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lundi 2 mai 2016

Arte censure un film russe d'opposition disant la vérité sur Browder

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Le journaliste russe d'opposition, Andrei Nekrassov, vivant à l'étranger, a décidé, il y a trois ans, de commencer un film sur l'affaire Magnitsky, ce juriste de Hermitage capital (société de fonds d'investissement), société dirigée par B. Browder. La version qui, jusque-là, avait les faveurs médiatiques est que Magnitsky est mort car il a découvert des malversations faites par le pouvoir russe et a été tué en prison sans recevoir de soins. Cette version a servi de fondement à la mise en place de la première "Liste", regroupant les personnalités russes que l'Occident "ne peut fréquenter sans se salir".

C'est dans cet état d'esprit que A. Nekrassov a commencé son reportage, persuadé de l'intégrité de Browder. Mais il le termine en démontant totalement la version "officielle" occidentale, démontre l'impossibilité de la position de B. Browder sur le fond et, en fait, disculpe la Russie. Finalement, son documentaire, trois ans de travail, est interdit de projection au Parlement européen et Arte le déprogramme sine die.


Chacun connait la version officielle de l'affaire Magnitsky. Vous trouverez ici un article paru dans le journal Le Monde qui propage parfaitement le dogme officiel. L'affaire se termine mal: Sergueï Magnitsky, incarcéré au nom de Hermitage Capital pour fraude fiscale, meurt en détention provisoire en 2009, suite à l'absence de soins médicaux.

Andrei Nekrassov est un journaliste d'opposition, dans le sens où il n'aime pas le régime de V. Poutine et l'écrit fréquemment. il participe également à de nombreuses actions anti-régime. Comme vous pouvez le lire ici dans cet article de RSF qui s'inquiète de la liberté de la presse en Russie. Mais RSF reste silencieux sur l'interdiction du dernier film de Nekrassov. En Europe. Démocratique et libérale. "La loi Magnitsky. Les coulisses". Interdit suite aux pressions de B. Browder.

Voici ce qui s'est passé.


Le 27 avril, les spectateurs et les députés européens s'apprêtent à voir ce film documentaire, financé par de grandes chaînes de télévision publiques européennes comme la chaîne franco-allemande Arte, les chaînes norvégiennes NRK et NFI, la chaîne finlandaise YLE etc. qui doit être présenté au Parlement européen. Mais brusquement, il est annulé. Alors que les gens entrent dans la salle. Que s'est-il passé? Les juristes de B. Browder menacent de poursuites en justice toute personne qui montrerait ce film. Il y aurait des "problèmes juridiques", la famille de Magnitsky et des collaborateurs de Hermitage Capital ont retiré leur accord à la projection du film. Certains affirment même que Browder aurait débarqué de Londres au Parlement européen, d'où il aurait été vu sortir  -satisfait.

Arte, qui devait le présenter le 3 mai, ne partira pas en guerre pour la liberté d'expression et le retire de la grille de programmation en attendant des cieux plus cléments. La réputée organisation Svoboda (Liberté) s'en félicite. L'on appréciera le paradoxe.

Mais que s'est-il passé? Une excellente réponse de Andrei Nekrassov sur son blog sur le très libéral et très opposant Echos de Moscou éclaire les zones d'ombre. Voici la traduction libre de certains passages.
Pendant trois ans d'enquête, le journaliste, aidé d'experts et de divers spécialistes de différents pays européens, a examiné les documents de l'affaire Magnitsky, les dépositions, les conclusions et diverses expertises. Finalement, il est arrivé à la conclusion que la version de B. Browder n'était pas tenable.
Lors de la dernière rencontre avec B. Browder, il y a environ un an, il avait déjà des doutes, mais pas de certitudes. A. Nekrassov pensait obtenir les réponses à ses questions, permettant d'expliquer la situation. Au lieu de réponses, il a obtenu une accusation d'utiliser la version du FSB et la recommandation de s'adresser à l'avenir aux avocats de Browder.
Ceux-ci ont d'ailleurs immédiatement, après cette rencontre, envoyé une lettre selon laquelle Natalia Nikolaevna (la mère de Magnitsky) n'autorisait plus l'utilisation  de son interview, faite avant la dernière rencontre avec Browder.
Browder a dû comprendre, aux questions, que, à la différence des journalistes russes et occidentaux, cette fois-ci ce ne sont pas ses communiqués de presse qui seront relayés, mais l'équipe de A. Nekrassov a voulu faire un véritable travail d'enquête.
Il ne s'agit pas du paradigme simpliste qui est souvent servi: si c'est contre la Russie, c'est libre et éclairé, si c'est favorable à la Russie - c'est payé par Poutine et le Kremlin. Une dernière citation de A. Nekrassov à ce sujet:
"Je croyais en l'histoire de Browder et ce mensonge dont j'ai pris petit à petit conscience m'a poussé dans une dépression, m'a ôté le sommeil, m'a obligé à changer la trajectoire de ma vie. J'étais et je reste critique par rapport à Poutine et à ce système qui conduit à ce genre de tragédie (...). Mais, pour autant, cela ne signifie pas qu'un artiste, un documentaliste, un citoyen ait le droit de ne pas appeler les choses par leur nom même si, selon l'opinion de certains, cela sert les intérêts du pouvoir russe."
Le système occidental atteint un tel degré de rigidité qu'il ne peut plus se permettre de sortir d'une démarche propagandiste. Le journaliste russe d'opposition en fait les frais, il faut le bloquer. Ca a effectivement dû être un choc pour lui: se retrouver au coeur de l'Europe face à un système liberticide. Le voile s'est, pour lui, déchiré. Il change sa trajectoire de vie. Comme beaucoup d'autres commencent à ouvrir les yeux.

Le seul droit qui reste est-il celui à la dissidence? Autres temps, autres lieux, tout se répète. 




6 commentaires:

  1. sera t'il possible de trouver ce documentaire ailleurs? utube ou autre média?

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  2. infiniment merci pour cet article. Dans l'affaire Litvinenko il y aurait aussi de sérieux doutes sur la culpabilité de la Russie, sur le MH17 également.On dirait bien que question propagande, les occidentaux commencent à perdre la main, il était temps.

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    1. D'ailleurs, si tout va bien (on le voit, rien n'est gagné d'avance)c'est ce soir que la BBC2 diffuse son documentaire sur le MH17. Pour le moment, et alors que cela fait presque deux semaines que la nouvelle est accessible, aucun média important en France n'a relayé l'info. On verra demain ou dans la semaine...

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  3. Les valeurs et les repères que nous connaissions et qui représentaient la spécificité du monde occidental ont complètement disparu. Nous en sommes profondément affligés ! Alors un opposant russe qui croyait à la "Démocratie" et à la "Liberté de la Presse" ici, quelle désillusion !!!

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  4. Arte, jounalistes financés par la CIA ?

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  5. N'oubliez pas que BHL est au conseil d'administration d'ARTE.
    Comme par hasard ...

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