V. Surkov, conseiller du Président Poutine pour l'Ukraine
Vendredi soir, dans la région de Kaliningrad, se sont entretenus V. Nulland, l'envoyée du Département d'état américain pour les affaires européennes et eurasiennes et V. Surkov, conseiller du Président russe pour l'Ukraine. La surmédiatisation de cette rencontre sans rien dévoiler du fond laisse entendre qu'un tournant est encore une fois pris dans le processus de résolution de la crise ukrainienne. Mais lequel et à quel prix, cela reste à découvrir.
Lors de leur conversation téléphonique, les présidents américains et russes, le 13 janvier, ont décidé d'une réunion des leurs représentants à Kaliningrad pour tenter de trouver des points d'achoppement sur la crise ukrainienne.
Cette réunion eut lieu le vendredi soir suivant et dura 6 heures. Sans journalistes, sans conférence de presse à la fin, seule une déclaration affirmant que cette conversation fut constructive et apporta beaucoup d'idées qui pourront être discutées lors de la réunion du groupe de travail sur le Donbass (auquel formellement ne participent pas les Etats Unis).
Evidemment, tout de suite, deux réactions se sont faites savoir. La première, la plus forte, est que le Kremlin se prépare à se débarrasser du Donbass, qu'il le négocie car cela lui coûte trop cher financièrement avec la crise sans plus value politique et, sur le plan médiatique, son engagement en Syrie permet de faire diversion dans l'opinion publique.
La seconde est que les Etats Unis et la Russie se réunissent pour faire pression sur l'Ukraine afin qu'elle exécute enfin les accords de Minsk, puisque déjà depuis quelques temps les Etats Unis insisteraient en ce sens auprès du président ukrainien. Cela concernerait essentiellement, dans un premier temps, l'arrêt total des tirs et l'adoption de la réforme contitutionnelle, avec le statut spécial permanent pour le Donbass.
Il est intéressant, comme le relève l'analyste politique Sokolov, que les interprétations sur la politique du Kremlin tombent toujours dans deux écueils. Qu'il s'agisse de l'arrestation, alors, de Khodorkovsky et immédiatement une partie attendait la fin du règne des oligarques, qui se portent toujours à merveille merci pour eux, une autre partie annonçait que le régime allait remettre en cause la propriété privée, qui n'a évidemment pas été touchée. De même avec la Crimée, certains se sont pris à rêver à la restauration des frontières vers Novorossia et la récupération des territoires ukrainiens, d'autres criaient à l'invasion nazie de 1938. Dans tous les cas, la vérité s'est trouvée ailleurs, dans la défense des intérêts russes. Le pouvoir se refuse à intervenir, tant qu'une frontière n'est pas franchie. Khodorkovsky l'a franchie en soustrayant son business à la juridiction nationale russe, l'Ukraine aussi en lançant un gouvernement révolutionnaire anti-russe remettant en cause la présence russe en Crimée et la base militaire de Sébastopole. Des intérêts vitaux ont été touchés, la réponse fut immédiate, forte et sans appel. Et la Russie n'a pas modifié sa politique à l'égard des autres pays européens de l'Est. Aucune invasion n'est prévue, ni en préparation, sauf dans l'imaginaire politique de certains dirigeants qui en ont besoin pour justifier leurs choix politiques nationaux, mais là c'est une autre question qui ne dépend pas de la Russie.
Maintenant, que signifie cette réunion Surkov-Nulland? Une chose est sûre, la Russie n'a pas et n'a jamais eu l'intention d'intégrer le Donbass, qui pour elle doit faire partie d'une fédération ukrainienne. Son intérêt ici est évident: il faut aider les habitants, car humainement on ne peut les laisser se faire massacrer ni mourir de faim et de froid, ce qui n'implique pas d'intégrer tous les peuples qui veulent faire secession. Sur le plan politique, la Russie a besoin que le Donbass reste en Ukraine, pour être une zone tampon pro-russe à sa frontière et pour que le Gouvernement ukrainien ne puisse développer une politique totalement anti-russe qui serait dangereuse pour sa sécurité nationale. Sans le Donbass, Kiev a les mains libres pour radicaliser, si cela est encore possible, sa politique russophobe et son nationalisme des années 30.
Pour autant, la Russie ne peut le négocier à la légère et les sous-entendus du journal d'affaires russo-américain Vedomosti est significatif. Certes, la rencontre a été considérée comme efficace et d'une manière générale Washington a remarqué que la Russie fait des efforts sérieux afin de trouver une sortie de crise en Ukraine. Il pourrait en découler une levée des sanctions dans l'année 2016.
Et c'est ici qu'il faut faire très attention. Négocier le Donbass contre la levée des sanctions serait une erreur fondamentale pour la Russie. Tout d'abord, car il faut trouver un moyen pour le faire accepter par la population du Donbass, qui se fait toujours frapper par les forces militaires ukrainiennes et n'accepte pas l'idéologie ultranationaliste qui se propage comme un poison dans la politique du pays. Ensuite, il n'est, peut être étrangement, pas du tout dans l'intérêt de la Russie que les sanctions soient levées dans ce contexte géo-économique, alors que cela entre tout à fait dans l'intérêt des Etats Unis. Le dollar est faible, le prix du pétrole en chute libre, le budget russe a du mal à se remplir et le rouble plonge. Face à cela, les sanctions jouent un rôle protecteur pour le marché russe, qui peut enfin se développer et se construire, contrairement aux années 90 où l'ouverture brutale avec une monnaie faible et un barile encore plus bas qu'aujourd'hui avait totalement tué le marché russe. Le pays a besoin de se réindustrialiser et il ne peut le faire dans ces conditions qu'à l'abris des sanctions, qui le protègent et obligent les acteurs à se concentrer sur la production et non sur l'achat pour revente.
Si les Etats Unis retirent leurs sanctions aujourd'hui, la Russie sera bien obligée de le faire aussi, ce qui mettra le marché intérieur en péril et les producteurs nationaux auront du mal à tenir la concurrence, c'est encore trop tôt.
Autrement dit, si la Russie a besoin de sortir, comme les Etats Unis par ailleurs, du conflit dans le Donbass, elle ne peut laisser un conflit ouvert, simplement sans elle, la Russie doit participer à sa résolution, et cela dépend non seulement de la situation dans le Donbass mais aussi du paysage politique à Kiev. Les Etats Unis peuvent se reporter sur l'UE, qui est censée récupérer l'Ukraine et devoir se débrouiller avec elle pour la reconstruire. Il n'est pas certain que l'UE en ait les moyens, ni l'envie, mais elle ne maîtrise pas tous les choix de sa politique. Or, la Russie ne peut se défausser sur personne pour le Donbass, l'OSCE n'est pas une solution.
Bientôt, les ministres des affaires étrangères russes et américains doivent se rencontrer, nous verrons alors un peu quelle voie de sortie de crise est envisagée.
Dans les années 1980 lorsque le gouvernement a levé l'interdiction contre les entreprises privées, Sourkov a commencé dans les affaires. Il est devenu chef du département de publicité de Mikhaïl Khodorkovski entreprises. De 1991 à Avril 1996, il a occupé des postes de direction clés dans la publicité et de relations publiques des départements de Khodorkovski Banque Menatep. De Mars 1996 à Février 1997, il était à Rosprom et depuis Février 1997 avec Mikhaïl Fridman l 'Alfa-Bank. En Septembre 2004 Sourkov a été élu président du conseil d'administration de la société de produits pétroliers de transport Transnefteproduct, mais a été chargé par le Premier ministre russe, Mikhaïl Fradkov, à renoncer à la position en Février 2006.
RépondreSupprimerle plus pitoyable est que l'EU n'existe pas elle n'est pas consulté , comme le disait nuland l'EU rien a foutre, voila ou nous s'en somme.
RépondreSupprimerje suis français et je confirme que pour moi aussi l'UE rien à foutre :)
SupprimerQue ce soit Madame Nuland qui se déplace pour négocier une sortie de crise concernant le Donbas en dit long sur l'implication de Washington dans les évènements qui ont mis Porochenko au pouvoir...
RépondreSupprimerElena