Un ancien député russe a été assassiné hier à Kiev et évidemment, la presse française reprenant très "objectivement" les positions ukrainiennes, accuse immédiatement la Russie, voulant faire de Voronenkov un farouche opposant au régime. Amusant pour quelqu'un qui en a profité jusqu'au bout et voulait revenir. Revenons sur une affaire moins simple que l'on ne veut nous le faire croire.
Pour ceux qui veulent se satisfaire de la version primaire anti-russe, il est suffisant de lire l'article du journal Le Monde: un ancien député russe critiquant fortement le "régime de Poutine" s'est réfugié en Ukraine et a été tué par les services spéciaux russes alors qu'il était protégé par les services spéciaux ukrainiens et devait déposer dans le procès contre l'ancien Président ukrainien. Tout est clair, passez votre chemin, même la complexité d'une personnalité très favorable au pouvoir ne dérange pas plus que cela, à quoi bon se poser des questions. Une illustration du niveau de sa rebellion contre le système, photo en compagnie de Narychkine, alors président de la Douma:
Denis Voronenkov, né en 1971, a terminé l'école des cadets puis l'université militaire du ministère de la défense en 1995 et soutient sa thèse de doctorat en droit. En 2000, il quitte sa carrière militaire pour entrer dans l'appareil de la Douma. De 2001 à 2006 il est vice-maire d'une ville moyenne et poursuit sa carrière dans cette région de Netets. En 2006, il commence une carrière universitaire, non sans soutient, car sans aucune expérience il obtient très rapidement la direction de la Chaire de théorie et d'histoire du droit à l'Institut juridique de St Pétersbourg. Ce qui lui sert de tremplin pour entrer par la grande porte en politique et de 2011 à 2016 sera député à la Douma fédérale pour le parti communiste.
Il votera pour le rattachement de la Crimée et proclamera partout l'amélioration de la situation sur place depuis que la Crimée est russe, comme par exemple sur ce tweet:
Mais ses activités extrapolitiques attirent l'attention des services d'enquête. En décembre 2014, le Comité d'enquête demande à la Douma de lever son immunité parlementaire suite à l'enquête pour prise illégale de possession d'un immeuble dans le centre de Moscou, ce qui est refusé. En avril 2015, la Procuratura demande à ce que son immunité soit levée pour qu'il puisse comparaître comme accusé, mais le président de la Douma affirme alors n'avoir pas reçu les documents de la Procuratura et la demande est refusée encore une fois.
Evidemment, lorsqu'aux dernières élections législatives D. Voronenkov ne se fait pas élire, il part en Ukraine et demande la nationalité ukrainienne, qu'il obtient. C'est alors que le "régime de Poutine" commence à lui déplaire fortement. Pour autant, le fait de donner la nationalité ukrainienne à un russe + communiste + reconnaissant la Crimée russe passe assez mal dans les milieux radicaux ukrainiens, qui comprennent très bien pourquoi il est arrivé en Ukraine justement lorsqu'il ne bénéficiait plus de l'immunité parlementaire et non plus tôt.
L'assassinat s'est déroulé de manière assez étrange, beaucoup disent non professionnelle et fait penser aux règlements de compte des années 90.
L'Ukraine a évidemment immédiatement accusé la Russie d'avoir organisé le meurtre. Cette version ne convient, à part à la presse française, qu'au pouvoir ukrainien. Car même les analystes ukrainiens ont du mal à défendre cette version, s'appuyant sur plusieurs faits étranges: le tireur avait son passeport sur lui, il avait une arme reconnue pour être utilisée dans les milieux criminels, il aurait perdu son sac etc. Les professionnels auraient pu travailler beaucoup plus discrètement. Les deux versions plutôt retenues sont celles d'un réglement de compte criminel ou d'une réaction des milieux radicaux.
Une autre version également avancée s'appuie sur la conversation téléphonique qu'il aurait eu avec un ancien partenaire et dans laquelle il aurait exprimé sa volonté de rentrer en Russie.
Plusieurs éléments, font aussi réagir et certains, en Russie, accusent parallèlement les services spéciaux ukrainiens. La personne considérée comme le tueur avait été blessée, mais rien ne mettait sa vie en danger selon la police. Or, à peine entre les mains des médecins, il meurt à l'hôpital. Ce fait est particulièrement étrange. Autant que la facilité avec laquelle son garde du corps, "blessé" par un balle au ventre, sans gilet par balle, se relève et marche à peine appuyé sur la police, qui, bizarrement, lève un blessé, le bouge, sans attendre l'arrivée des médecins.
Par ailleurs, si réellement Voronenkov voulait rentrer en Russie, ce qui est possible, l'Ukraine ne peut pas se le permettre. Voronenkov est un escroc et un arriviste. Il est arrivé en Ukraine pour sauver ses intérêts suite à une proposition du Procureur général ukrainien, qu'il connait personnellement. Son niveau de "protection" est donc assez faible, dans un pays où la lutte entre les groupes est très violente, voire primaire. Il a promis de déposer contre Yanukovitch, c'est le prix de son passeport en plus de déclarations fracassantes contre la Russie, comme à la bonne vieille époque bolchévique. Tout ce qu'il pouvait savoir - et manifestement peu puisqu'il ne connaissait pas Yanukovitch - il l'a déjà vendu. S'il fallait le faire taire, c'était avant, maintenant c'est trop tard. Mais s'il veut rentrer, les ukrainiens comprennent très bien qu'il les vendra comme il a vendu la Russie et ne peuvent se permettre cet échec en terme d'image: comment fuire l'Ukraine européano-démocratique?
Ensuite, le tueur présumé a servi dans la Garde nationale ukrainienne et était de nationalité ukrainienne. Il avait sur lui son attestation, il faisait partie du bataillon Donbas. Pour sortir de cette impasse, le conseiller du ministère de l'intérieur Guérashenko déclare qu'il a été retourné par la Russie. P. Parchov est pourtant plus proche d'un petit criminel que d'un agent double. Il avait son petit business illégal et la police l'avait à l'oeil pour ces activités depuis 2011. Un deuxième homme est recherché.
Mais évidemment tout cela n'empêche pas la presse française d'y voir la "main du Kremlin" qui évidemment tue partout ces opposants tellement dangereux pour le système. Anectode, pour le souligner, le journal Le Monde cite ... un article d'un journal russe. Etrange pour un pays totalitaire, la presse critique ouvertement le pouvoir et cette journaliste russe et écrivain se porte à merveille et en vit très bien par ailleurs.
Que la presse ukrainienne accuse la Russie pour un assassinat d'un ancien député russe et communiste à Kiev perpétré par un membre d'un bataillon nationaliste, soit, mais que la presse française, sans broncher, le répète est désespérant.
Moi, j'en ai marre. Mais voilà un très bon résumé de Karine! En ce qui concerne "L'immonde" ou la chaine Putejadassienne entretenue par nos soins, ils ne sont pas à leur... comment dire ... première contradiction? Dans le "Complément d'enquête " de jeudi dernier ils ont interviewé un certain Beletski, un farouche opposant connu de ces écrits, passages à la télé etc, donc voilà j'aimerais bien savoir s'il était envoyé illico au goulag après avoir dit du mal de la Russie ou ils vont plutôt le buter d'ici quelques jours. Si jamais ça va être fait je vous tiens au courant.
RépondreSupprimerBonjour,
RépondreSupprimerla vidéo de l'assassinat, provenant vraisemblablement d'une caméra de surveillance, est visible sur ce compte tweeter : https://twitter.com/kroslav/status/845299720901869568
L'agresseur vide son chargeur sur sa cible. On voit que le garde du corps est atteint à bout portant avec la même arme. Peut-être avait-il un gilet pare-balles et n'a-t-il encaissé que le choc de l'impact.
comme je l'ai écrit dans un autre blog, ce meurtre est tout sauf "professionnel" et ne peut donc être l’œuvre du FSB (des gens qui savent agir avec discrétion.
RépondreSupprimer1) manque de professionnalisme du tueur qui, en toute logique, arrivant par derrière, aurait du neutraliser en premier le garde du corps (ce qui lui aurait évité sa riposte et qui lui aurait laissé tout le temps ensuite pour tuer sa cible)
2) manque de professionnalisme du garde du corps (Voronenkov n'était il pas protégé par le SBU ?) qui marche à coté (donc ne peut protéger que d'une attaque venant de l'avant) alors qu'il aurait du marcher au moins un mètre, juste derrière, en couverture afin de déjouer une attaque qu'on ne voit pas venir... mais on oblige ainsi l'assaillant à vous dépasser pour avoir un angle de tir et donc, on peut espérer le neutraliser... De plus, le garde du corps tarde à sortir son arme... trop tard en tout cas, sauf s'il s'agit de réduire le tueur au silence...
Voilà quelques éléments de réflexion...