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vendredi 9 décembre 2011

Le pouvoir prêt à la discussion ... l'opposition se méfie

Власть готова переговорить с оппозицией
Оппозиция не верит в то, что разговор будет полноценным


Le pouvoir doit entrer en dialogue avec l'opposition. Cette position est partagée par les deux hommes forts du système, Poutine et Medvedev. Mais l'opposition a des doutes sur la sincérité de cette déclaration, estimant que le dialogue doit conduire à une réforme en profondeur du système politique, ce à quoi le pouvoir n'est pas prêt aujourd'hui.

Les élections parlementaires, dont les résultats sont contestés par l'opposition, a changé en profondeur l'attitude du tandem envers des forces politiques d'opposition. Si avant, il ne les invitait qu'à une critique constructive, une participation au cours politique choisi par Edinaya Rossiya, maintenant le discours change et ne s'adresse plus qu'aux partis représentés à la Douma, cette opposition hier encore léthargique.

Hier, Poutine, en s'adressant aux représentants du Front populaire déclarait: "Nous devons entrer dans le dialogue avec ceux qui s'opposent, leur donner la possibilité de s'exprimer, en utilisant leur droit constitutionnel à manifester et à exprimer leur position.". Quant à Medvedev, depuis la République thèque, soulignait que "à l'évidence, notre société devient plus concurrentielle et une seule force n'est plus à même de prétendre à la gouvernance".

Ces déclarations ont toutefois provoqués une certaine hésitation de la part de l'opposition. Plusieurs d'entre eux, notamment Prokhorov, demandent la tenue de nouvelles élections parlementaires. La quasi-unanimité veut que la Commission électorale procède à un nouveau décompte des voix. Et tous estiment incontournable une refonte du système politique.

Le président de la Commission centrale électorale a dit avoir envoyé au Comité d'enquête les vidéos montrant les falsifications pendant le déroulement des opérations électorales, pour qu'il procède à la vérification de leur authenticité.

Il est vrai que, en remettant les déclarations du tandem dans leur contexte, on sent une certaine hésitation de leur part quant à la marche à suivre. Si Poutine a effectivement rappelé les droits constitutionnels des opposants, il a également souligné que des millions de dollars étaient envoyés aujourd'hui à certains leaders des mouvements d'opposition pour justement provoquer ces mouvements populaires. On en revient toujours à ce grand ennemi qui vient de l'étranger et qui veut détruire la Russie. Mais parallèlement, il semble aussi y avoir un début de prise de conscience que le pacte "la liberté contre le pain" n'est plus adapté à la société russe actuelle, qui semble vouloir définitivement sortir du féodalisme politique post-soviétique. Sortir de cette période de transition où elle se dégrade pour se construire en tant que société russe - et non plus post-soviétique. Espérons que les représentants du pouvoir et les représentants de la société comprendront les enjeux pour construire ensemble un espace où chacun pourra avoir sa place.


jeudi 8 décembre 2011

2m2 par détenu: la Cour constitutionnelle hésite à défendre la dignité humaine

Voir: http://sutyajnik.ru/news/2011/12/1898.html

Une des curiosités du droit russe est le concept de "détention administrative". Il s'agit bien d'une détention, dans le sens habituel du terme, donc d'une privation de liberté, mais une détention qui aurait non pas un caractère pénal, comme cela est normalement le cas, mais un caractère administratif. Pourquoi? Parce qu'elle intervient après la commission d'une infraction administrative par un citoyen. Le critère n'est pas alors celui de la privation de la liberté, mais de la nature de l'infraction commise. Ce non-sens permet surtout de priver de liberté des individus, non pour quelques heures, mais pour des semaines, voir en réalité des mois, sans pleinement garantir leurs droits processuels.

Pour les personnes placées en détention "administrative", une disposition spéciale est prévue par un règlement du Gouvernement n° 627 du 15 octobre 2003, dont le point 11 prévoit une surface légale de 2m2 par détenu. Dans ces conditions, la vie en cellule est en soi une atteinte à la dignité humaine, le détenu ne perdant pas sa nature humaine du simple fait de sa privation de liberté! Les agressions, les maladies et les décès sont alors une des conséquences désastreuses de cette disposition.

Pourtant la justice ne semble pas pressée de normaliser la situation. Quand Mme Bougrova s'adresse à différentes instances pour contester la validité de cette disposition qui a causé la mort de son mari en détention "administrative", la Cour suprême russe rejette le recours au motif cynique que seul l'intéressé est en droit de contester la validité d'un acte normatif. Cette incurie va-t-elle se répéter devant la Cour constitutionnelle, qui depuis plusieurs mois hésite à se prononcer?

Or, s'il est possible de comprendre que les prisons sont surchargées, que matériellement il est difficile d'organiser des conditions de vie normales pour les détenus, il est inacceptable de consolider dans un acte normatif une atteinte aux droits de la personne en tout impunité.

Cela contrevient aux principes européens et la Russie est membre du Conseil de l'Europe. Cela contrevient aux valeurs constitutionnelles. Et la Cour constitutionnelle doit les défendre. Cela contrevient à la moral. Et tout Etat trouve sa raison d'être dans la garantie des valeurs morales dévant organiser la société dont il a la charge.

Et la Russie ne peut être une exception.

mercredi 7 décembre 2011

Les manifestations continuent ... les arrestations aussi!

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/12/06_a_3861454.shtml
http://www.specletter.com/vybory-20112012/2011-12-07/ecshe-ne-maidan-no.html
http://www.specletter.com/news/2011-12-07/40780.html
http://www.kommersant.ru/doc/1832878?stamp=634588520786355766

Hier soir sur Triumfalnaya Plochad à Moscou - une place centrale où se déroule habituellement les manifestations non autorisées de l'opposition - face à la manifestation organisée par Nachi et Molodaya Guardia Edinaya Rossiya, se sont regroupées près de 1500 personnes pour protester contre les falsifications des résultats des élections législatives de dimanche. 569 personnes ont été arrêtées.

Alors que les jeunes activistes pro-kremlin manifestaient avec des ours en peluche et des tambours pour célébrer la victoire d'Edinaya Rossiya aux élections parlementaires de dimanche, des opposants, dont Nemtsov, se sont regroupés au cri de "Russie sans Poutine!" et "Honte!". A peine la manifestation commencée, les arrestations ont débutés, avec une surprenante violence. Les gens ont été chargés de force dans les fourgons, des journalistes aussi, certains ont été battus dans le fourgon par des policiers qui les maintenant de force sur le sol, sautaient à pieds joints dessus. Après avoir été libéré par d'autres policiers, le journaliste de Kommersant, par exemple, a été prévenu qu'il ne saurait pas le nom du policier qui l'a ainsi agressé et qu'il devrait plutôt dire merci d'avoir été libéré.

Même des députés, de Iabloko ou de Spravedlivaya Rossiya se sont retrouvés dans le fourgon, en compagnie d'opposants "durs" comme Limonov ou Nemtsov. Leur carte de députés ne les ont pas aidés.

Quand des journaliste se sont approchés des jeunes adolescentes Nachi qui tenaient les tambours en leur demandant si elles considéraient les élections "propres", elles regardaient ailleurs pour ne pas répondre. L'une d'entre elles s'est mise à crier hystériquement "Ne me touchez pas! Ne me touchez pas!".

Les forces de l'ordre se positionnaient entre les deux groupes de manifestants. Quand un journaliste a voulu passé le cordon vers les opposants, étrangement un policier l'a laissé passer. Quelques minutes plus tard il se fait bousculer par les forces de l'ordre en arrière, qui lui disent "Maintenant tu vas en prendre!".

Les policiers voulaient renvoyer les gens vers le métro. Ne se tenant plus, l'un d'entre eux a hurler dans le porte voix "Je me moque de qui est au pouvoir! Nachi ou les fachistes! Vous devez partir!".

Même Medvedev sur Twitter a critiqué le comportement de l'opposition en utilisant le mat, qui une langage ordurier venant des prisonniers. Ce n'est pas vraiment digne d'un chef d'Etat.

Si certains ont peur d'un retour vers 91, la population en est encore loin. Mais il y a une raz-le-bol général. Et une certaine hésitation sur la marche à suivre. L'honnêteté des élections est remise en cause par une grande partie de la population. La cote de confiance de Edinaya Rossiya est en chute. Mais le paysage politique a été efficacement désorganisé et la relève n'est pas encore prête. Pour l'instant les gens ont encore quelque chose à perdre et ne semblent pas prêt à jouer le tout pour le tout.

Toutefois, quand les urnes ne permettent plus d'exprimer la volonté populaire, elle s'exprime dans la rue. La museler n'est aujourd'hui plus possible. Soit les politiques vont le comprendre et pourront intégrer cette volonté dans les mécanismes constitutionnels prévus à cet effet, la rendant alors constructive, soit ils voudront la contenir en dehors du système, la rendant agressive et dangereuse pour le système. L'avenir le dira.

mardi 6 décembre 2011

Amnesty international demande la libération des manifestants arrêtés le jour des élections

Amnesty International призвала российские власти освободить задержанных в ходе самого масштабного митинга против итогов выборов


Amnesty International demande aux pouvoirs russes de libérer les manifestants arrêtés lors des manifestations pacifiques contre les violations des droits électoraux, qui ont eu lieu le jour des élections parlementaires de dimanche. Simplement à Moscou, près de 300 personnes ont été arrêtées par les forces de l'ordre, dont le politicien d'opposition I. Iachine, le blogger A. Navalny et le rédacteur en chef de The New Times I. Barabanov.

Selon la directrice de Amnesty international Europe et Asie centrale, ces arrestations honteuses démontrent l'incapacité du gouvernement russe à respecter le droit de ses citoyens à exprimer librement ses opinions et à se réunir.

Les représentants d'Amnesty International ont vu de quelle manière la police a procédé à l'arrestation de personnes qui manifestaient, sans aucune provocation de leur part. Même des personnes qui ne participaient pas aux manifestations ont été interpellées et conduites au poste de police ... au cas où.

On rappellera que lors des manifestations à Moscou, on a compté près de 8000 personnes. Lors de la manifestation autorisée à Tchistie Prudie - dans le centre de Moscou - le nombre de manifestants augmentait avec une telle rapidité après 20 minutes, que la police a été obligée d'élargir la zone autorisée. Ce fut une des manifestations les plus importantes à Moscou ces dernières années.

Quand le défilé est passé devant le bâtiment de la Commission centrale électorale, sont sortis des slogans comme "La Russie sans Poutine! Honte! Constitution! C'est notre ville!". Les arrestations ont alors rapidement commencés.

Selon les forces de l'ordre, à la fin du temps prévu de manifestation, ils ont prévenu que maintenant les gens devaient se disperser, car la poursuite des manifestations n'était pas autorisée. Or, certains manifestants ont réagis de manière agressive et ont commencés à s'en prendre aux voitures. Ils ont été obligés de les arrêter.

Par ailleurs, V. Surkov, le premier vice-directeur de l'Administration présidentielle, considère l'estimation des violations de la législation électorale surévaluée. Quant au Président Medvedev, il doute sérieusement des vidéos mises sur Youtube montrant en image les bourrages d'urnes et autres falsifications.

L'arrestation des manifestants est un sport national en Russie. La peur panique du pouvoir envers les mouvements de masse est irrationnelle, mais elle démontre surtout son incapacité à entrer dans n'importe quelle forme de dialogue avec la société et à gérer les conflits. Sa baisse de popularité risque de provoquer encore un raidissement et de renforcer les rapports conflictuels, si le pouvoir ne sait entrer dans le dialogue.

lundi 5 décembre 2011

La victoire relative d'Edinaya Rossiya

Ce dimanche se sont tenues les élections législatives en Russie, où la victoire du parti Edinaya Rossiya était attendue, mais la question était de savoir s'il pourrait obtenir la majorité qualifiée lui permettant, comme précédemment, de mener les réformes sans avoir besoin du soutien des autres partis représentés à la Douma.

Or, selon les premiers résultats, Edinaya Rossiya obtient autour de 49% des voix, contre 64,3% en 2007. Ces résultats vont obliger le parti à former des coalitions autour de certains de ses projets pour faire passer les textes. Ce à quoi ses membres ne sont pas habitués. L'opposition parlementaire va avoir la possibilité de démontrer sa volonté - ou non - de corriger le cours politique proposé par la majorité. Ils auront, en effet, soit la possibilité de continuer, comme par le passé, à soutenir sans mots dire les projets de loi du pouvoir, soit la possibilité et les moyens de s'autonomiser du pouvoir. La Douma va enfin pouvoir devenir un lieu de débat et de décision.

Autrement dit, ces élections donnent une chance unique au pays et aux partis politiques. Celle de développer enfin le parlementarisme. Celle de développer la vie politique. Celle d'avoir une opposition intégrée et constructive. Beaucoup va dépendre des représentants de l'opposition. Plus que de la volonté d'Edinaya Rossiya, qui elle n'a pas le choix. Mais vont-ils relever le défit?

Cette situation est d'autant plus favorable aux autres partis de la Douma qu'ils ont obtenus des résultats très appréciables. Le Parti communiste reste le deuxième parti de l'Assemblée et renforce sa position avec plus de 20% des voix contre 11,57% en 2007. De même, Spravedlivaya Rossiya fait un score étonnant. Il y a peu de temps de cela, les sondages d'opinion l'estimait autour de 6%, ce qui ne lui permettait pas d'être présent à la Douma. Juste avant les élections, il était donné à 8%. Hier, il a obtenu environ 13% des voix. Le parti de Jirinovsky, LDPR, obtient aussi un excellent résultat avec plus de 14% des voix contre 8,14% en 2007.

Les partis politiques ont désormais les moyens et la légitimité de mettre en place un véritable jeu politique pour que la politique du pays puisse représenter et répondre à toutes les attentes de la population.

La question sociale suite à la crise économique a certainement favorisé le vote de "gauche" (parti communiste et Spravedlivaya Rossiya), mais elle a également renforcé la tendance nationaliste que l'on voit avec l'augmentation des résultats du LDPR. La manière dont Edinaya Rossiya a mené la politique de gestion de crise, qui a permis de limiter les effets nocifs, mais de redonner de l'espoir dans une réelle sortie de crise explique aussi en partie la baisse de ses résultats. La lassitude de la population et le besoin normal et naturel de changement.

Les réflexes de pouvoir vont devoir s'adapter à cette nouvelle donne. Et répétons le, la Russie a une chance incroyable de pouvoir faire évoluer pacifiquement son régime politique vers une normalisation de la vie politique et une plus grande démocratisation. Espèrons que cette chance sera saisie!