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lundi 20 juin 2011

Les décisions de la CEDH sont (presque) obligatoires

Страсбург предстанет перед высшим судом
Российским Конституционным












Un projet de loi a été déposé à la Douma fédérale par le président par intérim du Conseil de la Fédération permettant de bloquer l'application des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, quand la Cour constitutionnelle s'y oppose. Ainsi prend vie l'idée de Valéry Zorkine quant à la nécessité de prévoir des mécanismes de protection nationale contre la jurisprudence de Strasbourg.




Selon le projet de loi, les décisions de la CEDH reconnaissant la violation par la Russie de la Convention européenne des droits de l'homme ne pourront servir de fondement à une révision des procès que si la Cour constitutionnelle n'a pas déjà adopté une décision contraire sur la question de droit visée et, en l'absence de décision de la Cour constitutionnelle, après un recours auprès de celle-ci visant à examiner la compatibilité de la législation russe incriminée par la décision européenne visée avec la Constitution russe. Si la Cour constitutionnelle ne voit pas de contradiction, la décision européenne pourra s'appliquer, dans le cas contraire elle restera lettre morte.




Même le juge russe à la CEDH Anatoly Kovler trouve ce projet pour le moins étrange, puisqu'il revient à remettre en cause les obligations que la Russie s'est engagée à prendre lorsqu'elle a ratifié la Conviention. Cette position est également partagée par l'ancienne juge constitutionnelle à la retraite, Tamara Morchakova, qui rappelle pour sa part que seule la CEDH est habilitée à interpréter la Convention. Elle estime toutefois qu'il y a des chances que ce projet n'ait été initié que pour vérifier la réaction de la société à cette idée.




Sur le plan politique, l'idée est claire: protéger la législation russe contre les modifications nécessitées par les mesures d'ordre générale contenues dans les décisions de la CEDH. Ce qui manifestement remet en question la véritable volonté du pouvoir politique actuel - et du Président - d'une libéralisation et d'une normalisation du système juridique russe.




Sur le plan juridique, c'est une aberration totale, puisque cela remet en cause la hiérarchie des normes posée par la Constitution russe, selon laquelle, traditionnellement, les normes internationales ont une valeur infraconstitutionnelle et supralégislative. On rappellera que les décisions de justice, même celles de la Cour constitutionnelle, ne peuvent revêtir une valeur constitutionnelle. Cela revient donc à octroyer à un acte inférieur la possibilité de bloquer l'application d'un acte supérieur. Sans oublier que les normes du droit international - dont la Convention européenne et les décisions de la Cour font parties - sont d'application directe, toujours selon la Constitution, puisqu'elles ne requièrent pas de mesures nationales de transposition. Or ces décisions de la Cour constitutionnelle remettraient en cause le caractère direct de l'application de normes internationales, contrevenant ainsi au texte même de la Constitution russe.




Le souci de protéger l'indépendance de la justice est largement louable. Il est toutefois regrettable que ce souci ne s'applique qu'à l'encontre de mécanismes juridiques normaux internationaux et non pas à l'encontre de mécanismes politiques intérieurs anormaux.

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