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vendredi 2 septembre 2011

Medvedev propose l'élection directe des sénateurs

Медведев готов к выборам
Медведев предложил вернуть выборы сенаторов




Le Président Medvedev, de manière non officielle, lors d'une conférence de presse à Sotchi, a proposé de mettre en place l'élection au suffrage universel direct des membres du Conseil de la Fédération.


Comme l'ont remarqués certains sénateurs, cette réforme ne peut se faire sans une modification de la Constitution. Evidemment, les députés sont plus réticents. Les partis politiques pas vraiment très chauds non plus. Mais l'idée est largement soutenue au sein du Conseil de la Fédération, dont les membres apperçoivent ainsi un bout de légitimité et donc de pouvoir potentiel.


Ce système n'a existé que de 1993 à 1995. En 1995, le mode de nomination a changé (présence automatique du Gouverneur et du président de la Chambre locale) sur fond de conflit entre l'administration présidentielle et l'opposition majoritaire à la Douma. En 2000, sous l'influence directe de Vladimir Poutine, le système a été modifié et ce sont des "délégués" du Gouverneur et du président de la Chambre qui sont envoyés par les régions au Conseil de la Fédération.


Plusieurs fois, un projet de loi visant à la restauration des élections au suffrage universel direct a été lancé, mais soit il a été bloqué par le Président (Eltsine en l'occurence), soit par la Douma, soit simplement abandonné.


Pour l'instant la proposition de Dmitri Medvedev n'a pas été formalisée et aucun projet en ce sens n'est à l'examen au sein de l'administration présidentielle.


Plusieurs remarques.


Une élection au suffrage universel direct renforce toujours le poids de son destinataire. Il est intéressant de noter que cela vise le Conseil de la Fédération dont d'étranges propositions ressortent ces derniers temps, comme la restauration du bagne ou l'exception russe en matière d'application des décisions de la Cour de Strasbourg. Propositions choquantes, critiquées et abandonnées. Mais qui ont existés et laissent un goût amer dans la bouche.


D'un point de vue de logique purement constitutionnelle, la double élection au suffrage universel direct et de la chambre basse - ce qui est habituel - et de la chambre haute est un non sens dans les pays de droit continental dont fait partie la Russie. Si les populations ont besoin de sentir que leur intérêt local est représenté, elles ont justement les parlements locaux et leurs députés en plus de la Chambre basse fédérale ... où siègent également des députés. Qui ne doivent pas que représenter les intérêts du pouvoir, mais également des simples gens. Quand les sénateurs sont "élus/nommés" par les exécutifs et législatifs locaux, ne sont-ils pas à même de représenter les intérêts locaux? Cela signifie-t-il qu'une élection directe locale serait plus efficace? Pourquoi dans ce cas ne pas commencer par restaurer l'élection des Gouverneurs, si tout à coup la démocratie locale devient tellement importante?


Tout cela ressemble à une farce de mauvais goût.



jeudi 1 septembre 2011

2 m2 en détention préventive: une violation "légalisée" par la Cour suprême russe

Содержание в полицейской камере сравнили с пыткой




Le 30 août, la Cour suprême de la Fédération de Russie a refusé de donner satisfaction à la requérante L. Burgova contestant l'acte normatif selon lequel un espace de 2 m2 est légalement prévu pour toute personne mise en détention préventive, quand les normes européennes sont à 7 m2. Son intérêt à agir se fondait sur le fait que son époux est mort en détention préventive. La Cour a refusé d'y voir un intérêt personnel à agir.

Suite à un scandale familiale causé par l'alcool, Mme Burgova appelle la milice pensant que son époux pourra dégriser dans leur locaux quelques heures, qu'il aura une amende et ensuite rentrera à la maison, calmé. Mais ni dans la nuit, ni le lendemain elle ne reçoit de nouvelles, ni ne le voit apparaître. Elle le trouvera à la morgue.

Il fut incarcéré dans une cellule d'environ 8m2, partagé par 9 personnes, sans possibilité de s'allonger, seulement de rester assis sur le sol. Suite aux conditions inhumaines de détention, un combat éclate entre les détenus qui veulent s'allonger et dormir. Son époux reçoit un coup violent sur la tête qui lui sera fatal.

La personne qui a frappé son époux a été condamnée. L'inaction des miliciens a été déclarée illégale. Mais elle a voulu contesté l'acte normatif par lequel de telles conditions de détention sont rendues possibles.

Une cellule standard est un sac de pierre avec un banc en bois. Pour aller aux toilettes, il faut compter sur la bonne volonté des miliciens ou utiliser un pot collectif posé dans la pièce. Les punaises et la gale sont également inclues dans le service. L'éclairage est constitué d'une ampoule nue au plafond.

L'avocat de la requérante rappelle que de telles conditions de détention, moins de 3 m2 par personne, sont considérées en Europe comme une atteinte à la dignité humaine, voire de la torture. Devant le refus de la Cour suprême, un recours est en préparation devant la CEDH.

Selon les données du Ministère de l'intérieur, il y a en Russie plus de 2000 bâtiments prévus pour la détention préventive. Pour la plupart, ils ont été construits dans les années 70-80. Il y manque souvent l'eau courante, les canalisations et la ventilation. Selon un membre du Ministère, à cette époque les impératifs liés aux droits de l'homme n'étaient pas si forts, l'important était que la personne arrêtée ne s'évade pas.

Il faudrait plus de 30 milliards de roubles pour réellement faire des travaux modifiant les conditions de détention, mais le financement est insuffisant. En 2012, il est prévu de débloquer 2,2 milliards de roubles pour faires quelques travaux d'amélioration sur 91 sites.

Cette décision de la Cour suprême est significative de toute la distance entre les obligations théoriques juridiques et les contraintes matérielles de la réalisation des réformes. La question de la réforme pénitentiaire est très présente en Russie, mais elle se heurte et à une vision de la personne incarcérée qui est déshumanisée et à un problème de financement. Toutefois ceci ne justifie pas la position de la Cour suprême qui institutionnalise une violation des normes européennes par la Russie, quand le Président Medvedev vient juste de lancer un monitoring sur l'exécution des décisions de la Cour constitutionnelle et de la CEDH, qui doit également concerner les conditions de détention provisoire. Ce monitoring permettra-t-il simplement d'évaluer l'état des dégâts ou sera-t-il le fer de lance d'une réforme fondamentale?


mercredi 31 août 2011

Les maires russes: une expertise tendancieuse de leur situation

Мэров красят политические решения
Опубликован рейтинг политического влияния глав городов

Наталья Городецкая



La deuxième expertise de "l'importance politique des maires russes" (voir le texte intégral ici en russe) a été réalisée sur plus de 200 villes par le fond "Politique perterbourgeoise" et l'agence de communication "Mintchenko consulting".

Pour notre part, on donnera quelques précisions sur ces institutions. Le fond "Politique péterbourgeoise" a été créé en 2002 pour sonder l'opinion publique sur certains sujets politiques. Plusieurs de ses membres font partis de la Chambre sociale de la Fédération de Russie (Obschestvennaya palata) et de différents Conseils auprès du Président russe. Ses paratenaires privilégiés sont le parti Edinaya Rossiya, ces mêmes Conseils, la Chambre sociale, le Centre de politique conjoncturelle de Russie (Tsentr polititcheskoï koniounktouri Rossii), etc. Sur la présentation de ce Fond, voir ici.

L'agence de communication "Mintchenko consulting", en tant que telle, a été fondée en 2007. Son activité est couplée avec une agence de relations publiques (fondée en 1993) et un institut international d'expertise politique (fondé en 2003). Elle s'occupe, notamment, du dialogue entre le pouvoir et le bisness, de l'évalution des risques en politique, de lobbing, etc. La liste de ses partenaires privilégiés n'est pas accessible sur leur site.

L'analyse a donc porté sur 200 villes (à l'exclusion de Moscou et St Petersbourg qui sont des Sujets de la Fédération) d'importance diverse. L'évaluation va de 1 à 5. Seulement 8 maires ont obtenus 5, 28 ont obtenus 2 - ce qui met leur avenir en question, et un maire a obtenu 1 - son avenir politique est évident.

Dans l'appréciation de leur activité, la question centrale était leur aptitude à régler de manière autonome les questions politiques locales et leur gestion des ressources économiques. Les maires qui ont obtenus 5 ont également pu démontrer leur capacité à gérer les conflits impliquant les élites et à contrôler les décisions prises par les députés ou les city-manadger. Les résultats obtenus par les maires dans les primaires du parti ont également comptés (on précisera que seul le parti Edinaya Rossiya organise ces primaires, ce qui défavorise automatiquement les maires n'en faisant pas parti).

Les maires qui ont obtenus 2 ont été notés indépendamment du fait qu'ils ont été élus au suffrage universel direct (par la population de la ville) ou indirect (par le Conseil municipal). Ce qui a joué sur leur notation est leur manque de popularité, les conflits avec l'élite locale, le parti Edinaya Rossiya et/ou les gouverneurs des régions dont ils dépendent géographiquement. Selon l'opinion du directeur du fond "Politique péterbourgeoise", M. Vinogradov, ces maires peuvent dire adieux à leurs fonctions, à moins qu'ils ne gênent personne.

Par ailleurs, un autre critère a joué un rôle fondamental dans la notation, il s'agit de l'appartenance partisane des maires. Plus concrètement, leur aptitude à entrer dans Edinaya Rossiya leur a apporté des points, alors que leur non appartenance partisane - ou pire - leur appartenance à un parti d'opposition a fait singificativement chuter leur notation.

21% des municipalités russes ont déjà remis en cause le système de l'élection, dont 44 sont des capitales régionales. Sur les 200 villes analysées, seulement 107 s'opposent à l'instauration des city-manadger.

Pour conclure, on peut affirmer sans surprendre personne, que cette expertise n'a pas été demandée pour apprécier objectivement la popularité des maires dans leur ville, mais pour évaluer leur fidélité au Parti dans les épreuves électorales à venir. Les critères retenus sont, en ce sens, très significatifs. Le maillage permettant des élections "transparentes et fiables" se met en place.

mardi 30 août 2011

Le Front populaire de Poutine lance sa campagne électorale ... en dehors de toute contrainte législative

Неподзаконный народный фронт
«Общероссийский народный фронт» готовит собственные агитационные ролики


Le Front populaire de Poutine commence sa propore campagne électorale avec le parti Edinaya Rossiya. La télévision montrera des bandes annonces avec des "acteurs sociaux candidats", des évènements politiques sous l'égide commune du Front populaire et de Edinaya Rossiya seront organisés, mettant en place une sorte de campagne extérieure. Le principal but est de lier dans la représentation de l'électorat le Front populaire et les candidats du parti Edinaya Rossiya.

La campagne "indépendante" du Front populaire a commencé dans de nombreuses régions, comme à St Petersbourg où la ville est recouverte par les panneaux publicitaires du Front populaire, opération dont s'occupe l'agence News Outdoors. Il est intéressant de souligner que ces espaces publicitaires ont été loués pour toute la période allant jusqu'à la fin de l'année. Ils seront donc toujours présents lors de la campagne électorale officielle, puisque le Front populaire, n'étant pas un parti politique, n'est pas soumis à la législation réglementant le déroulement de la campagne électorale et n'entre pas dans le décompte visant à contrôler la stricte égalité dans les médias de la représentation des partis politiques participant aux élections.

Cet état de fait semble tout à fait logique aux membres et du Front populaire et de Edinaya Rossiya, puisque le Front populaire en tant que tel ne participe pas aux élections, mais un de ses éléments principaux - Edinaya Rossiya. Voici la réponse.

Quant à la Commission électorale, elle ne voit pas non plus de problèmes à la participation du Front populaire dans la campagne électorale. En effet, selon les mots de Elena Dubrovina (membre de la Commission), tout citoyen russe et toute association a le droit de faire sa campagne de soutien à un candidat ou à une liste de candidats.

Selon le directeur de l'Institut international d'expertise politique E. Mintchenko, cette technique visant à constituer une association soutenant un mouvement politique et s'associant à lui afin de renforcer la campagne politique en sa faveur en période électorale a déjà été utilisée dans certaines régions de Russie. L'idée de la création du Front populaire a été de mettre cette technologie en place au niveau fédéral.

Selon le député communiste S. Obukhov, cette technique ne peut être qualifiée autrement que par l'escroquerie. Si cela va perdurer jusqu'aux élections du 4 décembre, il saisira la Prokurature.

De nombreux effets de manches législatifs ont agités l'espace politico-juridique ces deux dernières années pour renforcer et l'égalité des partis politiques et la transparence des élections. Vote électronique en développement - jusqu'en 2015, réception des preprésentants des partis d'opposition à la Douma - une fois par an, loi sur l'égalité d'accès aux médias publics pour les partis représentés à la Douma ... Toutes ces belles déclarations d'intentions ... ne sont que des déclarations d'intentions. Quand les enjeux sont réels - les élections - il faut gagner, trop d'intérêts et personnels et économiques sont en jeu. Intérêts qui se supperposent souvent d'ailleurs. Alors la fin justifie les moyens.

lundi 29 août 2011

Pravoe Delo: le manifeste tant controversé

Suite à la publication par Izvestia d'un article scandaleux (ici) diffusant une version non confirmée du programme politique du parti Pravoe Delo, dans laquelle il était question de la fusion des postes de Président et de Premier ministre, de la mise de l'Oblast de Kaliningrad sous juridiction européenne ou encore de la création d'une armée unique entre l'UE et la Russie, la véritable version du Manifeste est apparue sur le site officiel du parti Pravoe Delo (texte en russe ici).

En dehors des propositions qui ont déjà été rendues publiques, comme le retour aux élections au niveau des gouverneurs, la protection des élections des maires, une union économique et stratégique avec l'UE qui n'entraîne pas l'entrée de la Russie ni dans l'UE elle-même, ni dans l'OTAN, d'autres idées, surprenantes mais souvent constructives, sont avancées. Même si beaucoup d'entre elles ont été critiquées tant par des représentants du pouvoir que de l'opposition, ce qui est peut être bon signe (voir ici et ici).

Voici quelques positions phares:



  1. Limiter pour une durée d'au moins deux mandats le nombre des députés à la Douma représentant le parti du pouvoir à 50% des place plus une. Ceci doit permettre de dégager l'espace politique, de faire une place à l'opposition et lui donner le temps de réellement se construire et de mettre un terme à l'entente entre le Parlement et le Gouvernement. Il s'agit donc de refaire de la Douma un lieu de discussion, contrairement aux déclarations de B. Gryzlov.


  2. Renouveller le corpus des juges, ne pas nommer aux fonctions de juge fédéral toute personne qui n'aurait pas quitté la fonction publique depuis au moins 10 ans et exercé en tant qu'avocat par exemple au moins 5 ans, mettre en place l'élections des juges de proximité. Ces mesures doivent permettre de renforcer l'indépendance des juges par rapport au pouvoir.


  3. Les procureurs doivent être élus par les citoyens et ne doivent plus avoir le monopole de l'engagement de l'accusation surtout lorsque les affaires concernent des infractions commises par des fonctionnaires ou des représentants du pouvoir.


  4. Le renforcement de la lutte contre la corruption par un renforcement de la responsabilité des fonctionnaires, une plus grande rotation des fonctionnaires non élus, un contrôle accru de leurs ressources et dépenses.


  5. La suppression pour les fonctionnaires de nombreux avantages en nature comme un service de protection particulier, les maisons de campagne, les signaux spéciaux sur les voitures ...


  6. Une responsabilité réelle du Gouvernement devant le Parlement, la simplification du régime du referendum et le recours systématique à cet instrument pour toutes les questions politiques majeures. Ceci pour redonner la parole au peuple et à ses représentants.


  7. L'instauration d'une justice administrative autonome permettant la mise en responsabilité de l'Etat en tant que tel, avec possibilité d'action récursoire, afin de garantir la réparation intégrale du dommage pour les victimes et la charge de la preuve incombant à l'Etat et non aux particuliers.


  8. La mise en place de programmes de développement du secteur agraire avec un soutien de l'Etat, le développement de centres urbains dans les zones reculées, le renforcement du tissu d'infrastructures ...


  9. Un programme social visant à la mise en place d'une médecine et d'un enseignement réellement gratuits et bonne qualité.


  10. Le soutien à la création d'entreprises de taille moyenne.


  11. La transparence dans la gestion des entreprises publiques et l'accès public à l'information.

Ce programme est certes surprenant ... mais intéressant. Surprenant car de la part d'un parti de droite, d'un parti des hommes d'affaires, il comporte une grande dimension sociale. Ce qui choque la classe des libéraux politiques russes, plus radicaux dans leur vision politique. Mais c'est un programme intéressant car justement il répond aux réelles attentes de la population en proposant des mesures très concrètes tant sur le plan social qu'économique ou politico-constitutionnel. Bref, il s'agit réellement d'un programme politique, ce qui est novateur dans le paysage russe actuel. Bien sûr, certaines dispositions sont contestables, mais il a et le mérite d'exister et le mérite d'ouvrir la porte à la discussion sur des sujets de société réels, sur des réponses réelles à des problèmes non moins réels. La suite montrera si les élections selon les règles du jeu en vigueur permettront de lui donner vie.