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samedi 13 août 2011

L'opération Matvienko: une élection "secret défense"

Корреспонденту «Фонтанки.ru» пришлось уходить по-собственному из-за статьи о выборах Матвиенко




La journaliste Alexandra Garmazhapova ayant appris la tenue d'une réunion "secrète" en vue de l'organisation des élections devant permettre à V. Matvienko d'obtenir un mandat local et ainsi d'être nommée à la tête du Conseil de la Fédération s'y est rendue, avec un dictaphone, a publié le compte rendu de la réunion sur le site Fontanka.ru (фонтанка.ru). Le texte est resté en ligne 3 heures avant d'être retiré et la journaliste contrainte à déposer sa demande de démission.


En effet, le texte, largement reproduit sur internet, est révélateur de la manière dont les élections - notamment législatives et présidentielles - se préparent. Le mieux est d'en traduire certains passages. (voir le texte intégral en russe ici)


Selon les termes de Alekseï Kondrachov, qui préside l'arrondissement municipal où Matvienko présente sa candidature, cet arrondissement donc "a tiré un bon billet de lotterie" et est prêt à "réaliser sa mission politique d'envergure fédérale". Le problème majeur est que les élections doivent se tenir le 21 août, quand beaucoup de personnes sont encore à la datcha ou peuvent y aller se reposer. Il est donc important de mobiliser les troupes.


Pour cela, les représentants des grands centres commerciaux comme "Continent" (континент), Maxidom (Максидом) et le français "Frantsuzsky boulvar" (французский бульвар) ont été instamment priés d'organiser des opérations commerciales, des lotteries ou autres afin de "forcer" les gens à rester en ville et à aller voter. Puisque, dans le même temps, quand les électeurs potentiels se présenteront dans ces magasins, ils seront gentillement "poussés" vers les bureaux de vote.


Parallèlement, si des agitateurs du parti Spravedlivaya Rossiya mènent une campagne dénigrant Matvienko, il faut y mettre rapidement un terme, appeler l'administration de l'arrondissement et même la police.


Sans pouvoir tout traduire, j'aimerais juste souligner encore un point qui montre la généralisation de ces techniques. Il est également demandé aux entrepreneurs de dresser la liste de leurs employers, avec leurs noms de famille, prénoms et patronymes, leurs lieux de résidence et toutes leurs coordonnées. Ces personnes seront contactées par disons "un comité de grand-mères" qui devra les appeler constamment pour les inciter à aller voter. Un coup de téléphone de contrôle devra être effectué 4 jours avant la date des élections. Ce comité devra également contacter un maximum de personnes résidant dans l'arrondissement et les inciter à voter. Comme le rappelle l'administration, de toute façon ces personnes doivent être bien préparées car elles serviront encore pour les élections législatives et présidentielles.


Comment doivent-elles voter? C'est évident, mais juste encore un exemple. La journaliste, pour pouvoir participer à cette réunion, s'est faite passée pour une employer d'un magasin. Entrée dans la salle, elle s'est assise à une table et rapidement une personne est venue se renseigner pour préciser son identité. Finalement, quand elle a pu convraincre de son statut "commercial", cette personne de l'administration locale lui a donné une affiche d'Edinaya Rossiya pour qu'elle la mette bien en vue dans son magasin.


Voilà comment se passent les élections en Russie. Ce n'est qu'un exemple à un niveau très local. Tout cela est très loin des grandes déclarations de D. Medvedev sur le pluralisme politique. Mais qui s'en étonnera encore? Hélas...


vendredi 12 août 2011

Mikhail Prokhorov: futur Premier ministre ou mégalomane?

Voir la présentation de sa conférence de presse du 11/08/2011: http://www.kommersant.ru/doc/1703426

S'agit-il d'un tic de langage? Mikhail Prokhorov s'estime - en sa grande modestie - pouvoir être un bon Premier ministre. Il pourrait aussi se voir en bon Président, mais la place est déjà prise.

S'agit-il d'une simple mégalomanie rendue visible par l'argent ou a-t-il eu une proposition en ce sens? Pour l'instant, rien n'est évident. Mais, ce qui est certain, est qu'il doit d'abord permettre à son parti, Pravoe Delo, de remporter une victoire aux législatives qui se préparent. Sans avoir de députés à la Douma, il est impensable d'envisager sérieusement une telle nomination. Cette "formalité", toutefois, n'a pas l'air de le perturber outre mesure, puisque Pravoe Delo doit devenir le deuxième parti du pouvoir - et non de l'opposition. Les choses sont dites, les faits doivent s'y conformer. Pourtant il est encore un peu tôt et sa position ne fait manifestement pas l'unanimité.

Lors de sa conférence de presse d'hier, il a rappelé l'infamie dont il fait l'objet: dans 13 régions de Russie, environ 400 panneaux publicitaires de son parti - à son effigie - ont été démontés. A Novossibirsk, les 180 panneaux ont été enlevés, à Barnaoul les 35, à Irkoutsk et Novokuznetsk plus de la moitié ont disparus, à Ekaterinbourg 92 des 129 etc. Ce n'est plus un accident, ce n'est plus une erreur des pouvoirs locaux, c'est un signal. Pour sa part, Mikhail Prokhorov est persuadé que sa campagne publicitaire dérange les pouvoirs locaux, ce qui expliquerait les faits et démontrerait leur stupidité et leur faiblesse.

Le dérangement causé par M. Prokhorov est toutefois difficile à évaluer, puisque sa représentativité est appréciée autour de 3% et son programme électoral reste dans le flou. La question de l'élection des gouverneurs est évidemment son fleuron, il a teinté son discours ultra libéral d'un peu de social pour faire bonne figure et tenir compte des réalités du moment. Mais hier, la plus grande surprise est venue de sa déclaration de construire une Europe allant de Lisbonne à ... Vladivostok!

Sa position est simple: comme le rouble est totalement dépendant du gaz et du pétrole, la monnaie nationale russe ne pourra jamais être forte sur les marchés mondiaux. Il faut donc l'abandonner pour l'euro et entrer dans la zone Schengen. Ce qui résoudra tous les problèmes de la Russie.

Cette déclaration permet de mieux cerner la personnalité de M. Prokhorov. Au lieu de chercher des solutions pour rendre le rouble moins dépendant de l'exploitation des ressources énergétiques, autrement dit trouver des moyens de réellement créer un tissus économique viable en Russie, en homme d'affaire pragmatique, il vaut mieux finir de vendre son pays tant qu'il y a des choses à négocier.

Comme l'ont justement soulignés des membres de Edinaya Rossiya, la Russie n'a reçu aucune proposition en ce sens et même s'il y avait une telle proposition, il n'est pas évident de devoir à tout prix accepter.

Serait-ce dans l'intérêt de l'Europe? La réponse est nette: NON. Il est déjà actuellement difficile de gérer économiquement la zone euro et de défendre la monnaie européenne pour ne pas encore se charger d'un pays où l'industrie nationale a fini son évolution avec la chute de l'Union soviétique, sans compter les problèmes ethniques.

Serait-ce dans l'intérêt de la Russie? La réponse est tout aussi nette: NON. Ni le pouvoir en place, qui n'a pas besoin d'un renforcement de l'état de droit pour pouvoir continuer son bizness, ni la Russie qui a vocation à rester - ou à redevenir - un joueur clef sur la scène internationale, ce que ne permettrait pas une entrée formelle dans l'Union européenne, n'ont intérêt à la réalisation d'un tel scénario.

Il reste que la position des libéraux russes de tous poils est marquée par le recours à des discours fumeux et décalés des réalités de la société contemporaine. Ils attendent, comme dans les pièces de théatre classique, l'arrivée du Deus ex machina qui permettra de dénouer la situation. M. Prokhorov et Pravoe delo ne peuvent refléter cette troisième voie tant attendue, ils ne sont qu'une variante de plus sur la prolongation du thème déclinant des années 90.