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vendredi 30 décembre 2011

L'intelligensia dissidente veut faire son retour comme au bon vieux temps

Voir sur le thème: http://www.grani.ru/Politics/Russia/m.194547.html

Qui sont ces gens dans la rue? Qui sont ces gens qui prétendent les représenter? Deux groupes totalement différents, qui ont du mal à trouver un langage commun. Qui ont du mal à se recouper tant certaines des personnalités qui prétendent à la représentation de la volonté populaire contestataire sont caricaturales.

Suite aux élections du 4 décembre, un mouvement a été fondé "La table ronde du 12 décembre" (jour anniversaire de la Constitution russe), un comité directeur mis en place et une déclaration adoptée. Rien de nouveau dans cette déclaration, elle reprend la résolution adoptée "à l'unanimité" par les manifestants du 10 décembre, en tout cas résolution qui a été rédigée en avance et qui leur a été attribuée, dans la plus pure tradition soviétique. Remise en cause des élections législatives, nouvelles élections, départ de Tchourov (actuel président de la Commission centrale électorale), enregistrement des partis politiques etc.

Et bien évidemment, le comité directeur du mouvement est composé des grandes figures de l'opposition: l'ancien Premier ministre M. Kassianov, le politologue G. Satarov et l'égérie de la dissidence L. Alekseeva.

Revenons sur ces personnalités.

M. Kassianov, ancien Premier ministre lors du premier mandat présidentiel de V. Poutine, entré en conflit pour des raisons qui divergent selon les points de vues, est rejeté par le "système" poutinien de gouvernance. Il entre ainsi dans l'opposition. Sa côte de popularité est à ce point faible, 1% selon les appréciations les plus favorables, que sa posture politique est surprenante. S'il est très populaire à l'étranger, à l'intérieur il ne représente pratiquement que lui-même.

G. Satarov est le président de la Fondation INDEM et ancien conseiller du Président B. Eltsine. Cette fondation a été créé en 1997 pour soutenir l'activité du Centre de recherches politiques INDEM, ONG qui travaille dans le domaine de la "pratique politique" depuis 1990. La direction regroupe les figures clefs des années 90 et presque tous les anciens conseillers de Eltsine. Son activité est largement imbriquée avec des structures américaines, notamment en ce qui concerne le grand projet en matière de réforme de la justice en Russie, où l'on retrouve la Fondation Ford, l'Institut de justice Vera (New York), Roper Starch Worldwide Inc. et d'autres stuctures.

L. Alekseeva, née en 1927, a commencé son activité pour la défense des droits de l'homme déjà sous la période soviétique, est l'une des fondatrice en 1976 du groupe helsinky de Moscou, et continue son activité aujourd'hui malgrè son grand âge. Emigrée à l'époque aux Etats Unis où elle a fait un remarquable travail d'historienne sur l'URSS, elle fait également partie auprès de l'OSCE dans les années 80 de la délégation officielle américaine. Une telle personnalité est certes un symbole du combat pour la liberté, un symbole qu'il n'est possible que de respecter et saluer, mais est-il réellement possible d'en attendre l'impulsion d'une nouvelle politique et moderne et russe?

Le mouvement "La table ronde du 12 décembre", en général, regroupe de nombreuses personnalités largement médiatisées, mais l'on cherche notamment les juristes et autres spécialistes. Comment envisager la mise en place d'un programme constructif visant au changement institutionnel dans ce contexte? N'est-il pas temps pour l'opposition de modifier son mode de fonctionnement et de se différencier du mode de fonctionnement du pouvoir? Changer de figures, favoriser la circulation des élites, ouvrir les portes! Pour augmenter sa représentativité sociale. Pour faire ce qui est demandé au pouvoir.

Encore une remarque, qui explique aussi la facilité avec laquelle le pouvoir - pourtant contesté - peut se maintenir en place. Poutine a demandé une plateforme commune pour mener les "négociations". L'indépendant Koudrine, après avoir "par hasard" rencontré Poutine à Saint Pétersbourg la veille des manifestations du 24 décembre, propose de se poser en intermédiaire pour mener ces "négociations". Réactions de nos néorévolutionnaires: il faut créer cette plateforme pour discuter de leurs revendications avec le Chef!

Mais d'où vient cette douce obéissance infantile? Que leur est-il besoin de discuter de leur revendications? Qu'ils créent leur mouvement, qu'ils aillent au bout de la logique de conflit pour obtenir des élections propres, qu'ils montent de vrais partis politiques et qu'ils se confrontent aux électeurs. Que la logique deviennent enfin politique et que l'on sorte des manigances administratives.

Mais il est certainement plus facile de faire de jolies tables rondes entre soi, quand tout le monde se comprend et parle la même langue et représente les mêmes intérêts.

Mais lesquels au fait?

jeudi 29 décembre 2011

L'administration présidentielle s'organise pour une victoire de Poutine au premier tour

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/12/28_a_3950513.shtml et http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/12/27_a_3943974.shtml

De nombreux changements sont intervenus dans l'Administration présidentielle, où se regroupent les hommes de Poutine. Ainsi, Sergueï Ivanov a pris la direction de l'institution, quittant le Gouvernement juste un peu avant son maître et lui préparant la place. Pour renforcer le passage de pouvoir, enlevant le dernier levier politique de Medvedev, V. Surkov, cerveau de la politique intérieure russe depuis 11 ans, quitte son poste de vice-président de l'Administration présidentielle pour s'occuper de la modernisation au Gouvernement. A sa place apparaît V. Volodine, fidèle des méthodes poutiniennes de gouvernance.

Que cela implique-t-il?

On peut déjà prévoir quelques effets, notamment le durcissement de la ligne politique face aux contestations, le bloquage de l'opposition qui s'en suit et tout investir dans une victoire exemplaire de Poutine aux élections présidentielles. Mais le tout, en ayant conscience de l'instabilité de la situation politique intérieure en raison de l'augmentation de l'activisme social.

Ce changement de ligne politique s'explique par la personnalité des deux hommes, Surkov et Volodine, mis en rapport à la personnalité des deux Présidents, Medvedev et Poutine.

Le "couple" Medvedev/Surkov rendait obligatoirement la politique de Medvedev pas forcément - sur le fond - plus libérale que celle de Poutine, mais dans la forme l'intervention de Surkov permettait de mettre en place un langage de pouvoir qui prenait les formes libérales et démocratiques, en réponse aux demandes de l'Occident.

Le couple "Volodine/Poutine" indique tout de suite que le Poutine qui arrive n'est plus celui qui est parti. Celui-ci a besoin de renforcer sa position, si nécessaire artificiellement. Il n'est plus le leader national incontesté, sans alternative, qui sauve le pays de la menace terroriste, du séparatisme rampant et de l'ombre menaçante des révolutions en couleurs. Il n'est qu'un candidat qui est resté, qui ne veut pas partir et qui veut le pouvoir - pour lui - à n'importe quel prix. Peut-être n'aura-t-il pas besoin de faire exploser à nouveau quelques immeubles, mais il est prêt à prendre le risque d'une explosion sociale.

Et c'est cet homme que V. Volodine se prépare à faire passer en force au premier tour des présidentielles.

Le scénario est absurde et contreproductif. Faire passer V. Poutine au premier tour implique le recours intensif aux ressources administratives. Ce qui va immanquablement impliquer un déficit de légitimité et de son pouvoir personnel, et du pouvoir en général. Alors qu'une victoire au second tour, qui correspond plus ou moins à la réalité de sa force politique actuelle (environ 45% des gens sont prêts à voter V. Poutine), permettrait de faire passer V. Poutine sans trop recourir aux ressources administratives. Et ainsi de pouvoir opposer aux revendications de l'opposition des élections légitimes ... donc non critiquables.

Les deux buts - réussir au premier tour et ne pas provoquer de réactions de masses - sont incompatibles. Cette position est partagée par la grande majorité des analystes politiques.

Mais ici la question n'est plus celle d'une analyse. Il s'agit de réaliser la volonté royale.

Volodine est devenu le Grand Chancelier de ce pouvoir moribond.

mercredi 28 décembre 2011

Poutine n'est pas prêt à rénover le système

Путин покритиковал оппозицию и заявил, что власть не намерена отменять результаты выборов в Думу


Poutine reste sourd aux revendications populaires. En prenant la parole devant le Comité fédéral du front populaire, le Premier ministre a annoncé que le pouvoir n'est pas prêt à remettre en cause les résultats des élections parlementaires, qui ne peuvent être contestées que devant la justice.

Afin de convaincre les gens de la justesse de sa position, V. Poutine avance un argument surprenant, la Douma a déjà commencé à fonctionner. "Les élections à la Douma sont finies. Toutes les fractions parlementaires ont commencés leur travail, le président de la Douma est élu. Aucune discussion quant à la remise en cause des élections n'est possible."

Il a ensuite continué à critiquer l'opposition pour l'absence d'un programme unique et son entêtement à vouloir dévaloriser les élections. Attitude qu'il qualifie de trotskiste, quand l'action justifie l'action, sans but réel derrière.

Selon V. Poutine le problème de l'opposition réside dans le fait qu'il y a beaucoup de programmes différents, que les buts ne sont pas clairement posés, que les moyens de réaliser ces buts ne sont pas clairs et qu'il n'existe pas de personnes pouvant concrètement faire quelque chose.

Dans cette situation, il émerge toujours la volonté de délégitimiser le pouvoir public. Ces gens ont toujours existés, et selon le Premier ministre, ils ont le droit d'exister et il faut même les respecter...

Il promet également de tout faire pour que les élections présidentielles soient transparentes, propres, il parle d'internet, de la nécessité d'écouter l'opinion des gens, etc.

Selon le politicien I. Iachine, V. Poutine n'a pas pris conscience de l'ampleur du mouvement de contestation en Russie. "Indépendemment de sa volonté, de nouvelles élections parlementaires auront lieu. Si ce n'est pas maintenant, ce sera bientôt. Je suis presque certain que cette Douma ne pourra fonctionner jusqu'à son terme. Simplement parce qu'elle n'est pas légitime et que les gens ne considèrent pas ces députés comme leurs représentants."

En ce qui concerne les élections présidentielles, I. Iachine estime qu'elles ne peuvent être justes puisqu'elles sont faussées dès le départ en raison de l'absence de candidats d'opposition. Pour y remédier, il faut modifier la législation sur les élections et permettre à tous les vrais candidats d'y participer. De petites "réformettes" comme des caméras vidéos de surveillances dans les bureaux de vote ou des urnes transparentes ne rendront pas ces élections légitimes. Et l'opposition trouvera toute seule son candidat.

Les deux camps ont en quelque sorte raison, c'est pourquoi aussi leur position se raidie. V. Poutine est dans le vrai quand il dit que l'opposition n'a pas réellement de programme pour la Russie: l'annulation d'élections, le retour des élections des gouverneurs et autres déclarations sont importantes aujourd'hui pour relégitimiser le système politique, mais c'est un programme de crise qui ne construit pas dans le long terme. Sans celui-ci, l'opposition n'arrivera pas à regrouper les masses autour d'elle le jour des élections. Et l'opposition a raison quand elle affirme que Poutine n'a pas consience de l'ampleur du mouvement. Il est également vrai que jouer au Hockey est plus de saison que de manifester... L'exigence de réformes systémiques est justifiée pour réoxygéner le système et redonner le choix au gens. Pour que l'opinion populaire s'exprime dans les urnes et pas dans la rue. Et l'ouverture de l'espace médiatique permettra l'émergence d'un leader d'opposition, le tri se faisant alors naturellement. Mais y a-t-il un réel intérêt à cela?

mardi 27 décembre 2011

Les "révolutionnaires" VIP ou les manifestations "po-russky"

Beaucoup d'encre a été utilisée pour décrire - à juste titre - l'ampleur du mouvement populaire qui embrase la Russie pour y installer durablement des élections propres, condition indispensable à tout système démocratique. Si le but est louable, la manière est plus que critiquable.

Tout d'abord sur Facebook, Olga Romanova, journaliste propulsée sur le devant de la scène médiatique ces derniers mois (dont le mari buisnessman est en attente de révision de son procès) a ouvert un compte pour récolter des fonds afin d'organiser comme il se doit la manifestation du 24 décembre à Moscou (voir ici). Environ 3 millions de roubles ont ainsi été collectés. garantissant "l'indépendance" de l'évènement. Il s'agissait du montage de la scène, des vidéos transmissions, des portails de détection des métaux, etc. Les presque 100 000 personnes ont donc pu voir sur écrans géants la retransmission des discours des orateurs et ne pas en perdre une miette.

Mais pendant ce temps, alors que la foule s'écoulait par les rues attenantes, par les passages souterrains de sortie du métro, passait dans le calme les contrôles de sécurité pour assister à l'évènement, une autre entrée, officiellement appelée VIP par les organisateurs, donnait aux orateurs et au gratin moscovite la possibilité de ne pas perdre de temps, d'énergie, de ce temps, de cette énergie qui leur sont tellement chers, et entraient tranquilement pas une entrée spéciale.

Pendant que la foule piétinait dans le froid et avait pu apporter avec soi des thermos de thé et de café pour lutter contre le climat pas vraiment clément d'un moscou de décembre, des espaces spéciaux, sorte de loges, chauffés, avec buffet pour se restaurer, boissons diverses, ont été mis en place pour ces personnes au-dessus du commun (voir ici). Et afin qu'il ne puisse y avoir de confusion pour cette élite, ses membres ont alors reçu une invitation spéciale, VIP, leur indiquant où se trouvait "leur" entrée et leur promettant tout le confort dû à leur rang.

Car si l'élite moscovite est bien évidemment prête à soutenir un mouvement populaire, il faut lui donner les garanties qu'elle n'est pas ce bon peuple, qu'elle n'a pas besoin de vivre comme ce bon peuple!

Comment peut-on encore s'étonner qu'aucun leader ne puisse être accepté par le peuple?

A quoi servait-il de transformer un mouvement de réaction populaire en une espèce de show bon marché pour VIP sur le côté de la route? Pour des gens qui se soucient de la vie de leur concitoyens comme de leur première layette?

La réponse est simple. Parce que même ici la troisième voie n'a pas eu son mot à dire. L'alternative reste toujours la même: soit une politique apathique menée par le couple Poutine/Medvedev, soit le grand retour des pseudolibéraux des années 90 qui n'ont déjà pu gouverner la Russie. Soit les voleurs-tecnocrates, soit le buisness sans foi ni loi au pouvoir.

D'où cette faute de goût.

D'où la solitude des gens face au pouvoir.

lundi 26 décembre 2011

Retour sur évènement: les leçons de la manifestation du 24 décembre

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/12/23_a_3938614.shtml et http://www.kommersant.ru/doc/1846077

Première leçon. La manifestation n'a pas de leader, et l'opposition non plus.

Deuxième leçon. La manifestation représente des mouvements très différents les uns des autres, l'opposition aussi.

Troisième leçon. La manifestation a du mal à se politiser, l'opposition a du mal à proposer.

Quatrième leçon. La manifestation n'est pas révolutionnaire, l'opposition, elle, ne sait pas.

Il y a certainement beaucoup d'autres leçons à tirer sur les deux manifestations qui ont eu lieu à Moscou - et dans d'autres villes de Russie - les 10 et 24 décembre et ont regroupé près de 100 000 personnes à chaque fois, mais nous faisons ici le choix de voir plus particulièrement ces aspects fondamentaux pour comprendre l'évolution du mouvement lui-même et les réactions du pouvoir.

La manifestation n'a pas de leader.

Parmi les manifestants, toutes les tendances possibles étaient représentées, notamment les nationalistes, les révolutionnaires "orangistes", les simplements "pas content" - qui étaient les plus nombreux. Et des politiques de tous bords ont pris la parole ... et tous se sont fait sifflés. Koudrine, quelque peu en mission. Iavlinsky, qui a du mal à convaincre, son temps est passé. Un nationaliste, qui n'a pas convaincu en voulant créer un comité de salut national. La manifestation reste donc pour l'instant orpheline. Et c'est peut être justement ce qui sauve le mouvement. Car il ne s'agit pas d'un mouvement politique déterminé. Il s'agit d'un réel mouvement populaire. Ce qui fait peur. Car il n'existe pas cet interlocuteur qu'il serait possible de persuader, contrôler ... acheter. Le mouvement se propage presque naturellement.

La manifestation représente des mouvements très différents.

La pluralité de la société a éclaté au grand jour. Si le pluralisme politique n'est pas une réalité dans la vie institutionnelle russe, elle l'est dans la Russie de tous les jours. C'est pourquoi les manifestants demandaient déjà le 10 décembre l'enregistrement de tous les partis politiques d'opposition. Mais ouvrir la porte aux partis ouvre la porte au Pouvoir. Car si pour l'instant le Kremlin peut filtrer l'accès aux médias et ne laisser passer que quelques clowns et ainsi décrédibiliser l'opposition aux yeux de la population, en institutionnalisant l'opposition dans les partis institués, le jeu politique va se corriger de lui-même. Le filtre est en train de tomber. Medvedev avait annoncé la simplification des procédures d'enregistrement pour 2013, ce qui avait provoqué la fureur des manifestants. Dès le jour de la manifestation du 24 décembre, Timakova, son porte-parole, a annoncé que la loi devrait être rapidement votée par le Parlement et dès sa signature par le Président elle pourra entrer en vigueur. Première victoire réelle du mouvement populaire.

La manifestation a du mal à se politiser.

Les revendications ne sont pas politicienne. Il ne s'agit pas de soutenir un parti en particulier. Quand Koudrine a tenté d'appuyer son idée de la création d'un nouveau parti libéral, il a été très loin de provoquer un engouement. Les gens ont des attentes beaucoup plus simples d'une part, et beaucoup plus profondes d'autre part. Faire partir Poutine. Rétablir de véritables élections - donc avec le départ de Tchourov qui incarne la faiblesse face au pouvoir. Et là aussi, une victoire: le Conseil auprès du Président pour les droits de l'homme et la société civile se fait l'échos des manifestants ... avec un retard significatif, comme s'il n'avait pas remarqué plus tôt les problèmes électoraux... Et des attentes plus profondes: les demandes sont systémiques. Les gens veulent simplement un pays dans lequel les institutions fonctionnent, indépendamment des personnalités. Tellement simple ... et le plus difficile à réaliser, tant d'intérêts sont entremêlés, même parmi les orateurs. Comme le rappelait - avec courage - ksénia Sobtchak qui, malgrè les sifflements constants, a rappelé qu'elle avait ici quelque chose à perdre, mais il fallait changer le mode de fonctionnement du pouvoir et ne pas agir contre le pouvoir.

La manifestation n'est pas révolutionnaire.

Si les observateurs remarquent en général une radicalisation du discours par rapport au 10 décembre, le plus radical fut Navalny. Son court séjour en prison (15 jours) a manifestement provoqué une vocation. Rappelons-nous la surprise qu'avait causé alors la particpation de Navalny en novembre à une manifestation nationaliste. Jusque là, à aucun moment, il n'avait laissé sous-entendre de sympathies particulières pour les mouvements ultranationalistes. La surprise avait été générale. Le 24 décembre, son entrée en scène a définitivement levé le voile sur un aspect de sa personnalité et l'a décrédibilisé: présenté par les nationalistes, appelé à diriger leur comité politique, Navalny prend la parole. Et c'est le seul a appeler à la révolution. A prendre le Kremlin et la Maison blanche (siège du Gouvernement russe), puisqu'ils sont assez nombreux pour le faire. Mais il ne fait pas recette et deux pas en arrière précise que ce n'est évidemment pas à l'ordre du jour pour l'instant, mais que cela le sera bientôt. L'année prochaine, il promet de rendre le pouvoir au peuple. Comment? Mieux vaut pour l'instant ne pas le savoir! 93 est encore trop frais dans toutes les têtes.

Bref, le mouvement se développe, notamment sous l'influence de l'incompétences des dirigeants. Poutine, dans son allocution télévisée a largement contribué à conduire les gens à la manifestation de samedi. Medvedev aussi avec ses discours auxquels plus personnes ne croient. Mais pour l'instant personne ne sait très bien quoi faire. Ni le pouvoir qui tente une nouvelle perestroïka et les programmes télévisés en deviennent écoeurant, cherchant même à "autoriser" une chaîne de télévision de la société pour libéraliser l'audiovisuel. Ce pouvoir qui tente de monter une deuxième opération Prokhorov - qui d'ailleurs ne s'est pas risqué à prendre la parole - et hésite encore avec un Koudrine qui est de toute manière trop marqué. Alors que les gens se demandent très justement pourquoi simplement ne pas libéraliser tout le système audiovisuel? Pourquoi ne pas laisser les simples citoyens choisir leurs représentants? Mais ce temps arrive. Comment il arrivera, pour l'instant c'est encore une inconnue. Car l'opposition politique non plus ne sait pas très bien comment agir. En tout cas une troisième victoire, même les partis d'opposition de la Douma, cette "opposition de poche", se sont rappelés qu'ils étaient d'opposition. Peut être le jeu du parlementarisme permettra de corriger en douceur le système.

jeudi 22 décembre 2011

Dernier message présidentiel de Medvedev au Parlement

Дмитрий Медведев предложил комплексную реформу политической системы


Dans son dernier message, Medvedev propose plusieurs mesures visant à la réforme du système politique russe, allant dans le sens de la décentralisation du pouvoir.

"J'entend ceux qui parlent de la nécessité du changement et je les comprend", a déclaré Medvedev dans son message au Parlement.

Parmi les mesures qu'il propose, le retour à l'élection directe des gouverneurs à travers le "filtre présidentiel", la simplification de la procédure de constitution des partis politiques, l'annulation de l'obligation de collecte de signature pour participer aux élections à la Douma, diminuer le nombre de signatures à 300 000 pour participer aux présidentielles ...

Il a toutefois insisté sur le fait que dans le pays aujourd'hui on provoque le mécontentement social. Mais le pouvoir russe ne se donnera pas aux provocateurs qui veulent entraîner les citoyens sur des chemins peu sûrs. Parallèlement, Medvedev a souligné que la société civile a pris de la force et de l'influence.

Pour le reste, le Président a insisté sur le fait que malgrè la dépression qui guette l'Europe et les USA, la politique de modernisation menée en Russie a permis au pays de ne pas sombrer dans la crise et de montrer des résultats mêmes meilleurs qu'en Europe ou aux USA.

Dans son message, Medvedev garde le discours habitel. Chez nous tout va bien, puisque tout va mal chez les autres. La société civile s'est développée, mais quand elle veut agir elle "cède aux provocateurs" et il n'est pas question de perdre le pouvoir. Bref, le message social a été entendu, mais pas compris. Voyons le 24 décembre comment se passera la nouvelle manifestation, autorisée et prévue pour 50 000 personnes.

mercredi 21 décembre 2011

Petit nettoyage post et pré électoral

ЦИК отменил результаты голосования на 21 избирательном участке


La Commission centrale électorale a annulé les résultats des élections législatives de la Douma dans 21 bureaux de votes, où participaient 39 000 personnes, en raison de l'importance des fraudes commises. Il a été annoncé que les responsables des opérations de vote dans ces bureaux ne travailleront plus pour la Commission électorale.

On notera, que en gros, la Commission électorale a reçu environ 1600 plaintes concernant les élections de décembre.

Toutefois, la plupart des recours ne sont pas fondés et la commission a vérifié 26 bandes vidéo sur internet montrant des fraudes. Elle n'en a retenu qu'une seule, mais là de toute manière le bourrage d'urne n'a pu être accompli. Selon la Commission électorale, une partie des vidéos ne sont que des montages.

Les manifestants de Bolotnoï plochad demandaient notamment l'annulation des résultats électoraux, le départ du président de la Commission électorale centrale et l'enquête sur toutes les fraudes signalées. Le Président Medvedev avait pour sa part annoncé que cette enquête aurait lieu.

Les résultats de la grande enquête menée par la Commission centrale électorale laissent rêveur ... Selon une estimation indépendante, Edinaya Rossiya aurait obtenu 30-35%, comme le parti communiste. Si cela est le cas, cela démontre une ampleur inédite dans le truquage électorale. Mais, seuls les résultats de 21 bureaux de vote dans toutes la Russie ont été annulés. Les bandes vidéos sont des faux et la seule véritable n'apporte rien. Désespérant!

mardi 20 décembre 2011

L'opposition veut sa place à la Douma

Voir: http://www.kommersant.ru/doc/1842680 et http://www.kommersant.ru/doc/1842222

La répartition des postes de direction à la Douma ne se passe pas aussi bien que Edinaya Rossiya l'aurait voulu. Les partis d'opposition veulent rentabiliser leurs résultats électoraux et récupérer des directions de comité, ce qui n'a rien d'inattendu en fait.

Si Edinaya Rossiya a cédé certains comités, beaucoup estiment qu'elle garde le contrôle des aspects les plus importants de la vie politique russe, comme la sécurité ou le budget, et laisse uniquement ce qui aura peu d'influence sur le processus législatif.

Pour l'instant, un accord a été trouvé sur le nombre de comités (29 et non 32 comme avant), dont 15 seront dirigés par Edinaya Rossiya, 6 par les communistes, 4 par LDPR et 4 par Spravedlivaya Rossiya.

Et dans ce combat, Narychkine devient une monnaie d'échange. En d'autres termes, les fractions voterons pour lui, si elles obtiennent ce qu'elles veulent en matière de direction de comités. Après la réunion d'aujourd'hui, le représentant Edinaya Rossiya affirme qu'un accord a été trouvé. Mais les autres partis ne confirment pas. Bien au contraire et vont présenter leurs propres candidatures au vote.

Les communistes revendiquent différents comités comme l'éducation ou l'agriculture. LDPR veut notamment le comité international. Quant à Spravedlivaya Rossiya, ils estiment avoir beaucoup de professionnels et n'avoir pratiquement rien reçu.

Cet échange d'armes est le premier test pour Edinaya Rossiya. Sauront-ils négocier? Pour l'instant, le résultat n'est pas concluant. Mais d'ici peu, les cartes seront posées et alors un premier bilan pourra être tiré: le pouvoir a-t-il réellement pris consience de la montée en puissance des voix d'opposition? Aura-t-il l'intelligence - ou l'instinct de survie - de renforcer l'opposition systémique pour affaiblir l'opposition non systémique, plus virulente et dangereuse pour lui?

lundi 19 décembre 2011

Présidentielles: la question n'est pas qui, mais comment!

Главный вопрос выборов-2012: не «кто» станет президентом, а «как» станет президентом этот «кто»?

Владимир КАРПОВ


La liste des candidats potentiels à l'élection présidentielle, aujourd'hui, comprend une dizaine de noms, des vétérans aux nouveaux venus:



  • Vladimir Poutine, Premier ministre


  • Grigoriï Iavlinsky, politicien


  • Vladimir Jirinovsky, politicien


  • Guenadiï Ziouganov, politicien


  • Viktor Tcherepkov, ex-maire de Vladivostok


  • Mikhail Prokhorov, oligarque


  • Sergueï Mironov, politicien


  • Dmitriï Mezentsev, gouverneur de l'Oblast de Irkoutsk


  • Rinat Khamiev, politicien de l'Oblast de Orenbourg


  • Svetlana Peounova, psychologue et politicienne.

Bref, des politiciens contre la politique. Il n'y a aucun sens à analyser leurs chances de réussite individuellement, au moins un tiers d'entre eux ne pourra réunir les signatures nécessaires. Mais ils représentent quelque chose dans l'opinion, un paysage ... ou une nature morte, selon la conception que l'on a de la politique russe actuelle.

N'étant pas romantique, il me semble que la question n'est pas de savoir lequel d'entre eux deviendra le nouveau Président de la Russie, mais comment il le deviendra. Car en fin de compte, seul un vote compte, Poutine.

Pourtant, personne n'a d'illusion, Poutine ne peut plus passer au premier tour. Le Kremlin ne peut plus utiliser en masse ses ressources administratives. Et c'est une différence par rapport aux autres élections précédentes. Et le bombardement médiatique n'est plus aussi efficace. Pour tout le monde, la situation est claire. Il y a Poutine ... et quelques personnes qui lui tiennent compagnie, puisqu'il ne peut pas se présenter seul.

Et la situation est difficile pour ses adversaire. Car maintenant il ne s'agit pas de se positionner contre Edinaya Rossiya, ce qui est plutôt bien vu. Mais il faut se positionner contre Vladimir Poutine et aucun politicien en course actuellement n'a le courage de prendre cette position radicale, qui pourtant est attendue des manifestants de Balotnaya Plochad.

Ziouganov est généralement reconnu comme étant celui qui a le plus de chance de gagner après Poutine, mais il est toujours cet éternel second, même si en réalité il avait gagné en 1996. Prokhorov s'est tout de suite positionné: cette élection est pour lui l'occasion de donner le départ à sa carrière politique. Donc il n'envisage pas un vrai combat.

En fait, il y a beaucoup de candidats, beaucoup de figuratifs, peu de surprises et aucun opposant à Vladimir Poutine. Une compagnie sympathique. Qui se connait. Qui se comprend. Chacun sait où est sa place. Pourtant il reste quelques inconnues.

La première: quel sera le jeu de Prokhorov? C'est un joueur ... qui aime gagner. Il l'a déjà démontré en quittant Pravoe delo. Mais il n'a pas l'âme d'un opposant. Ce qu'il a déjà déclaré aussi. Il y a donc peu de chances qu'il puisse récupérer - et canaliser - le mouvement de protestation montant.

La seconde: pour être légitime, le pouvoir du clan en place personnalisé par Vladimir Poutine a besoin d'élections plus ou moins propres ... au moins pas trop falsifiées. Auront-ils le courage de mettre Poutine au deuxième tour? Beaucoup va dépendre de l'évolution des mouvements populaires. S'ils arrivent à ne pas se faire récupérer par les arrivistes qui veulent enfin arriver en surfant sur la vague de protestation, ils pourront influer la politique en étant eux-mêmes non politisés. S'ils défendent le système, ils bloqueront Poutine. Puisque sa seule présence au sein des instances constitutionnelles de direction du pays est une déformation du système politique russe.

L'enjeu est pourtant clair: perdre le monopole politique pour ne pas tout perdre. L'instinct de survie va peut être jouer. Espérons-le. Poutine au deuxième tour, sans Medvedev au Gouvernement, serait le meilleur moyen de sortir en douceur de l'impasse politique dans laquelle le pouvoir actuel s'est enfermé.

vendredi 16 décembre 2011

Poutine / Prokhorov: une journée politique pas très ordinaire

Il est des jours comme ça où la vie politique s'emballe, s'éclaircie ... et pourtant rien ne change. Hier fut une de ces journées. Interview marathon de V. Poutine, intervenant parfois en Premier ministre, parfois en candidat aux présidentielles. Entrée officielle de M. Prokhorov dans la course présidentielle, dont l'indépendance fait un peu grincer les dents ... mais manifestement pas au pouvoir. Et l'absence remarquable de Medvedev qui ne semble plus faire partie du tandem.

Poutine a été certes bien préparé sur la question, au combien brûlante, des manifestations. Mais s'il a réagi pondéremment dans sa première phrase préparée en louant l'activisme de la jeunesse actuelle, très vite il a dérapé. A peine sous-entendant que les étudiants étaient payés, il fallait donc bien qu'ils fassent ce pour quoi on les avait payé. Oubliant manifestement que dans le mouvement se trouvaient presque tous les représentants de la classe moyenne, les petits entrepreneurs qui en peuvent développer leur affaire à cause de la bureaucratie corrompue et des prêts impossibles à obtenir, les médecins qui voient s'effondrer le système de la médecine publique en raison d'une mauvaise gestion, d'une dégradation du professionnalisme, des files d'attente impossibles à résorber par manque de moyens, des jeunes qui s'inquiètent pour leur avenir ... Ce mouvement dirigé contre le pouvoir, n'est pas qu'un mouvement politique financé par l'Oncle Sam, comme l'affirme le Premier ministre, mais un mouvement populaire qui ne veut plus vivre comme ça plus longtemps, qui est fatigué d'attendre, fatigué de vaines promesses que personne ne se donne la peine de réellement mettre en oeuvre.

Et dans l'absence politique créée par ce mouvement, tous les chefs de file de l'opposition non systémique veulent récupérer un mouvement que, heureusement pour l'instant, ils ne maîtrisent pas. Ils veulent récupérer cette vague populaire pour enfin atteindre la popularité qu'ils n'ont pas.

Sur cet entre-fait, arrive à point nommé ... Prokhorov. Libéral, oligarque, développant un discours socialisant qui ne convaint pas encore. Très proche du pouvoir, comme tous les oligarques, c'est quand même une condition fondamentale de leur existence. Tout auréolé de son échec à Pravoe delo, qu'il a pu monté en opposition au pouvoir et en marque d'indépendance.

Et là, la conférence de presse de Poutine est éclairante: il a le soutien du pouvoir. Si Poutine, avec son humour très particulier, n'est pas allé jusqu'à lui souhaiter le succès, il a déclaré que ce sera un adversaire de qualité. Donc Prokhorov est "autorisé" à participé à la farce électorale du printemps. Mieux, il est même pressenti pour récupérer cette montée populaire.

Toutefois, le candidat Prokhorov, tout neuf en politique, ce qui le sauve, est certainement un excellent homme d'affaire, mais n'a pas encore la carrure d'un politicien ... ni d'un orateur. Ce n'est pas grave pour participer à des élections en Russie ... mais ce n'est pas suffisant pour réellement récupérer le mouvement populaire, qui se retrouve beaucoup plus dans des personnes comme Navalny - baptisé du sceau de la réelle opposition avec ses 15 jours d'arrestation "administrative" - ou Iachine.

Et les positions de Poutine et de Prokhorov ne sont pas si éloignées l'une de l'autre sur certains aspects de la vie politique qui intéressent une partie de la société, la différence n'est qu'une question de degré.

Sur la question de la libération de Khodorkovsky, Prokhorov rappelle que les décisions de justice, quelles qu'elles soient, doivent être appliquées. Poutine affirmait que la place des voleurs était en prison. Prokhorov affirme que la libération anticipée de Khodorkovsky est fondée en droit et qu'il pourrait le gracier. Poutine estime que si Khodorkovsky en fait la demande, il peut l'examiner.

Sur la question de l'élection des gouverneurs, Poutine s'est un peu emmêlé les pinceaux dans un schéma compliqué qui mèle élections directes locales, mais avec un "filtre présidentiel" qui proposerait les candidatures afin que les gentils électeurs puissent "choisir". De même pour les membres du Conseil de la Fédération - la Chambre haute du Parlement - qui pourraient être élus après un "filtre présidentiel". Il faut en effet faire attention à la montée du séparatisme, de l'extrémisme, du banditisme et autres réjouissances dans les régions .... Prokhorov se prononce également en faveur des élections directes, sans toutefois parler de filtre présidentiel.

Et Medvedev dans tout ça? Où est Medvedev? Pas une seule fois, Poutine ne l'a mentionné. Que se passe-t-il dans notre tandem? Alors, heureusement, depuis le sommet UE-Russie, une journaliste lui a demandé de se prononcer sur la position de V. Poutine quant à l'élection des gouverneurs. Et il a enfin pu rappeler qu'il était encore là et qu'il participait activement à la préparation de l'avenir de la Russie, d'autant plus que les mots prononcés par Poutine ... résultaient d'une conversation qu'ils avaient eu tous les deux quelques jours avant. Bref, il n'est pas encore parti ... pas tout à fait.

En fait rien n'a changé après cette mémorable journée politique d'hier, qui a monopolisé l'écran de télévision presque toute la journée. On sait que Poutine, malgrè le masque compréhensif, ne supporte pas ces manifestants qui remettent en cause sa sacrosainte autorité. Mais on le savait avant. On sait que Prokhorov a le soutien du pouvoir. Mais on s'en doutait avant. On sait que Medvedev est vraiment sortant. Et on ne sait toujous pas jusqu'à quel point.

jeudi 15 décembre 2011

B. Gryzlov quitte la Douma: Edinaya Rossiya doit donner l'illusion d'un changement

Борис Грызлов больше не будет спикером Государственной думы


Après huit années à la tête de la Douma, Boris Gryzlov renonce à ce poste et refuse son mandat de député. Qui le remplacera? Pour l'instant la situation n'est pas claire, les candidats ne se pressent pas.

Le 14 décembre, B. Gryzlov a déclaré qu'après deux mandats consécutifs à la tête de la Douma il quittait ce poste et ne prenait pas son mandat de député, mais restait dans l'appareil de direction d'Edinaya Rossiya.

Les candidats pour le remplacer ne sont pas nombreux, certaines sources à la Douma ou à l'Administration présidentielle avancent les noms de Alexandre Joukov ou de Sergueï Narychkine. Mais rien n'est encore confirmé.

La question est d'autant plus sensible que si Gryzlov a pu diriger une Douma où Edinaya Rossiya avait la majorité constitutionnelle, donc dans une période de tranquilité politique totale, la nouvelle configuration politique, qui ne donne que la majorité simple à Edinaya Rossiya, va obliger le nouveau président à négocier avec l'opposition.

Les manifestations post-électorales n'y sont pas non plus rien. Le pouvoir doit donner l'image d'un changement, d'une prise en considération des revendications populaires. Or, la seule idée qui ait été accolée à Gryzlov en huit année, est celle que le Parlement n'est pas un lieu de discussion. Cette position doit être radicalement modifiée pour calmer le bon peuple.

Pour l'instant, le pouvoir ne sait pas encore comment concrètement réagir, qui nommer. D'autant plus que tous les postes avaient depuis longtemps été répartis, bien avant les élections, et les derniers évènement obligent à une nouvelle répartition des cartes.

mercredi 14 décembre 2011

L'après-élections: l'enjeu de la répartition des comités à la Douma

Voir: http://www.specletter.com/politika/2011-12-13/oppozitsija-popala-v-peredelku.html

Si le LDPR a tout de suite après les élections annoncé sa satisfaction des résultats, le Parti communiste et Spravedlivaya Rossiya ont déclaré les élections illégitimes, se sont indignés contre les violations massives à la législation, les votes truqués etc. Lors de sa rencontre avec les représentants des partis représentés à la Douma, le Président Medvedev a promis que tous les recours portés contre les élections seraient analysés, toutes les preuves des manipulations examinées.

Tout le monde a été content et personne ne bouge. D’où pas de réaction brusque de la part de cette opposition institutionnalisée, à la différence de la rue qui elle n’a rien à perdre.

Mais qu’ont-ils à perdre justement, ces bons représentants du peuple ? Des places stratégiques.

Commence dès à présent le marchandage de la répartition des directions de comités et autres places importantes qui permettent d’avoir une influence sur le cours politique décidé au Kremlin ... et qui permet surtout d’obtenir certains avantages en nature, notamment un joli bureau spacieux et clair pour éviter d’être enfermé dans 5m2 avec deux assistants. L’enjeu est certes de taille.

Le budget restera à coup sûr dans les mains du parti Edinaya Rossiya, trop dangereux d’offrir un tel moyen de contrôle à l’opposition, si docile soit-elle. Mais le combat est rude autour des comités pour la défense, les affaires étrangères et la construction. En ce qui concerne la défense et la construction, les communistes arguent de l’échec de la politique d’edinaya Rossiya en ces domaines pour reprendre la main. Il serait toutefois très surprenant que le pouvoir les abandonnent, ils sont particulièrement lucratifs. Les communistes veulent également garder le contrôle du comité pour l’enseignement, qu’ils contrôlent presque de manière traditionnelle.

Il est encore difficile de dire ce qu’il en ressortira. En principe Edinaya Rossiya a la majorité et peut donc de force prendre le contrôle des comités qu’elle désire, désigner comme elle veut les vices-président et nommer aux différentes fonctions. Mais le mécontentement qui monte lui fait passer un nouveau message : il est urgent d’apprendre le compromis, la discussion et le pouvoir n’a plus la légitimité de diriger par diktat. Bref, partager pour ne pas tout perdre.

Edinaya Rossiya saura-t-elle comprendre ce message ? Bientôt la réponse. Les députés préviennent que si la réponse n’est pas satisfaisante pour les gens dans l’hémicycle, la discussion se prolongera dans la rue. Ce qui n’est pas bon pour l’Etat.

mardi 13 décembre 2011

Une nouvelle opération Prokhorov?




Les manifestations de samedi dans de nombreuses villes de Russie, le mécontentement ouvertement affiché de la population envers le pouvoir, l'absence d'un leader qui pourrait canaliser et faire "fructifier" ce mouvement populaire est en train de produire ses premiers effets.

Pour le pouvoir, un moment d'angoisse: comment canaliser ce mécontentement et l'utiliser? Pour les politiques: comment rentabiliser ce mouvement de foule et profiter de ce moment unique pour mettre en place un mouvement politique de la classe moyenne?

En d'autres termes: Prokhorov contre Koudrine? Prokhorov contre Poutine? Poutine contre Prokhorov et Koudrine?

Une inconnue: en dehors des schémas montés par ces particpants, la population arrivera-t-elle à garder le contrôle de son mouvement et à le transformer en une force d'action positive? Ou bien le mouvement sera-t-il récupéré par les joueurs traditionnels de l'échiquier politique - et peu importe lequel alors ?

Comme le remarquent les analystes, en ce qui concerne Prokhorov, bientôt les choses seront claires. Rappelons qu'aucun candidat non-kremlin n'a jamais pu enregistrer sa candidature aux présidentielles, soit pour des raisons techniques, soit parce qu'il n'a pu réunir les 2 millions de signatures nécessaires.

Hier, lors de sa conférence de presse, M. Prokhorov a annoncé sa volonté de participer aux présidentielles. Ces derniers mois, son staff aurait réussi à réunir les signatures demandées. Ils seraient en mesure de déposer sa demande officielle mercredi ou jeudi auprès de la Commission centrale électorale. Mais il ne donne aucune autre information concernant la composition de son staff électoral, de la liste de ses membres, de son programme ...

Pour les analystes, la situation sera alors claire: si sa candidature est enregistrée, il bénéficie du soutien du Kremlin, bien que niant avoir eu toute discussion avec Poutine ou Medvedev; si sa candidature n'est pas enregistrée, il agit réellement de manière indépendante et aura au moins eu la possibilité de laver son image après l'échec de sa direction du parti Pravoe delo.

En tant qu'indépendant, il a peu de chances. Toutefois, la situation politique se complique après les manifestations. Quelqu'un doit prendre en charge le mécontentement et répondre aux attentes politiques d'une population de plus en plus déçue par les partis institués. D'où l'idée de Koudrine d'une nouveau parti de droite. D'où l'annonce de Prokhorov. Même s'il est enregistré, il ne sera d'aucun danger pour Poutine, mais permettra de redonner de l'oxygène dans une vie politique au bord de la fossilisation.

S'il est officieusement lancé par le Kremlin, qui évidemment jamais ne le reconnaîtra, l'enregistrement de sa candidature ne posera pas de problèmes. Il apparaît même alors, dans le jeu intérieur, comme une alternative à l'échec de l'opération "Medvedev - grand libéral - aimé du bon peuple". En ce qui concerne le libéralisme, il n'est visible que pour une catégorie très précise de la société, quant à l'amour populaire, il suffit d'aller sur sa page Facebook et de lire les commentaires pour en avoir froid dans le dos. Comment le dirigeant d'un pays peut-il s'abaisser à ce point là?

Et là, Prokhorov devient une alternative libérale neuve. Un premier ministrable à la place d'un Medvedev en échec.

La question, qui n'a rien à voir avec les élections, reste pourtant de savoir si le Pouvoir a plus à perdre avec le maintien de Medvedev ou avec son départ.

Et la question qui a tout à voir avec les élections est de savoir si la population acceptera de se faire si facilement manipuler? Les dernières évolutions laissent perplexes ... et plein d'espoirs!

lundi 12 décembre 2011

La société civile s'organise pour défendre le droit des citoyens à manifester

Voir: http://vprave.org/index.php/Novosti/Novosti-o-pravah/Vybory-2011-sozdan-shtab-pravovoy-pomoschi.html

Si la manfestation de samedi s'est passée dans le calme à Moscou, ce ne fut pas le cas des manifestations précédentes, où près d'un millier de personnes ont été arrêtées en Russie depuis la fin des opérations électorales.

En réaction - et en prévention - plusieurs associations ont décidés de mettre en place une plateforme commune permettant d'expliquer aux gens la réalité de leur droit à manifester, droit constitutionnel et fondamental de tout être humain. Il s'agit du Fond "Obchestvenny verdict", du centre de défense des droits "Memorial", de la branche moscovite du groupe Helsinsky, de l'association "Agora", du comité contre la torture, du centre de coopération de défense internationale et de juristes et avocats particuliers.

En dehors d'une activité de prévention, cette structure est prête à apporter son aide en cas d'arrestation illégale, de mauvais traitements au cours de la rétention et autres faits habituels dans ce type de cas.

La société civile semble déterminée à ne pas conclure le mouvement de protestation avec la manifestation spectaculaire de samedi. On rappellera qu'une autre manifestation est prévue pour le 24 décembre. Pour l'instant, le pouvoir ne sait pas comment réagir et "fait le dos rond", attendant que la situation se calme d'elle-même. Dans la perspective des présidentielles de mars, où les gens ne voient pas avec le sourire au coeur le retour de Poutine pour 12 ans, cette structure risque en effet de ne pas manquer de travail. Espérons toutefois que la société civile arrivera aussi à formuler un projet politique positif pour la société.

Le retour de Koudrine: un nouveau leader pour l'opposition russe?

Алексей Кудрин думает заняться партией правого толка


Selon A. Koudrine, l'émergence d'un réel projet de droite doit être le principal résultat des élections législatives du 4 décembre. Et dans l'interview qu'il a donné à Vedomosti, il est prêt à participer à la création de ce nouveau projet politique de droite.

Au début de l'année, le pouvoir lui avait proposé de prendre la direction du parti Pravoe delo. Mais Koudrine avait refusé en raison de la dépendance trop forte de ce projet avec le Kremlin.

Il n'explique pas pour l'instant comment fonder un parti en s'appuyant sur le mécontentement populaire issu des dernières élections. En revanche, il fait comprendre que sa ressource principale est la consolidation des forces libérales et démocratiques du pays et affirme avoir déjà contacté à ce sujet l'ancien leader de Pravoe delo, M. Prokhorov. Mais celui-ci ne confirme pas, son entourage précisant seulement que Prokhorov n'a pas encore décidé de collaborer avec Koudrine.

Selon les sources du Kremlin, il ne s'agirait que d'un projet personnel de Koudrine. Mais Koudrine reste un homme du système avec une grande expérience des affaires d'Etat. Dans le nouveau paysage politique, Poutine pourrait avoir, à travers Koudrine, une opposition loyale, mais pas de poche. D'un autre côté, pour l'instant le pouvoir ne sait pas comment réagir avec la montée des protestations, dont l'ampleur l'a pris de court.

Selon l'ancien leader du SPS, l'actuel gouverneur N. Belykh, le système politique aujourd'hui peut évoluer de manière aussi rapide qu'imprévisible. Et Koudrine est l'un des rares hommes politiques russes actuels à pouvoir regrouper les forces politiques libérales, en construisant une plateforme constructive qui s'appuie sur l'énergie des masses.

Toutefois, selon le politologue M. Vinogradov, le mouvement de protestation actuel est plus profond qu'une simple remise en cause des élections, c'est un mouvement anti-Poutine. Et il y a peu de chances que la masse adopte Koudrine comme figure de remplacement.

Les projets de droite ont toujours été un échec. L'opposition n'a pas de leader charismatique sérieux qui puisse fédérer les masses et porter un projet électoral. Le personnalité de Koudrine a le double intérêt de la compétence et de l'expérience. Ce pourrait être un premier pas fort pour normaliser la vie politique. Mais obtiendra-t-il le soutien populaire nécessaire à son indépendance du Kremlin?

vendredi 9 décembre 2011

Le pouvoir prêt à la discussion ... l'opposition se méfie

Власть готова переговорить с оппозицией
Оппозиция не верит в то, что разговор будет полноценным


Le pouvoir doit entrer en dialogue avec l'opposition. Cette position est partagée par les deux hommes forts du système, Poutine et Medvedev. Mais l'opposition a des doutes sur la sincérité de cette déclaration, estimant que le dialogue doit conduire à une réforme en profondeur du système politique, ce à quoi le pouvoir n'est pas prêt aujourd'hui.

Les élections parlementaires, dont les résultats sont contestés par l'opposition, a changé en profondeur l'attitude du tandem envers des forces politiques d'opposition. Si avant, il ne les invitait qu'à une critique constructive, une participation au cours politique choisi par Edinaya Rossiya, maintenant le discours change et ne s'adresse plus qu'aux partis représentés à la Douma, cette opposition hier encore léthargique.

Hier, Poutine, en s'adressant aux représentants du Front populaire déclarait: "Nous devons entrer dans le dialogue avec ceux qui s'opposent, leur donner la possibilité de s'exprimer, en utilisant leur droit constitutionnel à manifester et à exprimer leur position.". Quant à Medvedev, depuis la République thèque, soulignait que "à l'évidence, notre société devient plus concurrentielle et une seule force n'est plus à même de prétendre à la gouvernance".

Ces déclarations ont toutefois provoqués une certaine hésitation de la part de l'opposition. Plusieurs d'entre eux, notamment Prokhorov, demandent la tenue de nouvelles élections parlementaires. La quasi-unanimité veut que la Commission électorale procède à un nouveau décompte des voix. Et tous estiment incontournable une refonte du système politique.

Le président de la Commission centrale électorale a dit avoir envoyé au Comité d'enquête les vidéos montrant les falsifications pendant le déroulement des opérations électorales, pour qu'il procède à la vérification de leur authenticité.

Il est vrai que, en remettant les déclarations du tandem dans leur contexte, on sent une certaine hésitation de leur part quant à la marche à suivre. Si Poutine a effectivement rappelé les droits constitutionnels des opposants, il a également souligné que des millions de dollars étaient envoyés aujourd'hui à certains leaders des mouvements d'opposition pour justement provoquer ces mouvements populaires. On en revient toujours à ce grand ennemi qui vient de l'étranger et qui veut détruire la Russie. Mais parallèlement, il semble aussi y avoir un début de prise de conscience que le pacte "la liberté contre le pain" n'est plus adapté à la société russe actuelle, qui semble vouloir définitivement sortir du féodalisme politique post-soviétique. Sortir de cette période de transition où elle se dégrade pour se construire en tant que société russe - et non plus post-soviétique. Espérons que les représentants du pouvoir et les représentants de la société comprendront les enjeux pour construire ensemble un espace où chacun pourra avoir sa place.


jeudi 8 décembre 2011

2m2 par détenu: la Cour constitutionnelle hésite à défendre la dignité humaine

Voir: http://sutyajnik.ru/news/2011/12/1898.html

Une des curiosités du droit russe est le concept de "détention administrative". Il s'agit bien d'une détention, dans le sens habituel du terme, donc d'une privation de liberté, mais une détention qui aurait non pas un caractère pénal, comme cela est normalement le cas, mais un caractère administratif. Pourquoi? Parce qu'elle intervient après la commission d'une infraction administrative par un citoyen. Le critère n'est pas alors celui de la privation de la liberté, mais de la nature de l'infraction commise. Ce non-sens permet surtout de priver de liberté des individus, non pour quelques heures, mais pour des semaines, voir en réalité des mois, sans pleinement garantir leurs droits processuels.

Pour les personnes placées en détention "administrative", une disposition spéciale est prévue par un règlement du Gouvernement n° 627 du 15 octobre 2003, dont le point 11 prévoit une surface légale de 2m2 par détenu. Dans ces conditions, la vie en cellule est en soi une atteinte à la dignité humaine, le détenu ne perdant pas sa nature humaine du simple fait de sa privation de liberté! Les agressions, les maladies et les décès sont alors une des conséquences désastreuses de cette disposition.

Pourtant la justice ne semble pas pressée de normaliser la situation. Quand Mme Bougrova s'adresse à différentes instances pour contester la validité de cette disposition qui a causé la mort de son mari en détention "administrative", la Cour suprême russe rejette le recours au motif cynique que seul l'intéressé est en droit de contester la validité d'un acte normatif. Cette incurie va-t-elle se répéter devant la Cour constitutionnelle, qui depuis plusieurs mois hésite à se prononcer?

Or, s'il est possible de comprendre que les prisons sont surchargées, que matériellement il est difficile d'organiser des conditions de vie normales pour les détenus, il est inacceptable de consolider dans un acte normatif une atteinte aux droits de la personne en tout impunité.

Cela contrevient aux principes européens et la Russie est membre du Conseil de l'Europe. Cela contrevient aux valeurs constitutionnelles. Et la Cour constitutionnelle doit les défendre. Cela contrevient à la moral. Et tout Etat trouve sa raison d'être dans la garantie des valeurs morales dévant organiser la société dont il a la charge.

Et la Russie ne peut être une exception.

mercredi 7 décembre 2011

Les manifestations continuent ... les arrestations aussi!

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/12/06_a_3861454.shtml
http://www.specletter.com/vybory-20112012/2011-12-07/ecshe-ne-maidan-no.html
http://www.specletter.com/news/2011-12-07/40780.html
http://www.kommersant.ru/doc/1832878?stamp=634588520786355766

Hier soir sur Triumfalnaya Plochad à Moscou - une place centrale où se déroule habituellement les manifestations non autorisées de l'opposition - face à la manifestation organisée par Nachi et Molodaya Guardia Edinaya Rossiya, se sont regroupées près de 1500 personnes pour protester contre les falsifications des résultats des élections législatives de dimanche. 569 personnes ont été arrêtées.

Alors que les jeunes activistes pro-kremlin manifestaient avec des ours en peluche et des tambours pour célébrer la victoire d'Edinaya Rossiya aux élections parlementaires de dimanche, des opposants, dont Nemtsov, se sont regroupés au cri de "Russie sans Poutine!" et "Honte!". A peine la manifestation commencée, les arrestations ont débutés, avec une surprenante violence. Les gens ont été chargés de force dans les fourgons, des journalistes aussi, certains ont été battus dans le fourgon par des policiers qui les maintenant de force sur le sol, sautaient à pieds joints dessus. Après avoir été libéré par d'autres policiers, le journaliste de Kommersant, par exemple, a été prévenu qu'il ne saurait pas le nom du policier qui l'a ainsi agressé et qu'il devrait plutôt dire merci d'avoir été libéré.

Même des députés, de Iabloko ou de Spravedlivaya Rossiya se sont retrouvés dans le fourgon, en compagnie d'opposants "durs" comme Limonov ou Nemtsov. Leur carte de députés ne les ont pas aidés.

Quand des journaliste se sont approchés des jeunes adolescentes Nachi qui tenaient les tambours en leur demandant si elles considéraient les élections "propres", elles regardaient ailleurs pour ne pas répondre. L'une d'entre elles s'est mise à crier hystériquement "Ne me touchez pas! Ne me touchez pas!".

Les forces de l'ordre se positionnaient entre les deux groupes de manifestants. Quand un journaliste a voulu passé le cordon vers les opposants, étrangement un policier l'a laissé passer. Quelques minutes plus tard il se fait bousculer par les forces de l'ordre en arrière, qui lui disent "Maintenant tu vas en prendre!".

Les policiers voulaient renvoyer les gens vers le métro. Ne se tenant plus, l'un d'entre eux a hurler dans le porte voix "Je me moque de qui est au pouvoir! Nachi ou les fachistes! Vous devez partir!".

Même Medvedev sur Twitter a critiqué le comportement de l'opposition en utilisant le mat, qui une langage ordurier venant des prisonniers. Ce n'est pas vraiment digne d'un chef d'Etat.

Si certains ont peur d'un retour vers 91, la population en est encore loin. Mais il y a une raz-le-bol général. Et une certaine hésitation sur la marche à suivre. L'honnêteté des élections est remise en cause par une grande partie de la population. La cote de confiance de Edinaya Rossiya est en chute. Mais le paysage politique a été efficacement désorganisé et la relève n'est pas encore prête. Pour l'instant les gens ont encore quelque chose à perdre et ne semblent pas prêt à jouer le tout pour le tout.

Toutefois, quand les urnes ne permettent plus d'exprimer la volonté populaire, elle s'exprime dans la rue. La museler n'est aujourd'hui plus possible. Soit les politiques vont le comprendre et pourront intégrer cette volonté dans les mécanismes constitutionnels prévus à cet effet, la rendant alors constructive, soit ils voudront la contenir en dehors du système, la rendant agressive et dangereuse pour le système. L'avenir le dira.

mardi 6 décembre 2011

Amnesty international demande la libération des manifestants arrêtés le jour des élections

Amnesty International призвала российские власти освободить задержанных в ходе самого масштабного митинга против итогов выборов


Amnesty International demande aux pouvoirs russes de libérer les manifestants arrêtés lors des manifestations pacifiques contre les violations des droits électoraux, qui ont eu lieu le jour des élections parlementaires de dimanche. Simplement à Moscou, près de 300 personnes ont été arrêtées par les forces de l'ordre, dont le politicien d'opposition I. Iachine, le blogger A. Navalny et le rédacteur en chef de The New Times I. Barabanov.

Selon la directrice de Amnesty international Europe et Asie centrale, ces arrestations honteuses démontrent l'incapacité du gouvernement russe à respecter le droit de ses citoyens à exprimer librement ses opinions et à se réunir.

Les représentants d'Amnesty International ont vu de quelle manière la police a procédé à l'arrestation de personnes qui manifestaient, sans aucune provocation de leur part. Même des personnes qui ne participaient pas aux manifestations ont été interpellées et conduites au poste de police ... au cas où.

On rappellera que lors des manifestations à Moscou, on a compté près de 8000 personnes. Lors de la manifestation autorisée à Tchistie Prudie - dans le centre de Moscou - le nombre de manifestants augmentait avec une telle rapidité après 20 minutes, que la police a été obligée d'élargir la zone autorisée. Ce fut une des manifestations les plus importantes à Moscou ces dernières années.

Quand le défilé est passé devant le bâtiment de la Commission centrale électorale, sont sortis des slogans comme "La Russie sans Poutine! Honte! Constitution! C'est notre ville!". Les arrestations ont alors rapidement commencés.

Selon les forces de l'ordre, à la fin du temps prévu de manifestation, ils ont prévenu que maintenant les gens devaient se disperser, car la poursuite des manifestations n'était pas autorisée. Or, certains manifestants ont réagis de manière agressive et ont commencés à s'en prendre aux voitures. Ils ont été obligés de les arrêter.

Par ailleurs, V. Surkov, le premier vice-directeur de l'Administration présidentielle, considère l'estimation des violations de la législation électorale surévaluée. Quant au Président Medvedev, il doute sérieusement des vidéos mises sur Youtube montrant en image les bourrages d'urnes et autres falsifications.

L'arrestation des manifestants est un sport national en Russie. La peur panique du pouvoir envers les mouvements de masse est irrationnelle, mais elle démontre surtout son incapacité à entrer dans n'importe quelle forme de dialogue avec la société et à gérer les conflits. Sa baisse de popularité risque de provoquer encore un raidissement et de renforcer les rapports conflictuels, si le pouvoir ne sait entrer dans le dialogue.

lundi 5 décembre 2011

La victoire relative d'Edinaya Rossiya

Ce dimanche se sont tenues les élections législatives en Russie, où la victoire du parti Edinaya Rossiya était attendue, mais la question était de savoir s'il pourrait obtenir la majorité qualifiée lui permettant, comme précédemment, de mener les réformes sans avoir besoin du soutien des autres partis représentés à la Douma.

Or, selon les premiers résultats, Edinaya Rossiya obtient autour de 49% des voix, contre 64,3% en 2007. Ces résultats vont obliger le parti à former des coalitions autour de certains de ses projets pour faire passer les textes. Ce à quoi ses membres ne sont pas habitués. L'opposition parlementaire va avoir la possibilité de démontrer sa volonté - ou non - de corriger le cours politique proposé par la majorité. Ils auront, en effet, soit la possibilité de continuer, comme par le passé, à soutenir sans mots dire les projets de loi du pouvoir, soit la possibilité et les moyens de s'autonomiser du pouvoir. La Douma va enfin pouvoir devenir un lieu de débat et de décision.

Autrement dit, ces élections donnent une chance unique au pays et aux partis politiques. Celle de développer enfin le parlementarisme. Celle de développer la vie politique. Celle d'avoir une opposition intégrée et constructive. Beaucoup va dépendre des représentants de l'opposition. Plus que de la volonté d'Edinaya Rossiya, qui elle n'a pas le choix. Mais vont-ils relever le défit?

Cette situation est d'autant plus favorable aux autres partis de la Douma qu'ils ont obtenus des résultats très appréciables. Le Parti communiste reste le deuxième parti de l'Assemblée et renforce sa position avec plus de 20% des voix contre 11,57% en 2007. De même, Spravedlivaya Rossiya fait un score étonnant. Il y a peu de temps de cela, les sondages d'opinion l'estimait autour de 6%, ce qui ne lui permettait pas d'être présent à la Douma. Juste avant les élections, il était donné à 8%. Hier, il a obtenu environ 13% des voix. Le parti de Jirinovsky, LDPR, obtient aussi un excellent résultat avec plus de 14% des voix contre 8,14% en 2007.

Les partis politiques ont désormais les moyens et la légitimité de mettre en place un véritable jeu politique pour que la politique du pays puisse représenter et répondre à toutes les attentes de la population.

La question sociale suite à la crise économique a certainement favorisé le vote de "gauche" (parti communiste et Spravedlivaya Rossiya), mais elle a également renforcé la tendance nationaliste que l'on voit avec l'augmentation des résultats du LDPR. La manière dont Edinaya Rossiya a mené la politique de gestion de crise, qui a permis de limiter les effets nocifs, mais de redonner de l'espoir dans une réelle sortie de crise explique aussi en partie la baisse de ses résultats. La lassitude de la population et le besoin normal et naturel de changement.

Les réflexes de pouvoir vont devoir s'adapter à cette nouvelle donne. Et répétons le, la Russie a une chance incroyable de pouvoir faire évoluer pacifiquement son régime politique vers une normalisation de la vie politique et une plus grande démocratisation. Espèrons que cette chance sera saisie!

vendredi 2 décembre 2011

Russie: la corruption se porte toujours aussi bien, Merci!

Коррупция в России остается очень высокой - страна заняла 143-е место в новом рейтинге Transparency


Si la position de la Russie s'est légèrement améliorée dans le classement de la corruption dans le monde établi par l'Agence Transparency international, elle occupe quand même la 143e place (l'année dernière elle occupait la 154e place) sur 182, ) à côté de l'Ouganda ou du Nigéria.

L'agence établit le niveau de corruption dans les organes étatiques par une notation allant de 0 (haut niveau de corruption) à 10 (quand la corruption est pratiquement inexistante). Il faut noter que, lorsque le niveau de corruption est inférieur à 3, cela signifie que le pays se trouve dans une zone de corruption élevée. Cette année, deux tiers des pays ont une notation inférieure à 5.

Le niveau de corruption en Russie est apprécié à 2,4 contre 2,1 l'année dernière. A ses côtés se trouvent l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, les Comores, la Mauritanie, le Timor oriental et le Togo. En ce qui concerne les pays de la CEI, leurs indicateurs de corruption sont un peu meilleur que ceux de la Russie. La Moldovie est à 2,9, le Kazakhstan à 2,7, l'Arménie à 2,6. En revanche, l'Ukraine et le Tadjikistan sont à 2,3. Le Turkménistant et l'Ouzbékistan se partagent la 177e place avec 1,6.

Les 5 pays où la corruption est la plus faible sont la Nouvelle Zélande (9,5), le Dannemark (9,4), la Finlande (9,4), la Suède (9,3) et Singapour (9,2). Les 2 pays les plus corrompus sont la Somalie et la Corée du Nord avec 1.

Si la politique menée par le pouvoir russe a permis au pays de gagner une dizaine de place dans le classement mondial, ils ne peuvent être encore considérés comme suffisant. La lutte contre la corruption doit réellement être renforcée. Cette position de principe se retrouve dans tous les discours politiques, pourtant tant que l'économie et le politique seront à ce point entremêlés, aucune politique réelle en la matère ne pourra être efficace puisqu'elle se confrontera toujours à terme à des intérêts concrets qu'il sera alors impératif de défendre.

jeudi 1 décembre 2011

Quand l'appareil d'Etat s'attaque à l'association Golos ... pour discrètement permettre les falsifications électorales

Продолжается давление на ассоциацию «ГОЛОС»: вслед за журналистами НТВ на нее ополчились депутаты




Des représentants de trois partis - Edinaya Rossiya, Spravedlivaya Rossiya et le parti communiste - ont envoyé une demande de vérification à la Procuratura concernant l'activité de l'association de défense des droits électoraux Golos (Голос), qui réalise actuellement un monitoring des infractions commises lors de la période pré-électorale et du processus lui-même. Ces députés ont demandé à la Procuratura d'examiner la possibilité d'interrompre l'activité de l'association.


Sur sa page Facebook, le politicien Stanislav Iakovlev explique ce recours "collectif" par le fait que chaque parti politique a en son sein au moins un homme de Surkov (l'idéologue du Kremlin) qui est chargé de surveiller l'activité du parti de l'intérieur. Cet homme est intouchable, ce que Prokhorov a appris à ses dépens.


Concrètement, l'association est devenue à ce point dangereuse qu'il a été décidé de tout d'abord s'attaquer à son image. Ce qui a été fait en novembre par des publications dans les masses médias, notamment le 26 novembre dans Rossiïskaya Gazeta (voir l'article en russe ici), visant à discréditer l'activité de l'association. Le 28 novembre un groupe de journalistes de NTV fait interruption dans les locaux de l'association, de manière assez agressive (voir la video sur youtube ici), alors que l'association Golos leur avait déjà donné deux interview et en boucle leur demande qui les finance et pourquoi ils veulent saper les élections. En boucle également, un représentant de l'association leur répond qu'ils ne sont que l'outil de propagande de Surkov.


Pour quoi cette suractivité soudaine à l'encontre d'une association qui n'est pas nouvelle? La raison se trouve certainement dans son dernier projet: "la carte des infractions", projet en collaboration avec le journal Gazeta .ru, dans le cadre duquel ils fixent en temps réel l'évolution des infractions à la législation électorale russe et aux standards internationaux en la matière dans la période pré-électorale et lors du déroulement des élections.


Le projet a été interrompu et retiré par gazeta.ru. Le journaliste de Gazeta.ru qui s'en occupait - et qui était également premier vice-rédacteur en chef de la revue - R. Badanine, a démissionné (voir l'article en russe ici).


Comme l'a remarqué un blogger anonyme, "quand ils s'en sont pris à Loukachenko, cela signifiait que quelque chose se passait mal dans les transactions pour le gaz, quand ils s'en sont pris à Loujkov, ils voulaient s'en défaire, maintenant ils s'en prennent aux observateurs, cela veut dire que les violations sont déjà planifiées".


Selon A. Bouzine, directeur de l'association Golos, dans leur requête à la Procuratura, les députés n'ont rien précisé quant aux soit-disantes infractions commises par l'association, ils ont simplement indiqués, dans le plus pur style soviétique, que l'association percevait des financements étragers et que donc il fallait la contrôler. Mais une association n'est pas un parti politique et elle en a parfaitement le droit.


Aujourd'hui, la Procuratura a commencé sa vérification et a ouvert une "enquête administrative" (voir ici).


L'on peut déjà s'attendre à un taux record d'infractions lors de ces élections de dimanche. Plus le moment approche, plus le pouvoir panique. S'il démontre ainsi sa faiblesse - et la consience de cette faiblesse - il est en tout cas encore suffisamment fort pour remporter coûte que coûte cette échéance électorale. Après lui ... le déluge.




mercredi 30 novembre 2011

Réforme de la procédure d'examen d'entrée des juges: une tentative d'autonomisation

Совет Федерации одобрил создание нового органа судейского сообщества и изменил процедуру сдачи экзамена на звание судьи


Le Conseil de la Fédération vient de valider le projet de loi présidentiel réformant les modalités d'accès à la fonction de juge. Si les docteurs en droit et les détenteurs d'un doctorat d'Etat (deuxième thèse) décoré pour leurs qualités professionnelles sont exemptés d'examen, pour les autres le nombre de questions auxquelles ils devront répondre a été augmenté et comporte une épreuve pratique.

Mais le but profond de la réforme était d'autonomiser la commission d'examen. Pour cela, un organe indépendant est donné, dont le statut est équivalent à celui du Congrès national des juges (Всероссийский съезд судей) et qui sera indépendant des autres organes dans sa prise de décision.

La Commission d'examen sera constituée à partir de juges des cours d'arbitrage (juridictions économiques) et des juridictions de droit commun à part égale. Les 3/4 de la commission seront composés de magistrats et 1/4 de juristes universitaires ou de représentants de l'association nationale des juristes de Russie. Les commissions régionales seront constituées par les Conférences de juges des Sujets de la Fédération.

En plus des commissions régionales, est crée une Commission supérieure d'examen, qui sera composée de 21 personnes: 8 juges des cours d'arbitrage, 8 juges des juridictions de droit commun, 4 universitaires, 1 représentant de l'association nationale des juristes de Russie.

La décision de la Commission d'examen pourra être contestée en justice pour violation de procédure. Le contentieux relèvera des juridictions de droit commun.

Il n'est pas certain que la réforme autonomise réellement la prise de décision quant au recrutement d'un juge, mais en tout cas elle renforce l'esprit de corps. Le problème de l'indépendance de la justice, qui englobe cette question plus concrète, est un problème systémique qui ne pourra être réglé que de manière systémique et non par des modifications techniques ponctuelles.

mardi 29 novembre 2011

Selon les russes, la Commission électorale travaille pour Edinaya Rossiya: dernier sondage d'opinion

В интересах «Единой России»
Россияне перестали реагировать на политтехнологические уловки властей
http://www.gazeta.ru/politics/2011/11/28_a_3850230.shtml

Selon l'opinion de la majorité des personnes interrogées, la Commission électorale travaille dans l'intérêt d'Edinaya Rossiya et le processus électoral ne correspond pas aux standards démocratiques. Voici les conclusions tirées du sondage d'opinion effectué par le Centre Levada. En principe, les gens ont une opinion plutôt favorable du Président sortant, mais ne sont pas prêts à voter pour lui. Et pour l'instant seule une minorité est prête à voter pour V. Poutine.

Près de la moitié des russes ne croient pas en ces élections. Pour 48% des citoyens, sous couvert d'élections, il ne s'agit que d'une lutte de clans bureaucratiques pour avoir accès aux ressources budgétaires. Seulement 28% des personnes interrogées ont confiance en les élections du 4 décembre.

30% des électeurs estiment que de toute manière les résultats électoraux seront "fabriqués" par les commissions électorales locales et 15,4% n'excluent pas l'intervention de la Commission électorale centrale. 19% s'attendent même à des tentatives d'achat des voix de la part du pouvoir.

46,5% des personnes interrogées sont convaincues que la Commission électorale fonctionne dans l'intérêt d'Edinaya Rossiya. Seulement 34% lui font confiance. 80% des respondants estiment que le Premier ministre fait la propagande d'Edinaya Rossiya dans ses interventions télévisées.

Seulement 18% des citoyens ne voient pas d'abus de pouvoir dans le processus pré-électoral et 2,6% estiment que les abus de pouvoir n'auront pas d'influence significative sur le résultat des élections.

Malgrè tout, une large majorité de la population se prépare à prendre part aux élections: 61,1%.

Le début de la campagne officielle pour les présidentielles a quelque peu modifié les cartes. Dimanche dernier, seulement 30,7% des citoyens étaient prêts à voter pour V. Poutine, qui est devant G. Ziouganov avec 7,9% d'intentions de vote et D. Medvedev ... avec 6,8% d'intentions de vote.

L'annonce de l'échange des postes entre le Président et le Premier ministre n'a pas provoqué de surprise dans l'opinion. 80% affirment que leur appréciation des deux personnages n'a pas changé après cette annonce, 25,7% réagissent favorablement et un peu plus de 15% défavorablement. La majorité est indifférente.

Dans tous les cas, la confiance dans le tandem perdure pour 45,6% des personnes interrogées et 51,4% des citoyens ont une opinion favorable du Président sortant. Pourtant seulement 6,5% des russes estiment de D. Medvedev a une réelle influence dans le processus de décision dans le pays.

lundi 28 novembre 2011

La grande surprise des présidentielles: la candidature officielle de V. Poutine

"Президент — это гарант, который гарантирует все"
Как "Единая Россия" выбирала Владимира Путина


Lors de son deuxième congrès, Edinaya Rossiya a officiellement lancé la candidature de V. Poutine pour les présidentielles. Sans grandes surprises sur le résultat, mais très instructif sur la manière. Voici comment on choisit un Président en Russie. A. Kolesnikov, présent au Congrès, raconte le déroulement de la séance ou comment de toute manière les membres n'avaient pas le choix.

Le Congrès commence par l'annonce de l'ordre du jour, à savoir une élection très spéciale. Il est alors demandé à chacun de rester à sa place et de réfléchir à ce qui signifie être Président.

Un joli petit film est montré, avec des interview de représentants de ce bon peuple. Un travailleur déclarant que le Président est le garant, qu'il garantit Tout. Et bien sûr il a raison, surtout en période pré-électorale. Une jeune fille répond que le Président est un Père Noël et là aussi elle a raison, également en période pré-électorale.

Après cela, B. Gryzlov commence le Congrès sur les chapeaux de roue. Tout va trop vite. Il propose de voter et demande si quelqu'un a une remarque à faire ou s'il est contre. Et sans lever la tête continue: Non? Merci.

Même l'hymne est joué plus rapidement que d'habitude. Ensuite débute les interventions sélectionnées.

S. Govorukhin rappelle les mots de Soljenitsyne selon lesquels une jeune démocratie a besoin d'un pouvoir fort. L'intelligencia peut s'écrier: non, il ne nous faut que la liberté et rien d'autre! Mais non, il y a aussi des obligations devant le pays et la société! Donc, l'acteur rappelle surtout les obligations du peuple devant V. Poutine. Il propose ensuite la candidature de V. Poutine, qu'il qualifie de juste, fort, intelligent et compétent non seulement pour défendre les droits mais aussi pour remplir ses obligations. Comment lui opposer un refus?

Ensuite B. Titov (oligarque) se rappelle avec horreur les années 90 où il fallait payer une protection, alors que maintenant on sait où payer - et il regarde V. Poutine à ce moment, mais naturellement, oh non, il envisage certainement les services fiscaux.

Suit un ouvrier d'une usine qui raconte comment V. Poutine est venu, a donné des conseils qui ont sauvé l'usine, une mère de 15 enfants qui ne comprend pas pour qui d'autre il faudrait voter puisque tout va pour le mieux, etc. Et tous bien sûr, comme un seul homme proposent la candidature de V. Poutine. Intervient alors B. Gryzlov pour souligner qu'ils ont bien tous le même point de vue: la candidature unique de V. Poutine.

Vient le discours de D. Medvedev, grandement orchestré et rythmé par les slogans de la foule "Le peuple! Medvedev! Poutine!", comme aux plus belles heures de la gloire du Parti. "Tout le monde en a marre de la corruption et d'un système stupide!" ... slogan et petits drapeaux ... "Ici se trouvent les dirigeants des régions, sur eux repose tout le pouvoir!" ... slogan, petits drapeaux ... "il n'y a pas d'autre équipe que la notre, tout simplement!" ... et on change de slogan: "RUSSIE!!!". De toute manière, même s'il y avait eu une alternative, elle n'existe déjà plus, Medvedev a pleinement raison.

Enfin V. Poutine prend la parole et trouve évidemment ses ennemis à l'extérieur en ces Etats qui sous couverture de subventions cherchent à former des gens pour perturber les élections en Russie. Ils feraient mieux d'utiliser cet argent pour résoudre leurs problèmes financiers intérieurs.

Bref, chacun joue son rôle à la perfection.

Arrive enfin le grand moment: le Vote. Et là, au surprise, trois mots sur le bulletin: Vladimir Vladimirovitch Poutine. Même pas besoin de faire une croix, il n'est pas clair comment ne pas voter pour lui. Il suffit juste de mettre le bulletin dans l'urne, et c'est tout. Certains représentants sont un peu perturbés.

"Mais pourquoi ont-ils donné un stylo?

Oh, j'ai fait une croix? Qu'est-ce qui va se passer???

Alors s'en est fini! Mais tu es fou, il y a des caméras partout ici!!!"

Mais fialement tout se passe bien. 614 votants. 614 pour. Pas de nuls. Pas de voix contre. Il y avait 621 représentants au Congrès, donc 7 personnes se sont abstenues.

Ces "élections" montrent l'idéal électoral pour Edinaya Rossiya: pas d'alternative, une machine bien rodée et des électeurs dociles. Le rêve! Tout de même, pour vérouiller à ce point le processus, même parmi les siens, ils doivent sentir un certain malaise. Que se passera-t-il dans 5 ans?





vendredi 25 novembre 2011

Poutine: la victoire d'Edinaya Rossiya est nécessaire pour sauver le pays

Или будет кризис
Путин объяснил фракции «Единой России», почему нельзя проигрывать
http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/11/24_a_3847590.shtml

Lors de sa rencontre de jeudi avec la direction du parti Edinaya Rossiya, V. Poutine a déclaré que si Edinaya Rossiya n'obtient pas une majorité suffisante au Parlement, une crise sérieuse et similaire à ce qui se passe en ce moment en Europe attend la Russie. Il attend donc du Parti qu'il obtienne le nombre de mandats nécessaires.

En effet, pour V. Poutine, la Russie a pu sortir rapidement de la crise grâce à la majorité parlementaire, contrairement aux pays d'Europe où l'opposition parlementaire est trop forte.

La faiblesse de l'opposition russe a permis de limiter les discussions au sein de l'institution parlementaire, de prendre rapidement les décisions et d'adopter sans trop de discussions les textes nécessaires au prélable établis par le Gouvernement. Et cela n'a été possible que parce que le Parlement n'est contrôlé que par un seul Parti.

B. Gryzlov, président de la Douma, rappelle qu'ainsi il a été possible d'adopter 1608 textes de loi, soit 500 de plus que lors de la précédente législature. Ce qui n'aurait pas été possible dans une autre conjoncture politique.

La Russie a donc pu éviter de s'engager dans une économie spéculative, de prendre de mauvaises décisions ou simplement de ne pouvoir réagir à la situation, comme cela a été le cas en Europe, où les Etats vivent à crédit et non en fonction de leur revenu.

L'opposition critique évidemment cette position, rappelant que toutes les décisions ont été loin d'apporter un bénéfice pour le pays et qu'en Russie aussi l'économie est dans une large mesure spéculative. Ajoutant que si la dette publique a été baissée à 10% du PIB, elle est en train de remonter.

Ce discours est un dangereux mélange de populisme, d'autosatisfaction et de mauvaise foi.

Tout d'abord, la quantité des lois adoptées est loin de garantir leur qualité, il suffit pour cela de voir le nombre de modifications - et leur rythme - qui sont adoptées aux textes en vigueur.

Ensuite, la présence de l'opposition permet justement le débat, ce qui est l'essence d'une institution représentative comme le Parlement, à la différence de la logique gouvernementale. Si le Gouvernement doit effectivement représenter la politique du parti vaiqueur, le Parlement doit représenter la pluralité des courants politiques de la société afin de pouvoir réellement défendre ses intérêts. Ce qui n'est pas le cas en situation de monopole artificiel.

Enfin, la majorité parlementaire ne garantie pas de faire les bons choix politiques, elle permet simplement de les adopter plus facilement, quelle que soit la position du reste de la société. Ce qui dangereux à terme. La crise en Europe ne peut donc en aucun cas être attribuée à l'existence d'une opposition parlementaire. Etablir un lien entre la composition formelle du Parlement et la résolution de la crise est une absurdité totale.

jeudi 24 novembre 2011

Pour Medvedev, la dépendance de la justice est de la responsabilité des juges

Voir: http://pravo.ru/news/view/64752/

En Russie, depuis longtemps, existe une pratique très bien répandue selon laquelle des personnes intéressées et influentes téléphonent au juge afin de le contraindre à prendre une décision dans un sens déterminé, qui souvent ne correspond pas au respect des règles juridiques en la matière. Cette pratique s'appelle "le droit du téléphone".

Quelle que soit la personne qui téléphone, la pratique est choquante et dangereuse.

Choquante, car elle suppose que le poids personnel d'un individu est plus fort que celui de la loi. Choquante, car elle suppose que le juge n'est qu'un technicien, mis en place pour servir des intérêts particuliers et déterminés, supérieurs à ceux de la loi.

Dangereuse, car, en soi, elle constitue une forme de nihilisme juridique. Dangereuse, car elle détruit l'état de droit. Dangereuse, car la parodie de justice conduit au féodalisme, dans le cadre duquel les rapports personnels déterminent les rapports abstraits entre le pouvoir et la société.

Et même si cette pratique existe à des degrès divers dans toutes les sociétés, elle est unanimement condamnée. Or, le Président Medvedev, grand défenseur de l'indépendance de la justice, grand prophète de la modernisation et de la libéralisation de l'Etat russe veut par sa personne légitimer cette pratique.

Lors de sa rencontre avec les responsables du ministère de l'intérieur, de la Procuratura générale, du Comité d'enquête et avec des représentants de la société civile, notamment des membres de la Chambre Sociale de la Fédération de Russie, D. Medvedev n'a rient trouvé de mieux à dire que les pressions exercées par les autres branches du pouvoir sur la justice sont normales, cette pratique existant dans d'autres pays. En effet, l'Etat doit avoir la possibilité de faire connaître sa position au juge avant qu'il ne prenne sa décision. Simplement, il faut le faire de manière beaucoup plus intelligente que par un coup de téléphone. Par ailleurs, s'il est possible de téléphoner directement au juge sur son téléphone portable, celui-ci est directement responsable, il n'a qu'à ne pas donner son numéro (sic!). Il rappelle aussi qu'à la Cour supérieure d'arbitrage (juridiction compétente pour les litiges économiques) les juges ont proposé d'enregistrer systématiquement ces communications pour réduire leur influence.

Le cynisme et la légèreté dont fait preuve le chef de l'Etat russe sont inacceptables. Pour les juges qui devraient y voir une insulte directe. Pour la société civile à qui il dit clairement de ne pas attendre une justice impartiale en Russie.

Cela a au moins le mérite de clarifier la situation s'il restait encore un doute.

mercredi 23 novembre 2011

Les autorisations de vote en dehors de sa circonscription ou comment développer un instrument de falsification

Общеоткрепляющее
На выборах в Госдуму будет выдано рекордное количество открепительных удостоверений
http://www.gazeta.ru/politics/elections2011/2011/11/22_a_3844442.shtml

Dans plusieurs régions de Russie, les autorisations de voter en dehors de sa circonscription, délivrées par les commissions électorales régionales, ont augmenté de 5 à 10 fois par rapport à 2007. Cette tendance inquiète les partis d'opposition et les experts qui y voient un moyen de falsifier le vote au profit d'Edinaya Rossiya.

Dans certaines régions, les chiffres sont simplement effarants. A encore deux semaines des élections, dans l'Oblast de Briansk ont déjà été délivrées 10 863 autorisations (contre seulement 636 en 2007), dans l'Oblast de Toula 11 557 (2048 en 2007), dans l'Oblast de Kostroma 542 (179 en 2007), dans l'Oblast de Nijni-Novgorod 2570 (508 en 2007), dans le Kraï de l'Altaï 2621 (481 en 2007) et dans le district autonome de la Tchoukotka 1937 (205 en 2007).

Dans l'Oblast de Vladimir ont été données 10 fois plus d'autorisation de vote en dehors de sa circonscription qu'en 2007, dans l'Oblast d'Ivanovo 9 fois plus, dans les Oblasts de Novosibirsk, de Tambov et de Saratov 5 fois plus, dans les Oblasts de Tchéliabinsk et d'amour 4,5 fois plus et dans l'Oblast de Kaluga 4 fois plus.

Selon G. Golossov, professeur à la faculté de sciences politiques et de sociologie de l'Université européenne de Saint Petersbourg, le recours aux autorisations de vote en dehors de sa circonscription est une forme de l'utilisation des ressources administratives. Moins la participation réelle est forte, plus effectif sera ce moyen, puisqu'il permet alors d'organiser le vote "surveillé" de groupes de personnes dans des circonscriptions déterminées. Toutefois, ce mécanisme n'est pas le plus déterminant dans le processus de falsification des élections, qui reste celui de la falsification directe des résultats, également d'autant plus efficace que le taux réel de participation est faible.

Dans certains cas, la pratique conduit, par exemple, le personnel médical à inciter les patients à obtenir cette autorisation pour ensuite la donner à une infermière ... qui se charge du reste.

Mais le plus dangereux est le risque de pouvoir voter plusieurs fois pour une seule personne dans plusieurs bureaux de vote, quand on lui donne un bulletin sans marquer l'utilisation de l'autorisation de vote, qui peut alors être réutilisée ailleurs.

Heureusement cette tendance n'est pas généralisée. Par exemple, dans l'Oblast de Kirov le nombre d'autorisation a diminué par rapport à 2007, passant de 5266 à 1224 ou à Moscou où les chiffres sont tombés de 24 807 à 13 956. Dans ces deux régions, les dirigeants n'ont pas de proches soutiens à Edinaya Rossiya, selon les experts.

Edinaya Rossiya, pour sa part, ne voit pas de raison de s'inquiéter d'un risque de falsification lié à l'utilisation des autorisations de vote en dehors de sa circonscription. Les observateurs et les représentants des partis étant évidemment là pour veiller au bon déroulement des processus de vote.

Le renforcement de cette pratique - et les riques potentiels qu'elle contient - souligne la nécessité pour Edinaya Rossiya de récupérer toutes les voix possibles. Ces élections semblent marquées par le renforcement de l'utilisation des ressources administratives, ce qui marque plutôt l'affaiblissement réel du parti.