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jeudi 19 septembre 2019

Le Donbass et la formule Steinmeier : ou comment transformer le conflit intérieur ukrainien en y intégrant la Russie



Zelensky poursuit un jeu intéressant au sujet du Donbass, démontrant ainsi que la stratégie atlantiste a encore une fois changé : comme il devient de moins en moins crédible de jouer la carte de l'armée russe en Ukraine, que tous les satellites ont cherchée sans jamais trouver, et face à la fatigue générale à l'égard d'un conflit qui s'est enlisé, il est fondamental de déplacer ce conflit sur le plan politique - conduire la Russie à lâcher le Donbass, évidemment en y mettant les formes. Ce qui porterait un coup très fort à son image sur la scène internationale, sans parler des conséquences politico-judiciaires.


Au-delà de la propagande officielle, peu son ceux, parmi les décideurs, qui croient réellement à la présence de l'armée russe dans le Donbass, tout autant qu'à la soi-disant volonté de celle-ci de s'emparer de l'Ukraine par les armes. La rhétorique est usée, elle a épuisé son potentiel géopolitique, il est temps d'en changer.

Or, une usure objective s'installe face à un conflit enlisé, sans perspective d'évolution réelle : l'Ukraine ne peut politiquement se permettre une attaque sanglante, les nouveaux dirigeants du Donbass ne sont pas les révolutionnaires des premières heures et ont (toujours eu) d'autres priorités. En Russie aussi, qui n'a jamais eu l'intention d'intégrer le Donbass, certaines "Tours du Kremlin" sont assez peu favorables à continuer à soutenir, même techniquement, un territoire alors que la situation ne se résoudra pas rapidement d'un coup de baguette magique, la vision stratégique étatique étant ici totalement absente. 

D'une manière générale, il est important pour le clan atlantiste de "gommer" le Donbass, pour transformer le conflit, le faire passer d'une guerre civile à un conflit entre l'Ukraine et la Russie. Cela se passe déjà devant la CEDH, où l'Ukraine efface le Maïdan pour faire découler la Crimée d'une agression russe (voir notre texte ici). Encore plus directement, l'échange de "prisonniers" entre l'Ukraine et la Russie a ouvert la voie, a montré la possibilité de s'engouffrer dans cette erreur stratégique (voir notre texte ici).

La fameuse "Formule Steinmeier", selon laquelle le statut spécial du Donbass serait temporaire jusqu'à des élections pour ensuite devenir définitif après le contrôle de l'OSCE, retient toutes les attentions - prêtes à tourner la page. Le fait même d'un statut spécial pose des difficultés à l'Ukraine, car si la Crimée a pu si facilement partir, c'est aussi parce qu'elle avait des institutions autonomes qui fonctionnaient. Mais cette formule est aussi intéressante car elle permet de récupérer le territoire, alors, depuis Kiev, les messages favorables à sa reconnaissance se multiplient, mais pourtant elle n'a pas été signée à Minsk, lors de la réunion du groupe de contact avec les représentants du Donbass.

Pourquoi ? Parce que l'Ukraine ne veut pas signer avec les représentants du Donbass. Elle est prête à reconnaître un statut spécial, de toute manière elle n'a pas le choix, c'est ça ou le conflit continue à pourrir et la population ukrainienne est fatiguée elle aussi. Elle peut ainsi récupérer ses frontières. Mais elle doit obtenir un avantage politique qui fasse contrepoids : faire reconnaître le conflit avec la Russie. Pour cela, discuter et signer cette formule avec la Russie et pourquoi pas au Format Normandie, serait un coup d'éclat de plus de la diplomatie des conseillers atlantistes de Zelensky. Et ce serait un coup extrêmement dur pour la Russie, tant politiquement sur la scène internationale, qu'au regard de toutes les conséquences juridiques et financières qui en découleraient devant les instances internationales.

Alors, pour appâter, Zelensky fait de la surenchère, il faut totalement retirer les forces militaires sur toute la ligne de front et pas seulement en quelques points précis. Et nous en parlerons lors de la réunion du Format Normandie.

Car cette réunion est fondamentale pour transformer le conflit. Or, après le refus de Kutchma de signer à Minsk le statut spécial du Donbass (à l'intérieur de l'Ukraine), la Russie estime que la réunion du Format Normandie est compromise. Il serait d'ailleurs souhaitable qu'elle ne change pas de position.

Le jeu du bâton et de la carotte se met en place, certes de manière un peu primaire. D'une part, Zelensky menace de revenir à l'idée d'une mission d'observateurs de l'ONU sur tout le territoire du Donbass si ça ne marche pas comme il veut. Autrement dit, il menace de bloquer à nouveau le processus, puisque cette décision concernant les observateurs ne peut être prise sans l'aval de la Russie qui, à juste titre, d'y oppose. D'autre part, son ministre des affaires étrangères estime qu'il est plus logique de discuter de la Formule Steinmeier lors du Format Normandie. Ou comment faire semblant d'ouvrir une porte particulière après les avoir fermées, ce qui ressemble à s'y méprendre à la stratégie américaine.

Les cartes sont distribuées. A suivre.

5 commentaires:

  1. Je pense qu'échanger des prisonniers entre l'ukraine et la russie est une erreur car on pourrait penser que la russie est partie prenante dans le conflit.
    Tout comme proposer des s400 a l'arabie seoudite.
    Je veux bien que je n'ai pas tous les elements pour comprendre,mais j'ai le sentiment que la russie lache du lest et on sait comment cela est interpétée par les usa et ses soutiens.
    Bref,c'est incompréhensible a mes yeux

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    1. Pour l'échange, je pense comme l'auteur de l'article que c'est un jeu dangereux. Surtout qu'il faut noter que l'Ukraine à échanger ... des citoyens ukrainiens dans son lot de "prisonniers".
      Pour les S-300/S-400 et l'Arabie saoudite, il n'y a aucune raison de trouver cela erroné.
      Pourquoi ?
      Parce que la Russie parle à tout le monde dans la région. Et c'est bien le seul pays à pouvoir le faire.
      Parce que si les pays de la région se dotent de cette arme alors on arrive à une sorte d'équilibre stratégique.
      Parce que ça fait rentrer du pognon en Russie.
      Parce que ça fait la nique (en partie) à Yankeeland.
      Parce que les symboles sont importants en politiques et plus encore stratégiquement.

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    2. @ 19/09 15:31
      Vu du côté des prisonniers, c'est tout sauf une « erreur ». Surtout pour ceux qui étaient dans geôles du SBU ou entre les griffes des ultra-nationalistes !

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  2. Vous croyez vraiment que les russes sont assez bêtes pour signer à la place des représentants du Dombass et, ainsi, endosser la responsabilité de tout ce qui s'est passé entre l'Ukraine et cette région? Mais pas un russe ne pardonnerait à Poutine une pareille faute. Ne serait-ce que pour les victimes, les russes doivent se montrer inflexibles et exiger de l'Ukraine, qui n'a jamais cessé ses agressions contre le Dombass, de respecter les accords qu'elle a signé.

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  3. Dans un combat, il y a des points marqués d'un coté comme de l'autre. Il faut faire preuve de résistance comme on dit aux échecs, de l'endurance en sports.
    C'est nécessaire pour mener le combat, indispensable pour le gagner.

    Visiblement le clan USA-OTAN-UKR gagne une manche. Ils ont bien compris puisque ils refont le plein de prisonniers et continue de bombarder impunément.

    Il faut exposer leurs crimes, cela n'a pas d'équivalent en diplomatie ou en business.

    Je vous remet quelques liens dessus:

    https://fr.sputniknews.com/international/201907181041710145-les-anciens-detenus--dune-prison-secrete-ukrainienne--racontent-les-horreurs--de-la-bibliotheque--/

    https://www.fort-russ.com/2019/07/shocking-torture-and-kidnapped-people-who-is-ukraine-hiding-in-its-secret-prisons/

    https://www.fort-russ.com/2019/07/major/


    La prochaine manche se jouera lors du (non)renouvellement du contrat de livraison de gaz. Si la Russie décide de vendre du gaz (et a prix d'amis) alors la oui, ça sera clairement une défaite.

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