaire en ce sens car les faits en confortent pas les fantasmes, on réalise un "docu-fiction" qui permet de transformer la réalité en toute liberté et d'impreigner les cerveaux en maintenant la confusion.
Les réactions des politiques en fonction ne sont pas très favorables à ce que personne ne considère comme une oeuvre d'art. Même en Lettonie, le ministre des affaires étrangères, pourtant russophobe, estime que ce scénario est totalement irréaliste. Il ne suit donc pas l'analyse de la presse britanique. Le ministère des affaires étrangères russe regrette que la Grande Bretagne en arrive à ce type de propagande qui, vu le contexte international tendu, n'apporte rien. Quant au porte-parole du Président russe, il déclare avoir autre chose à faire que de regarder les productions propagandistes mal faites que la BBC semble de plus en plus enclin à diffuser.

Que peut-on ajouter?

Je ne suis pas certaine que même à l'époque de la guerre froide, nous ne nous soyons rabaissés à ce point. Un tel niveau de médiocrité demande beaucoup de constance et d'efforts. Félicitations, nous y sommes en fin arrivé.

Par ailleurs, je n'ose imaginer les réactions du "Monde civilisé" si la Russie s'avisait de produire de genre de chose ...

Pourquoi une telle haine contre la Russie?

Parce qu'elle est européenne, mais elle ne joue pas le jeu. Elle est comme nous, car elle est une partie de nous et elle veut être elle-même. C'est devenu intolérable. Au nom de la "tolérance" et des "droits de l'homme", les hommes ne doivent plus seulement être égaux, ils doivent être identiques. Etre autre est devenu un crime. Un peu comme pour un bolchévique convaincu: comment placer son moi au-dessus de l'intérêt commun? Nous avons finalement glissé du culte de l'individu sacralisé dans la société holiste, c'est-à-dire qui ne se caractérise que par référence à la totalité. Et la Russie ose remettre en cause le dogme, il faut la détruire. D'où cette haine irrationnelle de la part de milieux fortement idéologisés. Ce qui ne traduit pas, d'ailleurs, le point de vue des masses, naturellement résistantes à cette dérive. D'où cette fois la nécessité de ce genre de production: pour former "correctement" l'esprit public. 

La principale caractéristique du totalitarisme est la volonté de changer l'homme de l'intérieur. Cette dérive est particulièrement inquiétante en Occident, car elle se renforce.













9 commentaires:

  1. Pour ces gens là les peuples sont du bétail lucratif sans plus !

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  2. Oui cela devient de pire en pire dans la diabolisation de tout ce qui n'est pas conforme au moule "occidental"...

    Tiens l'autre jour je regardais Taken 2 avec un ami, non pas que je sois fan mais on n'avait rien d'autre sous la main... Et c'était pathétique, à un moment, les méchants musulmans kidnappeurs de jeunes filles occidentales a des fins de les vendre sur des marchés aux femmes vont dans un bureau discuter avec l'un des puissants de l'organisation... Et là le choc, il y avait partout des symboles subliminales communistes et le personnage en question avait des allures de Poutine...

    Ah, Poutine à la tête des méchants musulmans, tous prêts à détruire les innocents occidentaux...

    Ça devient tellement pathétique... Et le pire c'est qu'ils vont passer leur temps à aboyer que les autres régimes sont sous propagandes...

    J'ai lu une fois que la propagande ce n'est pas seulement la répétition idiote de message dans le but de faire adhérer les masses à votre idéologie ; mais c'est aussi l'absence totale d'informations qui viendraient contredire les réalités qu'on vous avancent...

    C'est bien, on a atteint un beau niveau de propagande.

    Elena

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  3. Je vous l'ai déjà dit Karine, jetez votre télé, vous êtes beaucoup trop réceptive à ces conneries. Vous dites même que vous ressentez "le besoin de réagir".
    C'est une erreur. C'est précisément pour cela qu'on fabrique ce genre de merdes.

    Voyez-vous, si vous n'en aviez pas parlé, je n'aurais jamais su que cette insignifiance existait, et le monde aurait continué sa course.

    Faites un break, Karine. Entourez vous de personnes sures et fiables, avec lesquelles vous êtes d'accord, et balancez tout le reste par dessus bord.

    Je vais citer mon grand-père pour finir. Il disait toujours: "Il ne sert à rien de se tracasser pour des choses sur lesquelles on a aucun pouvoir, elles arriveront (ou pas) quoi qu'on y fasse. Il vaut mieux se préoccuper des choses sur lesquelles on a la possibilité d'agir".

    Vous me suivez?

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    1. Maquisards lors de la seconde.
      Preppers en route pour la troisième ?
      L'Histoire un éternel recommencement ...

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    2. Bonjour,
      ce "besoin de reagir" traduit aussi la volonte de ne pas abandonner le terrain aux propagandistes sans combattre.
      Ces jours ci une histoire devient a la mode : "les bombardements russes en syrie provoquent une catastrophe humanitaire". De la a accuser les russes d etre responsables du deferlement de migrants, il n y a qu un pas que la propagande n hesitera pas a franchir.
      Denoncer cette propagande est il efficace? Pas sur. Est ce utile? Oui. Parce qu il ne faut pas perdre la guerre qui est en cours, declenchee comme souvent par les US : la guerre informatique, monetaire, mediatique. C est la pire de toutes parce qu elle est invisible au plus grand nombre.
      Merci pour votre contribution Karine

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  4. Merci Karine.Continuez de dénoncer les méthodes de l'Empire.

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  5. Je pense qu'il est important de réagir et qu'il est vraiment courageux de se palucher une telle connerie. Même si j'avoue être de plus en plus impuissante. La propagande fonctionne à plein d'autant qu'elle est sans relâche et parait coordonnée. Elle est particulièrement efficace sur les autochtones "locaux" européens qui ont peu voyagé, ont un faible niveau d'études et entendent d'une oreille distraite les "infos" des grands médias. Il est certain que beaucoup ont perdu les repères de ce qui se passent réellement dans le monde et au moyen-orient ou avec la Chine ou la Russie en particulier...
    Le résultat de la désinformation continuelle est affligeant. Le citoyen Lambda est perdu, il ne comprend plus rien. Même si au finale les cibles aimeraient mieux comprendre et sentent bien que quelque chose ne tourne pas rond, que la logique a depuis longtemps disparue des commentaires médiatiques, l'humanité aussi. Les gens ne fonctionnent plus que par réflexes. De plus, l'exclusion de la politique de la majorité des citoyens est si importante, l'ennui si grand et la capacité d'agir sur son destin si faible que le voyeurisme aveugle n'est jamais très loin au travers d'une "petite série que l'on se met sous la dent" faute de mieux ou d'un bouquin racoleur. Les ravages sont évidents. A mettre en parallèle avec la préparation de 1914 où la propagande patriotique régnait en plein dans les écoles, les journaux, etc...C'est la phase collective où l'on cesse de réfléchir à "à peu près tout" : le sens de ce que l'on dit, les conséquences, etc... On devrait pourtant savoir un siècle après l'horreur pour quel résultat.
    Ce qui m'inquiète le plus est la perméabilité de la majorité des personnes autour de nous aux mauvaises pulsions en l'absence de référentiel solide, la perte de l'esprit critique (comme si la perversité politique et médiatique était impossible dans notre pays !!!). Ceux qui manipulent le savent très bien. La fiction ici est le passage à l'acte "mental". Or ces "cibles" , dans la réalité, si elles étaient en prise avec la détresse immédiate d'un être humain "réel" ne pourraient que lui porter secours.
    Détruire l'humanité qui est en nous c'est plonger le monde dans l'autodestruction.

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  6. Ils font dans la propagande augmentée soit : la russophobie pure, le mensonge et le révisionnisme.
    L'Ukraine a servi de laboratoire à l'action unitaires des forces néo libérales et d'extrême droite et aux mots d'ordre anti russes et anti communistes. Ils ont conclus que ça a marché au début mais qu' au final c'est devenu une bérézina parce qu’ils avaient perdu la bataille idéologique. Depuis ils impulsent une offensive médiatique mondiale consistant à faire passer les russes pour des agresseurs, des brutes,des menteurs voire des violeurs etc.
    Oui le discours anti russe véhiculé par les infos TV et le cinéma grand public politisé prend de l'ampleur aujourd'hui parce que la Russie veut suivre son chemin en respectant les autres, en promouvant la paix et refuse de devenir un simple territoire sous domination euro atlantiste, une société holiste.
    On peut agir sur le cours des choses : c'est le message de ceux qui ont fait table rase des régimes tyranniques et obsolètes en 1789, en 1917, en 1945 et de ceux qui ont décolonisé leur nation .
    Karine, continuez à contrer la propagande racialiste made in USA, à dire votre vérité qui est de plus en plus partagée. 4K07022016

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  7. il y aussi, dans dans presque la majorité de la population occidentale européenne, une volonté véhémente, de continuer, par la soumission politique, sociale, culturelle, par cette vénalité qu'offre l'aide sociale, en confirmant le système impérial, du pain, du vin et des jeux de cirque une hypocrisie volontaire, je ne sais pas, je ne vois pas, je ne comprend pas... ils ont applaudies Pétain, une semaine plus tard De Gaulle et s'il le faut discrètement ils aquieseront l'extermination d'une population, rouge, noire, jaune protestante, musulmane, anarchiste, communiste , hommes, femmes enfant pour continuer à se chauffer le cul. ils ont déjà tué Socrate

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