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vendredi 24 juin 2011

Les communistes veulent défendre la CEDH en justice

Коммунисты не дают закрыть форточку в Европу
Оппозиция против инициативы, ограничивающей доступ к ЕСПЧ









Les communistes sont en mesure d'attaquer en justice le président par interim du Conseil de la Fédération, A. Torchine, pour son initiative législative qui vise à restreindre les droits des citoyens russes. Rappelons que sur l'initiative de A. Torchine, un projet de loi doit être examiné par la Douma, visant à conditionner l'application des décisions de la CEDH à leur conformité avec la jurisprudence de la Cour constitutionnelle ou après son accord.



Selon le député S. Obukhov, A. Torchine "a outrepassé ses compétences et nous allons agir en justice en qualité de défenseurs des droits de l'homme". Le recours devrait être prêt la semaine prochaine.



Pour sa part, A. Torchine déclare que en Russie, la Cour constitutionnelle domine le système judiciaire et non la CEDH. On lui rappellera simplement que la Cour constitutionnelle, en Russie, ne fait pas fonction de cour suprême et qu'elle ne peut en aucun cas dominer le système judiciaire puisqu'elle n'en est qu'un élément, mais ce n'est qu'un détail. Il ajoute avec cynisme que "quand la CEDH sera dirigée par Jésus Christ, alors je retirerai mon initiative législative".



La Douma, quant à elle, veut accélérer la procédure d'adoption de la loi, puisque le pouvoir, ces derniers temps, est particulièrement mécontent de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg.



Ne serait-il pas plus simple de sortir, dans ce cas, du système de la Convention? A moins que politiquement, ce ne soit pas possible...

On commence à s'inquiéter pour Medevedev...

Д.Медведев собирается возглавить политическую партию


Lors de sa visite à la rédaction du journal "Moskovskie novosti", le Président russe D. Medvedev a déclaré qu'il n'écartait pas la possibilité de diriger un parti politique... mais que bien évidemment il ne précisera pas lequel... qu'il peut s'agir d'un parti qui existe déjà... ou qui n'existe pas encore. Mais peut être aussi ne dirigera-t-il pas de parti politique du tout.

Edinaya Rossya est déjà pris. Pravoe delo aussi. Les autres non seulement sont occupés, mais de toute manière d'orientation beaucoup sociale pour D. Medvedev. Il ne lui reste plus qu'à fonder son parti, libéral bien sûr, vus les intérêts qui le portent. Ne nous inquiétons pas, celui-ci sera enregistré sans l'ombre d'un problème.

La Russie aura-t-elle alors la chance de pouvoir réaliser une concurrence politique comme elle l'aime, à savoir en sachant qui de toute manière dirigera les affaires?

Mais peut-être lui faudrait-il déjà décider qui sera candidat? A moins que la décision ne lui appartienne pas ...

jeudi 23 juin 2011

Navalny contre Le Front populaire de Poutine

Навальный просит генпрокурора проверить "Народный фронт" Путина






Sur la manière dont les entreprises et leurs employés sont incités à entrer collectivement dans le Front populaire, voir http://www.kommersant.ru/doc/1664989



Voir le texte du recours adressé à la Procuratura sur le live journal de A. Navalny http://navalny.livejournal.com/597723.html#cutid1






Le 7 mai 2011, lors d'une rencontre avec les représentants d'associations soigneusement choisies, V. Poutine a fondé le Front populaire qui a pour but de faire le lien entre la politique et la société civile, de permettre l'apport de nouvelles idées et de nouveaux visages, ce dont Edinaya Rossya a grandement besoin. Le Front propose pour cela une stricte égalité entre toutes les organisations qui entrent en son sein et leur participation commune aux futures élections. Mais en dehors d'une activité de propagande hors toute proportion, aucune démarche juridique visant à l'enregistrement de ce mouvement n'a été faite. A. Navalny, notamment fondateur du site Rospyl de lutte contre la corruption et les détournements de fonds publics, a adressé un recours à la Procuratura, lui demant de vérifier la légalité de l'existence du Front populaire fondé par V. Poutine.


Selon A. Navalny, le problème vient du fait que de plus en plus d'organisations entrent dans ce Front qui, juridiquement n'existe pas, puisque, entre autre, il n'a pas organisé d'AG, n'a pas adopté de statut, n'a pas déterminé ses organes, etc. De plus, en toute logique, seules des personnes morales ou physiques peuvent entrer dans une organisation sociale (association au sens large du terme), or de nombreux collectifs de travail y participent en tant que groupe, mais n'ont pas de personnalité juridique. On en arrive dont à une situation surprenante où des groupes informels entrent dans un autre groupe informel, mais en utilisant les ressources d'une personne morale. Se pose notamment la question de leurs locaux très bien situés dans le centre...



Mais le plus grand reproche formulé est la violation de la législation russe en ce qui concerne l'utilisation et du temps de travail légal et des moyens fournis par sa fonction de Premier ministre, notamment les moyens financiers ou en terme de télécommunication, pour des activités qui ne sont pas liées à l'exercice de ces mêmes fonctions.



Il est intéressant que quelqu'un ait eu l'idée d'attaquer ce mouvement politique sur le terrain du droit. Rappeler que le principe selon lequel les règles juridiques s'appliquent à tous est justement le fondement de l'Etat de droit. Rappeler qu'en politique aussi il faut respecter les règles juridiques du jeu, qui ne sont pas posées que pour les autres.



Sur le plan politique ... étouffement et marginalisation "hors système" des représentants de la société civile indépendante, regroupement autour d'une idéologie simple "garder le pouvoir", dénigrement de l'opposition... sans commentaires.













PARNAS / Pravoe delo: ce sera Pravoe delo

Досадное упорство
Отказ Минюста зарегистрировать ПАРНАС приведет к радикализации политической жизни
Александр Гордин






Voir également sur le thème :














Le 22 juin 2011, le ministère de la justice a décidé de refuser l'enregistrement du parti d'opposition "Parti de la liberté nationale"(PARNAS), fondé par M. Kassianov, V. Milov, B. Nemtsov et V. Rijkov, en arguant de certaines irrégularités comme la présence de signatures de personnes décédées ou ne vivant pas à l'adresse déclarée ou encore sur le fait que les statuts du parti ne prévoient pas la rotation de la direction du parti. M. Kassianov a déclaré ne pas vouloir attaquer cette décision en justice puisque la décision, selon lui, est politique.


Cette pratique est toutefois devenue une tradition: depuis plus de deux ans, aucun parti d'opposition n'a pu obtenir d'être enregistré.


Dans les couloirs de la Douma, le bruit court que PARNAS a été sacrifié au profit de Pravoe delo, qui ne présente strictement aucun danger et est "autorisé" par le pouvoir. Même dans les rangs du parti Russie juste, on souligne que s'il doit y avoir concurrence politique, le choix des participants doit appartenir à la société et non au pouvoir.


Selon M. Deliaguine, directeur de l'Institut des problèmes de la globalisation, le refus d'enregistrer ce parti démontre encore s'il est nécessaire l'absurdité des grandes déclarations récentes du ministre de la justice sur la nécessité de libéraliser les processus politiques.


On rappellera que, en effet, il y a quelques jours le ministre de la justice déclarait qu'il fallait revenir sur la procédure d'enregistrement des partis politiques, leur reconnaître un statut d'association, pour que leur activité soit contrôlée a posteriori et qu'ils ne subissent plus le poids d'une présomption d'illégalité.


On rappellera également les grandes déclarations de Medvedev sur l'importance de la concurrence politique.


En conclusion, les élections à venir se passeront sans la présence d'un seul parti réellement autonome. Peut-on encore parler d'élections?

mercredi 22 juin 2011

CEDH : les activistes ont aussi droit à une vie privée

Страсбург снимает "Сторожевой контроль"
ЕСПЧ признал политический сыск нарушающим права человека
http://www.kommersant.ru/doc/1664631




Voir également sur le thème: http://www.pravo.ru/interpravo/news/view/56162/


La CEDH s'est à la fois prononcée contre l'arrestation "préventive" d'un activiste des droits de l'homme, Sergueï Chimivolos, pour le simple fait qu'il dirige une organisation de protection des droits de l'homme, et contre la légalité de la base données policière mise en place dans le cadre de la lutte contre l'exptrémisme, regroupant les informations sur les créations d'associations défendant les droits de l'homme, les activistes et le suivi de leur activité.


Les faits sont assez simples. Juste avant l'organisation du sommet UE-Russie en 2007 à Samara, une marche de contestation contre le régime russe a été organisée, lors de laquelle de nombreux participants, défenseurs des droits de l'homme, observateurs et journalistes, ont été arrêtés. Ce fut le cas de S. Chimivolos, qui fut arrêté de manière préventive pour 45 minutes car soupçonné d'activité de caractère extrémiste.


La CEDH a contesté le fondement de l'arrestation qui était uniquement justifié par le fait que l'interpellé appartienne à une organisation des droits de l'homme. De plus, la Cour a également remis en cause la légalité de la base de données, dans le cadre de laquelle sont regroupées toutes les informations concernant les déplacements et les activités de membres de la société civile. Cela constitue une infraction par la Russie au droit à la liberté et au respect de la vie privée.


Officiellement, en 2007, ont été mis dans cette base de données des informations concernant 3865 personnes, non seulement classées comme nationalistes, mais également des membres de l'opposition, des activistes, etc. Tous ces individus sont considérés commes des criminels et des extrémistes potentiels.


Toutefois, arriver à obtenir de la justice russe l'effacement des données concernant toutes les personnes qui n'ont pas été reconnues par une décision de justice comme exerçant une activité extrémiste a été impossible pour le requérant. Le tribunal de Nijegorod a en effet décidé que, au regard de l'activité social du requérant, les forces de l'ordre sont fondées à l'inscrire dans la base de données.


La CEDH a également souligné le fait que les intéressés ne peuvent savoir pour quelles raisons ils y figurent, quelles informations sont réunies et qui les contrôle. Ce manque de transparence va à l'encontre des principes européens.


Théoriquement, S. Chimovolos est maintenant en droit de demander la réouverture de son affaire devant les juridictions russes en se fondant sur la décision de la Cour de Strasbourg, mais obtiendra-t-il gain de cause?

Quand la Cour suprême veut recadrer l'extrémisme


Ненависть между строк
Верховный суд подготовил рекомендации, как рассматривать дела об экстремизме
Владислав Куликов






La Cour suprême est en mesure de préciser les contours de la notion d'extrémisme dans le projet d'arrêté du Plenum (acte non judiciaire qui interprète la législation et donne des recommandations aux juridictions inférieures) en ce qui concerne la pratique judiciaire pour les affaires pénales touchant à l'extrémisme.


Selon l'opinion de nombreux activistes des droits de l'homme, la législation concernant l'extrémisme est devenue, dans une certaine mesure, l'équivalent de l'incrimination de propagande antisoviétique, pour laquelle de nombreux opposants se sont retrouvés en prison à l'époque soviétique. L'interprétation très large qui est faite de l'extrémisme et même de la simple animosité permet d'y faire entrer n'importe quelle liberté de penser. Dessines une caricature de la milice, et tu es déjà extrémiste! Mais une telle interprétation de l'extrémisme est en soi même de l'extrémisme et il faut lutter contre cela.


Les recommandations du Plénum de la Cour suprême, selon l'opinion de nombreux experts, sont en mesure de donner à la pratique judiciaire une orientation plus raisonnable. L'idée générale sous-entendue par ce document est de ne pas qualifier tout et n'importe quoi d'extrémisme. Une critique, même virulente, et l'extrémisme sont des choses différentes, même si les forces de l'ordre ont tendance à y voir une similitude. En ce sens, une liste des publications reconnues comme extrémistes a été officiellement publiée.


Ce projet d'arrêté du Plénum a été rendu nécessaire par l'augmentation ces dernières années du nombre d'affaires pour extrémisme. Pour la seule année 2010, 329 personnes ont été emprisonnées pour extrémisme, 613 ont été condamnées, entre autre, sur ce fondement et cela concernait le plus souvent soit de simples coups et blessures, soit des atteintes volontaires à la santé d'autrui.


La tendance se confirme également en ce qui concerne l'inculpation pour organisation d'activité extrémiste. En 2010, 23 personnes ont été condamnées, quand seulement 2 en 2008 et aucune en 2009. Les activistes des droits de l'homme s'inquiètent également du fait que les cours condamnent de plus en plus sur le fondement de l'incitation publique à l'activité extrémiste. Cela s'explique, selon le ministère de l'intérieur par une augmentation dans de nombreuses régions de Russie de l'activité et de la formation de groupuscules extrémistes.


Par ailleurs, le Plenum souligne le fait que la critique à l'encontre des organisations politiques et en particulier à l'encontre des hommes politiques ne peut entrer dans le cadre de la législation sur l'extrémisme, ni être considérée comme une atteinte à la dignité de ces personnes ou groupes.


De la même manière, la notion de "groupes sociaux" utilisée par la législation n'est pas définie et a permis aux forces de l'ordre d'assimiler des critiques à leur égard à une atteinte à un groupe social entrant dans le cadre de la législation sur l'extrémisme. La Cour recommande de restreindre l'interprétation de la notion de "groupes sociaux" à des catégories sociales nécessaitant une protection particulière en raison de leur position de faiblesse, comme les retraités, les invalides ou les orphelins.


On soulignera que si le Plenum de la Cour suprême est intervenu par un arrêté, cela signifie une volonté de réguler de manière systémique l'interprétation trop large souvent donnée à la notion d'extrémisme. Mais il ne faut pas oublier que sa jurisprudence, de manière constante depuis des années, tend à en réduire l'application et à protéger les libertés. Il est appréciable que dans cette période pré-électorale, où les tensions et les critiques risquent d'être vives, la Cour ait eu l'initiative de protéger préventivement l'exercice des libertés politiques. Espéront qu'elle sera entendue!

mardi 21 juin 2011

Poutine / Medvedev: la même force politique


«Конкуренция между нами может пойти во вред»
Дмитрий Медведев объяснил Financial Times, почему он не хочет конкуренции с Путиным на выборах



C'est la fin d'un mythe, pour le moins en ce qui concerne la presse étrangère: non il n'y a pas de concurrence politique ouverte entre Medvedev et Poutine. Ce sont les deux visages d'une même force politique, le bon et le méchant, dans la meilleure tradition des westerns d'antant.

Comme l'a déclaré D. Medvedev dans une interview au journal Financial Times, il est normal qu'il envisage de se présenter aux élections présidentielles, mais la décision sera concertée de savoir qui de lui ou de Poutine sera le candidat. Il est exclu que les deux se présentent, puisqu'ils représentent la même force politique. "Une concurrence entre nous pourrait être préjudiciable". D'autant plus qu'il n'y aurait pas de discorde entre eux. Ni avec le Gouvernement. Tout n'était donc qu'un effet d'optique... volontaire ou fortuit.

Et le Président d'ajouter que si la concurrence est en soi une bonne chose, "la participation aux élections n'a pas pour but de développer le slogan de la démocratie libre, mais de gagner".

Intéressant: existe-t-il une nouvelle forme de démocratie qui puisse ne pas être libre? puisque V. Poutine semble lui aussi avoir des vues présidentielles, de qui va dépendre le choix du candidat?

A ces deux questions une réponse peut tout de suite être écartée: le mot final n'appartient ni au peuple, ni aux électeurs. Officiellement, le choix du candidat va résulter de la décision qui sera prise d'un commun accord entre les deux prétendants. Nous saurons alors qui sera le prochain Président. Tout le suspens sera de savoir qui sera le Premier ministre...

Ni coupable ni responsable: Tchaïka reconduit dans ses fonctions ?

Медведев вновь предложил кандидатуру Чайки на пост генпрокурора



Malgré les scandales entâchant l'image de la Procuratura ces derniers temps, le Président russe D. medvedev a proposé de reconduire le Procureur général de la Fédération de Russie, Yuri Tchaïka, dans ses fonctions. Le Conseil de la Fédération va examiner sa candidature demain, mais peu de surprises sont à attendre.

La candidature de Tchaïka est controversée en raison "du scandale des casinos illégaux", dont l'activité, estimée de 5 à 10 millions de dollars par mois, était couverte par un certain nombre de fonctionnaires de la Procuratura. Ce scandale a été révélé par le FSB et le Comité d'enquête de la FR, mettant en cause de hauts responsables, comme le vice-procureur de l'Oblast de Moscou, Alexandre Ignatenko.

Suite à cela, les médias estimaient minimes les chances de Y. Tchaïka d'être reconduit dans ses fonctions, d'autant plus qu'il atteint l'âge de 60 ans, obligeant chaque année le Président à prolonger ses fonctions. Cette impression était renforcée par les mots de Medvedev en mai lors de la conférence de presse à Skolkovo. En réponse à un journaliste sur l'opportunité d'un changement de cadres soit au ministère de l'intérieur, soit à la Procuratura, le Président déclarait: "Chaque personne qui occupe une haute charge doit sentir sa responsabilité. Il me semble que les responsables que vous avez visé essaient de bien travailler, mais ils doivent comprendre qu'ils ne pourront pas éternellement rester à leur place".

Les paroles du Président, dans un pays où l'Etat est dirigé presque manuellement ont une valeur particulière, sont interprétées et décortiquées. Le problème est que, avec le temps, les analystes se rendent compte que les paroles de Medvedev ne sont pas toujours suivis des effets alors sous-entendus. La question qui revient souvent est de savoir s'il a les moyens de ses ambitions ou si ses ambitions ne sont pas autres que celles affichées en public...

lundi 20 juin 2011

Les décisions de la CEDH sont (presque) obligatoires

Страсбург предстанет перед высшим судом
Российским Конституционным












Un projet de loi a été déposé à la Douma fédérale par le président par intérim du Conseil de la Fédération permettant de bloquer l'application des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, quand la Cour constitutionnelle s'y oppose. Ainsi prend vie l'idée de Valéry Zorkine quant à la nécessité de prévoir des mécanismes de protection nationale contre la jurisprudence de Strasbourg.




Selon le projet de loi, les décisions de la CEDH reconnaissant la violation par la Russie de la Convention européenne des droits de l'homme ne pourront servir de fondement à une révision des procès que si la Cour constitutionnelle n'a pas déjà adopté une décision contraire sur la question de droit visée et, en l'absence de décision de la Cour constitutionnelle, après un recours auprès de celle-ci visant à examiner la compatibilité de la législation russe incriminée par la décision européenne visée avec la Constitution russe. Si la Cour constitutionnelle ne voit pas de contradiction, la décision européenne pourra s'appliquer, dans le cas contraire elle restera lettre morte.




Même le juge russe à la CEDH Anatoly Kovler trouve ce projet pour le moins étrange, puisqu'il revient à remettre en cause les obligations que la Russie s'est engagée à prendre lorsqu'elle a ratifié la Conviention. Cette position est également partagée par l'ancienne juge constitutionnelle à la retraite, Tamara Morchakova, qui rappelle pour sa part que seule la CEDH est habilitée à interpréter la Convention. Elle estime toutefois qu'il y a des chances que ce projet n'ait été initié que pour vérifier la réaction de la société à cette idée.




Sur le plan politique, l'idée est claire: protéger la législation russe contre les modifications nécessitées par les mesures d'ordre générale contenues dans les décisions de la CEDH. Ce qui manifestement remet en question la véritable volonté du pouvoir politique actuel - et du Président - d'une libéralisation et d'une normalisation du système juridique russe.




Sur le plan juridique, c'est une aberration totale, puisque cela remet en cause la hiérarchie des normes posée par la Constitution russe, selon laquelle, traditionnellement, les normes internationales ont une valeur infraconstitutionnelle et supralégislative. On rappellera que les décisions de justice, même celles de la Cour constitutionnelle, ne peuvent revêtir une valeur constitutionnelle. Cela revient donc à octroyer à un acte inférieur la possibilité de bloquer l'application d'un acte supérieur. Sans oublier que les normes du droit international - dont la Convention européenne et les décisions de la Cour font parties - sont d'application directe, toujours selon la Constitution, puisqu'elles ne requièrent pas de mesures nationales de transposition. Or ces décisions de la Cour constitutionnelle remettraient en cause le caractère direct de l'application de normes internationales, contrevenant ainsi au texte même de la Constitution russe.




Le souci de protéger l'indépendance de la justice est largement louable. Il est toutefois regrettable que ce souci ne s'applique qu'à l'encontre de mécanismes juridiques normaux internationaux et non pas à l'encontre de mécanismes politiques intérieurs anormaux.

La souveraineté des uns s'arrête où commence celle des autres

ЦИК не явился на "Предстоящие выборы"
Владимир Чуров не поехал в Европарламент
http://www.kommersant.ru/doc/1660023

Le 14 juin 2011, le Parlement européen a organisé des débats sur le thème des élections en Russie. Le Président de la commission centrale électorale, Vladimir Tchurov, dans la lettre présentée au Parlement par le représentant de la Fédération de Russie, a souligné son impossibilité à participer à des débats politiques sur ce thème au regard de sa position officielle et a proposé que des experts affiliés à la commission soient invités à sa place. La lettre précise que la commission centrale électorale ne peut organiser ou participer à des débats politiques, surtout quand ces débats sont organisés par des organisations internationales dont la Russie n'est pas membre.

Les organisateurs ont déploré cette absence, puisqu'ils voulaient organiser des débats équilibrés, donner la parole à toutes les parties.

On rappellera que ces débats interviennent après que le Parlement européen ait déjà pris, le 9 juin, une résolution soulignant leur désaccord avec les mesures restrictives concernant l'enregistrement des partis politiques d'opposition en Russie.

Que les partis politiques russes soient muselés, peu de personnes vous diront le contraires. Que les élections se déroulent sous une pression forte du pouvoir, cela est chose reconnue. Mais la question qui se pose est de savoir ce que le Parlement européen vient faire dans ces problèmes, somme toute, intérieurs.

Le Parlement européen a-t-il la légitimité nécessaire, faute d'en avoir les bases légales, pour influer sur la législation et la pratique russe en matière électorale? Des doutes persistent.

Quel poids, dans la politique intérieure russe, aura cette résolution et ces débats quand de toute manière la Russie a les mains libres sur le plan des échanges économiques?

Les élections sont une question de souveraineté intérieure, dans laquelle les organisations internationales et les pays étrangers ne peuvent être qu'observateurs. Si leurs paroles se durcissent, si ces acteurs décident d'entrer dans une logique de conflit ouvert et non plus simplement d'influence indirecte, ce qui en l'occurence est largement fondé, ces paroles doivent alors être suivies d'effets concrets.

C'est leur crédibilité qui est en jeu. Maintenant l'opposition russe est dans l'attente ... et montre les signes d'une certaine déception.