Les élections parlementaires en Russie s'approchent et l'on voit toujours l'opposition dite libérale en Occident et évidemment, elle, "démocratique", jouer le même jeu : ne pouvant avoir un programme, qui lui permette de gagner l'opinion publique et donc de gagner dans les urnes, les provocations et la communication sont son fonds de commerce. Ainsi, le parti Iabloko, qui n'a plus un seul député depuis les élections de 2006, en mal d'existence politique, a décidé d'inclure un opposant radical sous le coup d'une inculpation pénale ayant dirigé une ONG financée depuis la Grande-Bretagne déclarée non désirable en Russie et une juriste travaillant avec des ONG agent étranger. Ainsi, ils pourront se positionner comme "opposition démocratique", victime du vilain "régime" russe. Au moins, auront-ils de nouveaux soutiens en Occident, faute d'augmenter leur base électorale. Les élections, manifestement, ne leur serve plus qu'à cela.
Du 17 au 19 septembre, se tiendront en Russie les élections législatives. Le système électoral est assez compliqué, il prévoit et un vote par liste de parti et un vote de candidats individuels. A cette occasion, la Commission centrale électorale a enregistré 14 listes de candidats de partis politiques, ce qui fait 3 908 personnes sur liste partisane et 2 209 candidatures individuelles.
De manière assez surprenante, puisque le Donbass n'a pas été reconnu par la Russie comme Sujet de la Fédération et que la Russie n'a pas de députés des Russes de l'étranger, les citoyens russes vivant dans les Républiques autonomes de Donetsk et de Lougansk pourront voter, mais uniquement en ce qui concerne les listes. Il serait assez intéressant de savoir finalement quels députés les représenteront, puisque la logique des élections parlementaires est bien le lien personnel entre un député qui représente une population sur un territoire ...
Le parti de droite Iabloko participe à ces élections. Il faut préciser que ce parti a connu son heure de gloire dans les années 90, son idéologie était propre à la période, elle n'a pas évolué, quand la situation dans le pays et l'opinion publique sont très loin de ce que la Russie connaissait alors. Ainsi, dès les années 2000, la chute électorale s'est fait ressentir. 2003 est la dernière année où Iabloko a encore des candidats, avec 4,3% des suffrages : aucun sur la liste présentée (ce qui montre le soutien apporté au parti comme structure), mais 4 élus individuels.
En 2006, le parti prend un cours pro-occidental affirmé et entre dans l'Alliance des libéraux et des démocrates pour l'Europe (ALDE), après avoir déjà goûté en 2002 à l'Internationale libérale. Ce qui est assez étrange, la Russie ne faisant par partie de l'UE, mais en tout cas le programme devient très "tolérant", anti-Crimée et parfaitement aligné sur tous les sujets sensibles.
Aucune poussée électorale n'en a suivi en 2007, Iabloko tombe alors à 1,7% et n'a plus aucun député à la Douma (chambre basse du Parlement russe). En 2011. il remonte à 3,4%, mais sans un élu. Nous sommes donc confrontés à un parti qui est en chute, qui a fait un choix idéologique pro-occidental au lieu de travailler l'électorat national et n'est finalement plus dans une logique politique. Cela explique certainement la composition un peu surprenante de sa liste pour ces élections, qui comprend deux agents étrangers. Rappelons qu'en Russie, sur le modèle de la loi FARA américaine (qui elle n'est jamais critiquée en Occident), des organisations et des personnes, qui exercent une activité politique dans le pays, sur fonds provenant d'un pays étranger ou d'organisations en dépendant, sont classées par décision du ministère russe de la Justice comme agent étranger, ce qui n'empêche pas leur activité, mais ils doivent indiquer sur leur communication qu'ils sont agents étrangers et c'est justement ce point qui est le plus douloureux pour eux. Car si avant l'ignorance leur permettait de bénéficier du "doute national" dans l'opinion publique, la confiance chute dès que la chose est connue.
Ainsi, une juriste de Memorial (organisation agent étranger), Marina Agaltsova, qui a également été financée par une autre organisation agent étranger, l'Institut for Law and Public Policy, est inclue dans la liste, mais ne fournit pas toutes les informations concernant ses sources de revenus.
Ce qui attire surtout l'attention médiatique, et tel est bien le but de la manoeuvre, c'est l'apparition de la personnalité d'Andreï Pivovarov, actuellement en détention provisoire pour ses activités au sein de l'organisation jugée indésirable en Russie, Open Russia. Il n'avait non plus présenté les documents prouvant son activité d'agent étranger, ce qui avait permis dans un premier temps à Iabloko de crier à la persécution du ministère de la Justice, qui leur avait laissé plusieurs jours pour tout mettre en ordre.
Et effectivement, les documents certifiants l'activité de ces personnes comme agent étranger ont été fournis par le parti lui-même, qui est resté médiatiquement très discret sur la chose. Ce n'est pas que les preuves manquaient au ministère de la Justice, mais il est de l'obligation des candidats de fournir tous les éléments du dossier de candidature. Du coup, la liste de Iabloko devra indiquer la mention "agent étranger" et maintenant le parti crie à la persécution en voulant éviter cette marque sur les bulletins de vote, qui va encore lui faire perdre des électeurs, mais gagner des points chez ses "partenaires" étrangers.
Précisons donc que Pivovarov était le directeur de l'organisation Open Petersburg, une filiale de l'organisation Open Russia basée en Grande-Bretagne et officiellement tenue par l'incontournable Khodokovsky, sur le modèle de l'Open society de Soros. En application de la législation russe, il a plusieurs fois été condamné et sa responsabilité administrative a été mise en jeu en raison des activités de cette organisation. Après que l'Open Russia ait été déclaré organisation indésirable (et ses filières donc aussi), il a été décidé le 27 mai 2021 de la fermer en Russie. Le 31 mai, Pivovarov a été interpellé alors qu'il embarquait dans un vol en direction de ... Varsovie.
Le mettre sur une liste électorale donne la possibilité de dire qu'il est interpellé en raison de ses activités politiques. Mais lesquelles ? Il n'a pas été interpellé, parce qu'il se présentait à la députation, il a été interpellé avant cela. En revanche, l'on peut légitimement supposer qu'il a été mis sur la liste de Iabloko, justement parce qu'il a été interpellé et qu'il est en détention provisoire. Ainsi, l'on peut développer le discours du "régime dictatorial russe", comme dans cet article du Monde.
Et en toute logique, des membres responsables d'ALDE ont participé au Congrès de Iabloko instituant leur participation aux élections législatives de 2021. L'on en arrive même à se demander quelles forces représentent réellement Iabloko. Pour exemple, ces paroles alors prononcées :
Alexander Graf Lambsdorff MP, Vice President of the ALDE Party, emphasised the fundamental difference between the conditions for holding elections in Russia and European countries: “I am a candidate in Germany for the liberal party. I can campaign freely, I can talk to whoever I like, I can publish my thoughts whenever I want it to. That is liberty. We know that you are fighting for liberty for Russia. You, dear friends in Yabloko, you stand for the Russia we love: the Russia of proud citizens, the Russia of liberty, the Russia of a bright future. Do continue to open up to others, provide your support to those who do not have a platform like you do, thanks to your good work of the last couple of years!”
Il est vrai que Iabloko va avoir du mal à exister politiquement, car la démultiplication des partis, plus décalés de la réalité du pays les uns que les autres, rend la position d'opposition très inconfortable. Non pas en raison d'une soi-disant répression, mais en raison de l'inintelligibilité des revendications des uns et des autres. D'une manière générale, cela illustre surtout la baisse générale de la culture politique, ce qui n'est pas qu'un phénomène russe, mais global. Toutefois, la spécificité de l'opposition russe est sa radicalité, elle ne propose pas une autre voie politique à l'intérieur d'un modèle idéologique, elle veut imposer une alternative idéologique - faire définitivement entrer la Russie dans la grande foire globale, en se débarrassant des oripeaux de souveraineté politique, qui protègent encore le pays.
C'est beaucoup d'honneur que d'avoir consacré cet article à ce parti de traitres, il n'en méritait pas autant.
RépondreSupprimerOn se demande pourquoi les citoyens russes du Donbass sont invités à voter et pas ceux résidant dans d’autres pays ou régions, comme les pays Baltes, la Biélorussie, l’Arménie, les républiques d'Asie centrales, ’Abkhasie, l’Ossétie du sud... Qu'est-ce qui différencie les Russes du Donbass et leur vaut ce privilège de participer aux élections législatives en Russie?
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