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Une lettre surprenante a fait sursauter la commauté juridique russe. Une lettre adressée par la compagnie Baker & McKenzie à Anton Ivanov, président de la Cour supérieure d'arbitrage de la Fédération de Russie. Qu'il n'y ait pas eu de réponse officielle, rien d'étonnant. Le plus intéressant est ailleurs. Dans le contenu. Et dans le contexte.
Après un échec en cassation pour une affaire dont le montant n'est pas significatif pour une compagnie comme Baker & McKenzie, une lettre est adressée au président de la Cour supérieure d'arbitrage, accusant les trois juges de corruption - sans en fournir de preuve et sans saisir les autorités compétantes - et proposant un certain nombre de recettes permettant de réduire d'un coup d'un seul la corruption des juges en Russie, sauvant ainsi le système judiciaire.
Reprenons dans l'ordre. L'affaire et le soupçon de corruption. Cette compagnie, un des plus importants bureau d'avocats américain, récupère au niveau de la cassation une affaire d'importance juste moyenne. Affaire qu'ils perdent en cassation. Ce à quoi ils pouvaient s'attendre, la cassation ne faisant qu'une analyse de la bonne ou mauvaise interprétation et utilisation des règles de droit, la règle n'est donc pas la remise en cause des jugements antérieurs, comme dans tout pays de droit européen. Pour exemple, la chambre criminelle de la Cour de cassation française a traité, en 2011, 7926 dossiers et a rendu 482 arrêts de cassation. Mais selon la compagnie américaine il y a corruption car les juges ne se sont pas conformés à la solution - inverse - apportée dans une affaire jugée par eux similaire en faits. Il faut également rappeler que la Russie n'est pas un pas ( encore ) un pays de droit anglo-saxon et son système judiciaire ne fonctionne pas totalement sur le principe du précédent.
Bref, ils demandent une rencontre avec le président de la Cour supérieure d'arbitrage, puisque les voies normales n'ont pas fonctionnées. Donc pour lutter contre la corruption et la pression sur les juges, ils veulent faire pression sur le président de la Cour supérieure d'arbitrage. Une logique imparable... Une première lettre non publiée n'a pas eu de réponse. On en envoie une seconde, publique. Soit, là non plus n'est pas le plus important. Ils veulent, je cite, "lui expliquer comment le système DOIT fonctionner". Il faut donc reprendre la logique des entreprises internationales - américaines - et, sur le fondement du Foreign Corrupt Act de 1977, créer une fonction spéciale au sein de la Cour supérieure pour lutter contre la corruption, attribuée à un vice-président de Ivanov, une sorte de Monsieur corruption. De cette manière, quand un juge prend une décision surprenante, il vérifie les faits de corruption. Toutefois, il ne peut pas remplacer le travail des enquêteurs ... donc on ne voit pas très bien en fait ce qu'il doit faire. Simplement donner son opinion. Et quand il y a soupçon de corruption dans une affaire, dans ce cas une formation spéciale de 12 juges doit vérifier l'affaire ... au regard de la corruption. Pour faciliter le travail de tout ce petit monde il faut mettre en place une base de données, comme aux Etats-Unis, qui va recenser les positions des cours sur les différentes questions concrètes. Si le juge s'en écarte: soupçon de corruption.
Non seulement c'est absurde, mais inefficace en droit, si tel était bien le but. Un Etat n'est pas une entreprise et ne se gère pas, ne s'administre pas de la même façon, du moins dans la conception continentale de l'Etat. Ensuite, il est du ressort du Comité d'enquête d'établir les faits de corruption. Ensuite, le présidium juge en nadzor (révision) les jugements rendus par les juridictions inférieures, non pas au regard de la corruption toute puissante, mais au regard tout bêtement du droit. Si ces mécanismes qui existent ne fonctionnent pas suffisamment bien pour lutter contre la corruption, cela ne signifie qu'il faille désorganiser tout le système. Encore un petit détail: cette fameuse base de données. On va rappeler que le système juridique russe est continental, autrement dit le juge applique la loi et n'est pas tenu par sa jurisprudence antérieure, ce qui s'appelle en bon français un revirement de jurisprudence, pratique bien connue dans nos tribunaux. Si le problème concerne la qualité de l'argumentation juridique des décisions, ce qui est indéniable bien souvent, une telle base de données ne résoudra aucun problème. Il s'agit plutôt de la question de la formation des juges.
Maintenant le contexte ... politique. De longues années durant, Thomas Firestone a exercé les fonction d'attaché juridique de l'ambassade des Etats Unis en Russie. Il est entré dans la compagnie Baker & McKenzie cet été. Avant même son entrée, il travaillait beaucoup sur les questions de corruption, et notamment sur le caractère prioritaire de l'implantation en Russie du schéma présenté plus haut. Peu après son entrée dans la compagnie, celle-ci se charge d'un dossier qui ne correspond pas à son envergure ... mais dont le potentiel politique est indéniable. Ils sont certains de perdre l'affaire en cassation et peuvent lancer le processus. C'est une nouvelle technologie, comme elle existe en politique, elle existe dans le droit.
Mais, évidemment, tous ceux qui n'y voient autre chose qu'une incroyable coïncidence, ont un point de vue faussé par la théorie du complot. Pourtant, ça tombe bien ...
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