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mercredi 5 juin 2019

Vers l'ukrainisation de la France ou qui est finalement bâillonné ?



Mathilde Panot, député LFI, s'est bâillonnée à la tribune de l'Assemblée nationale pour dénoncer la réduction du temps de parole des députés en fonction des groupes parlementaires. Visuellement, en effet, ça porte. Mais du point de vue de la qualité du débat politique, l'on peut s'interroger sérieusement quant à la dégradation, la transformation des débats parlementaires en clownerie de bas étage. Si cette tendance a toujours existé, le niveau général baisse dangereusement et n'est pas sans rappeler le cas ukrainien. Pour autant, la France n'a pas eu besoin d'un Maïdan pour détruire ce qui reste de ses institutions étatiques, l'élection de Macron a été suffisante. A moins qu'elle ne soit justement ce "Maïdan français", ce putsch destructeur antiétatique largement soutenu par différents groupes d'intérêts mondialisés.


La député LFI Mathilde Panot a décidé, assez paradoxalement, de choisir le geste, la posture, la mise en scène, pour dénoncer le manque de possibilités de parole. Réduisant par la même la portée de la parole.


Sur le fond, l'on serait tenté de dire que ce genre de comportement justifie justement le temps de parole des politiques, qui réussissent à concentrer leur message dans un selfie, un tweet ou un geste. La profondeur et la nuance de l'argumentation sont adaptées aux exigences de l'époque : allons droit au but, pourquoi ennuyer chacun avec de grands discours ?

Ce réductionnisme, ou minimalisme politique, fait penser à l'évolution de la politique ukrainienne, inévitable lorsque les partis politiques et leurs membres sont fantoches. Ce député ukrainien qui apparaît, par exemple, avec des gants de protection verts à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Au lieu d'un discours convenu sur la "responsabilité russe" dans l'affaire Skripal, dont aucun média n'aurait parlé, il met ses gants, les montre à la caméra et fait la Une. Un instant. Ce qui est suffisant et dépasse même sa valeur politique. C'est sa seule façon possible d'exister politiquement.

Le non-professionalisme des politiques, avancé comme un avantage, montre ses limites. La politique est un métier, un art, qui s'acquiert avec le temps, l'expérience ... et ne peut être sans culture. Au lieu de cela, nous avons droit à des discours formatés sur le modèle ukrainien : des institutions étatiques dépassées, rendons le pouvoir au peuple, à la jeunesse, pour un avenir (forcément) meilleur. Ce sont les slogans lancés dans le cadre, non pas de la Rada ukrainienne (ils existèrent avant le Maïdan), mais à l'Assemblée nationale, si vous écoutez cette vidéo, lancés pour justifier une VIe République et la mort de la Ve.

C'est amusant cette manie, légèrement infantile et largement populiste, de faire porter le dysfonctionnement des institutions non pas sur ceux qui y siègent, mais sur le système institutionnel lui-même. C'est vrai, c'est plus facile et plus vendeur. Les institutions françaises ne fonctionnent plus? Oui. Mais en quoi une VIe République peut-elle sauver miraculeusement la situation ? En rien. 

Nous avons déjà eu droit au slogan selon lequel il faut des figures neuves, qui n'ont jamais fait de  politique, pour que tout à coup la voix du peuple arrive au sommet et que nous vivions dans un monde merveilleux. Nous avons ainsi eu Macron et sa bande de vieux nouveaux et de jeunes incompétents. Nous avons ainsi eu une Assemblée nationale totalement incapable, avec un niveau de réflexion politique qui n'atteint même pas celui du café du commerce, où au moins les gens savent de quoi ils parlent, car ils sont confrontés à la rie réelle et à ses difficultés. 

Une assemblée constituante pour créer les institutions parfaites d'une VIe République idéale ? Fabuleux. Et qui va y siéger ? Des gens ordinaires, car il faut rendre la voix au peuple. Génial. Donc, des groupes d'intérêts vont téléguider cette "voix populaire", tout simplement car l'organisation institutionnelle, l'équilibre entre les institutions, les garanties d'indépendance et de coordination demandent des connaissances extrêmement pointues, si l'on sort du populisme basique. Donc qui va finalement y siéger ? Les anciens, dont on ne veut plus car ils sont anciens ? La "jeunesse", car elle est jeune ? Ou des génies tout aussi inconnus que spontanés qui vont sauver le pays ?

Le problème vient-ils donc des institutions étatiques ou des gens qui les occupent ? Mais il est plus facile de casser un système étatique, comme en Ukraine, au cri de rendre le pouvoir au peuple pour l'avenir meilleur d'une jeunesse salvatrice, que d'instaurer, préserver, renforcer un système de professionnels. Le problème vient-il de l'institution présidentielle, qui permet de gouverner réellement dans la tradition française et non parlementaire anglo-saxonne, ou bien de la personnalité - Macron - qui l'occupe et qui la discrédite ? Le problème du présidentialisme vient-il du fait qu'un homme fort gouverne au lieu des consultations permanentes d'une mythique "société civile" (qui est-ce? qui représente-t-elle? Qui lui donne le pouvoir de représenter quels intérêts?) ou plutôt du diktat de la dilution de l'Etat dans le cadre globaliste de l'Union européenne il faille absolument casser cette Ve République, qui, même théoriquement, reste dangereuse, pour éparpiller un pouvoir illusoire entre des parlementaires incompétants, afin que, réellement et définitivement, les décisions soient prises ailleurs ?

C'est en tout cas le seul "horizon" réel, l'abandon de souveraineté (de ce qui en reste), vu la configuration politique interne et internationale, qui nous attend si l'on casse définitivement les institutions de la Ve République. L'Ukraine est décidément l'avenir de l'Europe.

8 commentaires:

  1. Ouf !

    Dur, dur, votre billet ce matin. D'autant plus dur qu'il me semble tout à fait juste.

    S'il y a un espoir à y trouver, c'est que d'évidence cette clownerie ubuesque n'est en rien représentative des véritables attentes de la population qui finira bien par la rejeter complètement. N'est-ce pas ce qui motive déjà les Gilets jaunes ?

    Il faudra voir la suite de leurs manifestations, mais six mois dans la rue n'ont pas éteint leur motivation ni leur refus d'être menés comme on mène un troupeau. Si leur mouvement s'épuise, je crains fort que ce ne soit pour revenir avec plus de détermination et, faut-il le craindre, de brutalité.

    L'aveuglement des bonzes du pouvoir et leur entêtement à ne rien changer comporte désormais une forme de responsabilité criminelle devant un danger devenu national. Ils devront en répondre devant l'histoire.

    Bonne journée quand même Madame Bechet-Golovko.

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  2. Ben oui mais une fois que l'on a constat8 la faible valeur des hommes ou des femmes et qui par là mettent à mal les institutions on fait quoi?
    Ne peut on pas imaginer mettre en place in système qui laisse moins de place à quelques uns au risque qu'il soit médiocre, et donc repenser nos institutions et redonner un sens commun à notre pays qui est en train de sombrer dans des particularisme précurseur d'antigonisme entre communautés générateurs de guerre civile

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    1. Vous êtes justement dans l'erreur classique de croire que les institutions seules peuvent tout arranger et auraient le pouvoir miraculeux de faire sortir les hommes valeureux.
      J'ai eu l'occasion de parler longuement de cela avec Etienne Chouart jadis sur un forum, et il m'avait paru complètement bloqué sur cette illusion qui est en fait une illusion de juriste.
      Les lois ne font pas plus les hommes que les traités ne fondent des nations ex-nihilo -le « patriotisme constitutionnel » d'un Habermas, qui avait inspiré le traité européen de 2005, relève dans le même ordre d'idée d'une incongruité totale.
      L'état idéal d'un Chouart est celui où les tirés au sort devront s'en remettre encore plus que dans le nôtre au savoir faire des techniciens pour élaborer leurs lois, c'est-à-dire en fait aux hommes de cabinet et aux technocrates.
      Il pense pouvoir palier cet inconvénient par un autre pouvoir de contrôle miraculeux, celui de « commissions » omniprésentes, soit encore plus d'inflation de ce que De Gaulle appelait les « comités Théodule ».
      Les membres de ces commissions seraient de plus forcément des personnes disposant et du temps libre pour y participer -si on les imagine en plus non-professionnelles- et surtout du niveau d'instruction nécessaire, ce qui ne fera pas forcément l'affaire de Mme Michu du peuple d'en bas.
      « Qu'est-ce que l'on fait ? » dites-vous. Si vous ne le savez pas, il n'y a aucune institution qui le fera à votre place.
      Je n'y peux rien, il n'y a jamais de miracle. Ce sont les temps difficiles qui forgent les hommes de valeur, leur donnant la volonté de créer des institutions qui leur permettent d'agir. Pensez à la génération -gauche et droite confondue- qui est sortie de la seconde guerre mondiale.
      Aucun RIC à propos de tout et rien ne remplacera la trempe humaine et ne sauvera les générations naïves, velléitaires et molles qui ont suivi (à commencer par la mienne, celle des baby boomer).
      Mais je reste optimiste. Faites donc confiance au tragique de l'histoire. C'est lui qui vous (nous) sauvera et notre (très bonne) constitution d'un même mouvement.
      Rein d'autre à ajouter à l'excellent article de Mme KBG (pardon pour le sigle, dont je viens de m'apercevoir qu'il en rappelle fâcheusement un autre, surtout par les temps hystériques qui courent).
      La Gaule

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    2. Et là boucle est bouclée : les hommes de valeur créé les institutions qui leur permettent d'agir

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  3. j’ignorais jusqu’ici que la 5ème république vous tienne tant à coeur ! Née d’un coup d’état gaulliste suivie d’une guerre civile approuvée certes par le peuple mais après deux longues guerres coloniales meurtrières et non pour la prévalence du président sur l’assemblée nationale : une démocratie réduite où un Macron est le seul des présidents au monde, intouchable (« qu’ils viennent le chercher » dit-il bravache pour avoir mis Benalla au centre du pouvoir) !!!

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    1. ''''Née d’un coup d’état gaulliste suivie d’une guerre civile approuvéE certes par le peuple''''.

      Ah bon ! Pour affirmer que les événements qui ensanglantaient le pays à l'époque étaient « approuvés par le peuple » vous aviez quel âge en 1962 ?
      J'admets volontiers le « coup d'état » et j'ai envie de vous dire « et alors ? », l'histoire révolutionnaire de la France n'étant faite que de cela. Mais y avait-il une autre porte de sortie dans le contexte de la quatrième république dont la gestion de la crise algérienne avait été calamiteuse ?
      Souvenez-vous de l'épitaphe de Pierre Viansson Ponté sur ce régime, lequel fut non pas assassiné mais « euthanasié ».

      '''mais après deux longues guerres coloniales meurtrières ''''

      Concernant la seconde nous étions encore en plein dedans, ce qui change tout dans la mesure où le pays menaçait de basculer dans la guerre civile sur le territoire métropolitain à tout moment.
      Il fallut toute l'habileté tactique de De Gaulle pour éviter l'écueil (je répète que j'admets le « coup d'état » au moins formellement légal). Mais cela n'était pas gagné d'avance.

      ''''...et non pour la prévalence du président sur l’assemblée nationale''''

      Cette question fut réglée par référendum et par le peuple en 1962. Toute la polémique de l'époque tourna sur le fait que la majorité des élites désapprouvèrent le président de s'être adressé directement au peuple sans l'avis du parlement.
      En tout cas les résultats eux étaient sans ambiguïté -près de 68 % pour De Gaulle.

      '''...un Macron est le seul des présidents au monde, intouchable'''
      C'est le cas de tous les régimes présidentiels, regardez pour exemple les États-Unis.
      La différence est que si De Gaulle était intouchable, il n'était pas écrit que le parlement fut obligatoirement à sa botte -les législatives de 1967 furent d'ailleurs tangentes. Plus tard, le cas de figure de la cohabitation s'imposa d'ailleurs naturellement au français et ce furent encore une fois les élites qui en contestèrent le principe.
      C'est bien l'institution du quinquennat qui a transformé le parlement en chambre godillot, ce qui était une trahison complète de l'esprit originel de la cinquième république.
      Il est coutumier de dire que la cinquième république était taillée pour de Gaulle seul et certains s'en plaignirent beaucoup. Les américains en général et leurs relais atlantistes en France en particuliers.
      Comme je le disais plus hier plus haut, l'on en revient toujours aux hommes... Et à ceux qui les élisent.
      En 1969, lors du référendum qui le mit à bas, même pour une voix, De Gaulle aurait tout de même démissionné.
      LG

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  4. je n'espérais qu'une réponse de Karine Bechet-Golovko que j'estime pour les nouvelles de Russie qui se font rares ici et malveillantes. La polémique sur sa page n'est pas mon objectif. Pour info, dans la vie active depuis 1945 à l'âge de 14ans sur la chaîne des snowboot chez Bata, devinez où j'ai pu être au moment où Jean-Marie Le Pen maniait avec dextérité la "gégène" en Algérie ?

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    1. Aucune idée où vous pouviez être mais, pour votre information, moi je suis pied noir et j'ai quarante sept ans d'activité dans un domaine (l'hôtellerie restauration) qui n'est pas une sinécure non plus.
      Si la polémique ne vous intéresse pas ce n'est pas la tonalité de votre court billet qui le donnait à penser, ce qui n'est d'ailleurs pas un reproche, vous vous exprimez comme vous voulez.
      Les éléments que je vous ai opposés sont logiquement tout aussi polémiques mais ils sont argumentés.
      Opposez moi donc vos arguments ou faites suivre vos interventions de la mention : « je n'ai pas envie que l'on me réponde sauf x ».
      Enfin, le sujet explicite était De Gaulle, pas Le Pen, ces deux là étant à l'époque peu susceptibles d'aller en week-end ensemble au Petit Clamart.
      Il faudra aussi être capable de sortir des histoires de gégène et de nez coupés (les fumeurs de tabac français sanctionnés par les sicaires du FLN) dès qu'il est question de l'Algérie.
      Moi, je suis prêt à en sortir. Et vous ?
      LG

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