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jeudi 12 avril 2018

Syrie: pourquoi Trump personnellement ne veut pas la guerre



Les tweets du président américain D. Trump ont hier soir monopolisé l'attention et des politiciens et des analystes: y aura-t-il ou pas la guerre? Ce n'est quand même pas une question secondaire. Et justement l'importance de la question a empêché une réponse binaire, simpliste. En trois tweets, D. Trump a envoyé deux messages. Un à la Russie et un à l'intérieur. Mettant chacun face à ses contradictions.


Lorsque l'on parle de D. Trump, l'on donne souvent l'image d'un impulsif, voire d'un fou, d'un déséquilibré. Il est violent dans ses sorties, donne effectivement l'impression de suivre le vent du moment, l'humeur passagère et de faire ce que le porte-parole du Kremlin appelle de la "diplomatie sur twitter", ce qui effectivement ne fait pas sérieux. Pour autant, tout ne semble pas aussi simple, voire simpliste que cela.

Quelques remarques préliminaires sur la communication politique

Quant aux capacités de D. Trump: rappelons quand même qu'il est à la tête d'un empire qu'il a assis et développé. Arriver à ce niveau demande de la stratégie, de la vision à long terme et aussi de la violence. Un fou impulsif et stupide n'y serait pas parvenu. Cette approche ressort surtout de la fantasmagorie médiatique. Ce qui ne veut pas dire que Trump soit un ange de sagesse et de calme. Mais entre ces deux extrêmes, il existe une quantité incroyable de possibilité qu'il serait bon d'envisager avec un peu plus de lucidité.

La "diplomatie par tweet" est devenu un élément de la communication publique dans un monde post-moderne, où la rapidité de réaction est considérée par beaucoup comme une qualité politique. Ainsi, nombre de chefs d'Etat y vont de leurs tweets (dont beaucoup sont totalement inutiles, voire contre-productifs), les élus diversent et variés montrent "leur implication dans la vie publique", les organes publics expliquent au bon peuple qu'ils agissent, les porte-paroles vont parfois même assez loin dans le privé sur les différentes plateformes, notamment Facebook. 

Mais en ce qui concerne Trump, l'on glisse plus dans la "gouvernance du tweet", car étant en guerre contre la bulle globaliste néolibérale (dite néocon aux Etats-Unis), bulle tenue par les médias qu'il qualifie de Fake News, les tweets sont alors devenus une technique de contournement. Au demeurant assez efficace dans ce cas particulier. Ce qui ne signifie pas que cette méthode puisse être efficace dans d'autres contextes. 

Trump met les "élites" globalistes face à leurs contradictions: 

Dans le cas de la guerre en Syrie, qui comporte une dimension virtuelle incontournable, D. Trump a porté les premiers coups sur ce plan, mettant les deux mondes en parallèle et les "élites" face au problème. Trois tweets en trois heures, à chaque tweet le public a le temps de la réflexion, de la réaction, de l'émotion.


Premier temps: la Russie a promis de réagir, mais nous avons nous aussi des super-armes et l'on va faire la guerre, la vraie. Pas celle confortable des divans, pas celle en col blanc des sanctions. Non, celle des bombes, des soldats, des morts et du sang. Vous l'avez dit: Assad est un monstre, "un animal", on va aller le tuer. Alors, on y va?

Premier mouvement, Trump entre la danse, puisqu'il ne peut pas l'éviter. Et il pousse le mouvement à l'extrême, à l'absurde. C'est un moyen à la fois de faire peur (but atteint) et de discréditer l'option. 

Deuxième temps: la Russie peut être un bon partenaire économique, on peut avoir des intérêts communs et arrêter l'escalade de l'armement.

Deuxième mouvement, après avoir dangereusement fait monter les enchères, Trump propose une alternative qu'il veut "win-win". Finalement nous ne sommes pas obligés de faire la guerre, la vraie, de s'y embourber, si vous le voulez on peut réagir de manière civilisée. Et pas un mot sur Assad.

Troisième temps: le problème fondamental est un problème intérieur, ces "élites" démocrates et globalistes qui constamment accusent de collusion avec la Russie au lieu de donner la possibilité au pays d'être gouverné normalement.

Troisième mouvement: l'ennemi est intérieur, il est ceux qui n'acceptent pas la victoire de Trump, la véritable alternance politique et empêche donc de gouverner normalement. La hargne déployée par les médias et les politiques contre ce président est sans précédent.

Un message à la Russie

En plus du message intérieur, deux des tweets peuvent être interprétés comme un message à la Russie.



N'oublions pas que le but de Trump est de restaurer et préserver la prééminence américaine. Or, lors du dernier discours devant le Parlement fait par le président russe V. Poutine, la démonstration dans un style post-moderne (vidéos proches d'un jeu vidéo, terminologie, concours pour trouver des noms aux armes, etc) des nouvelles armes, elles, bien réelles a mis en danger cette prééminence américaine.

Trump a d'abord attaqué sur le style "nice, new and smart". Le coup a porté, la formulation a été très mal prise en Russie. Trump se moque de la mode, cette mode qu'il ne faut surtout pas manquer. Ne pas être en retard, sur le fond certes, mais surtout sur la forme. C'est un soufflet qui a touché au but.

Sur le fond, il faut mettre les deux tweets ensemble: si vous jetez le gant, il faut aller jusqu'au bout. Sinon, vous vous pliez à nos règles politico-économiques, on stoppe le réarmement et on fait du business.

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D'une certaine manière, Trump s'est adressé aux trois forces qui lui posent problème: la Russie difficile à classer qui  ne conteste pas la globalisation que Trump combat et qui constitue un danger pour la domination américaine tout en étant un interlocuteur incontournable; les militaristes qui veulent une guerre à tout prix, oubliant les bourbiers afghan et irakien, et la différence entre se battre contre des groupuscules et une armée étatique; les globalistes des deux bords, qui font le jeu des militaristes en Syrie, alors qu'ils ont peur de la guerre réelle.

Par ces trois sorties et en différant sa décision réelle sur le conflit syrien, Trump a mis chacun face à ses contradictions. Il a porté le conflit sur le plan virtuel, permettant aux uns et aux autres d'en saisir toutes les implications, avant qu'il ne devienne réel. Si réellement ce schéma est le résultat d'une volonté politique, c'est une manoeuvre extrêmement intelligente.

Surtout qu'une forme d'équilibre des formes armées a été atteint en Syrie: les USA ne peuvent attaquer massivement le pays sans toucher la Russie et provoquer une escalade du conflit, ce que ne veulent pas les globalistes; la Russie ne peut laisser bombarder sans répondre, en coulant un bâtiment de guerre ou un avion américain, et provoquant aussi l'escalade du conflit. Cette forme d'impasse de la solution militaire peut conduire à une sortie politique sur ce dossier. Sans pour autant régler la question plus générale du rapport entre les USA et la Russie.




14 commentaires:

  1. Peut être que c'est aux uns et aux autres de saisir les implications, mais c'est Trump qui décide de se qu'il va se passer, et qui a le bouton nucléaire (sachant que d'autres l'ont aussi).

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    1. suite ...
      Le plus lamentable là-dedans c'est la médiocrité des dirigeants français, caniches qui ne comprennent rien, suivant comme des moutons somnanbules les mondialistes: "Assad doit partir", et "on va bombarder la Syrie";
      mais surtout pas: "Poutine doit partir", "on va bombarder la Russie" (idem pour la Chine). Cette Terre est une cour d'école maternelle, en plus dangereux, j'ai honte pour Sarkozy, Hollande (le néant politique incarné, eh oui c'était possible), Macron la marionnette à Attali et consors, et leurs équipes de Jacobins oligarques, ou soumis).
      Pierre Hillard distingue la mondialisation (naturelle, normale, saine?) et le mondialisme (impérialiste).

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  2. J'ai l'impression que les heures indiquees sur les tweets sont a rebours de la chronologie que vous developpez dans l'article. Est-ce un bug ?

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  3. Formidable analyse! Espérons que vous voyiez juste et que tout compte fait Trump n’attaque pas.

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    1. Sinon ...
      https://fr.sputniknews.com/international/201804121035912538-interventions-militaires-developpement-terrorisme/

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  4. Tout a fait. Trump est un Businessman aggueri. Il fait monter la tension afin d'obliger les partenaires à financer leur sécurité (comme l'Arabie Saoudite l'a fait) et les membres de l'OTAN avec le bouclier pour se protéger de la Russie. le Bexit a coûté énormément à l'Angleterre et A l'Europe d'ou par cette manoeuvre il faut fait revenir l'Angleterre dans l'EU.je crois que ce plan a marché.

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  5. Espérons que Trump va redevenir plus calme, et réaliste....c'est peut être du domaine du rêve ?

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  6. Il faut savoir une chose, c'est que ceux qui gouvernent réellement les EU haïssent la Russie.
    Trump est quelqu'un qui n'est pas fiable, qui traîne trop de casseroles. Pour sauver sa place, il a sacrifié tous les amis qui l'avaient aidé à gagner les élections, je n'en fais pas la liste elle est trop longue.
    les russes depuis qu'il est président plient sous les sanctions et les pires sont à venir. Il fait du zèle, pour montrer que tout ce qui se dit sur lui et de sa prétendue amitié avec les russes est faux.
    A la place des russes, je me méfierais terriblement.

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  7. Ce qui me gêne dans votre belle analyse est qu'elle donne quand même au final (et à votre corps défendant) l'image d'un Trump machiavélique tirant toutes les ficelles le reliant aux autres.
    Il se peut que sa démarche soit intelligente mais c'est l'intelligence de la survie laquelle doit beaucoup à l'instinct, celle par exemple du cheval qui coure sous l'orage alors que les moutons se rassemblent sous un arbre et prennent la foudre.
    Face à des forces intérieures qui veulent sa peau -et qui ont largement les moyens de l'avoir si l'on se réfère à des épisodes récurrents de l'histoire des Etats Unis- l'intelligence de ce genre de communication nous renseigne tout autant sur l'infime étroitesse de manœuvre qui reste au président de la prétendue première puissance mondiale.
    Pour donner à ce pays une politique intelligente il faudra autre chose que l'intelligence purement réactive d'un businessman.
    Vous laissez par ailleurs entendre que Poutine ne combattrait pas la mondialisation alors que Trump, lui, la combat, ce qui me paraît erroné (même si cela semble être votre cheval de bataille concernant Poutine).
    A mon avis ni l'un ni l'autre n'ont le choix puisque la mondialisation -soit le cadre général du capitalisme moderne- est déjà posé. Au moins pour la génération à venir il n'y aura d'autre choix que tenter de la reprendre à son compte pour la contrôler. Et il ne s'agit pas de résignation.
    Quand un train est lancé sans chauffeur vers une voie sans issue vous avez trois solutions :
    Accepter le crash final dans la jouissance de l'instant. Attitude du nihiliste.
    Faire sauter le train pour montrer aux autres que l'on est le meilleur dans le maniement des explosifs. Attitude du suprémaciste.
    Se faire larguer sur le convoi pour tenter d'en reprendre le contrôle (bien sûr que j'ai vu « runaway train » de Konchalovsky -avec l'excellent John Voigt- dans les années 80).
    LG

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  8. J'ai au début de son élection pensé que Trump était une sorte de Poutine américain (avec les défauts des cowboys: violence en parole, exubérance, hurlements menaçants etc.). Dans cet esprit, je trouve votre analyse très pertinente. Trump n'est pas arrivé là où il est tout seul, sans être suffisamment intelligent pour savoir à quoi s'en tenir. Faire semblant de jouer le jeu de ses adversaires est un bon moyen de les calmer et les endormir pour ensuite les abattre. Il faut bien voir enfin qu'il y a une véritable guerre interne aux plus hauts échelons de l'Etat et que Trump n'est pas tout seul loin s'en faut (tout comme Poutine ne l'était pas en 1999). Sinon il n'aurait jamais survécu.

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  9. /...les globalistes des deux bords.../

    Je peux concevoir un "globalisme anglo-saxon et sioniste" visant la mise en place d'un nouvel ordre unipolaire mondial dénommé "Nouvel Ordre Mondial" établit par la force des armes, des sanctions en tous les genres et des opérations sous fausses bannières conduites par des acteurs émérites! Mais voulez-vous me dire en quoi la Russie est dite "Globaliste"? La Russie au contraire, est en processus d'installation multipolaire; elle est en ce sens opposée au globaliste occidental à la sauce des banquiers centraux privés!

    /...et provoquer une escalade du conflit, ce que ne veulent pas les globalistes.../

    Mais voyons, les globalistes du "deep state" anglo-saxon et sioniste, bien au contraire, pour perpétuer leur système de prédation mondial, ont besoin de déclencher par tous les moyens possibles une guerre mondiale, et le plus rapidement possible!

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  10. "A son corps défendant l'auteure a essayé de dire qu'il fallait être sacrément rusé et bon manœuvrier pour aller chercher Trump et en faire un Président Et encore plus de l'y maintenir, chose qui prend le bon" chemin au vu de tous les guet-apens qui lui furent rendus jusqu'à l'heure actuelle
    Trump comme sa communication représentent un "concept". Seulement ou presque. Salutations

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  11. Pas trop convaincu par votre analyse sur ce coup là

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  12. Oui, cela rejoint les analyses du cas Trump de Scott Adams (auteur de Dilbert). Il était un des premier a décoder le modus operandi de Trump, qui applique des techniques de persuasion plutôt que de communication. Sa méthode la plus utilisée, sortir une grosse connerie, c.à.d. une proposition outrageante et ensuite mettre de l'eau dans son vin. Ça permet d'atteindre dejà partiellement le but visé et surtout l'outrage permet de gagner l'attention dès le départ.

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