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mardi 19 mai 2015

L'Ukraine et les lois de décommunisation patriotiques

Image illustrative de l'article Armée insurrectionnelle ukrainienne

Le 9 mai, évidemment ce ne pouvait et ne devait être un autre jour, la Rada a adopté les lois de décommunisation, qui interdisent l'utilisation de la symbolique communiste et mettent au même niveau nazisme et communisme. Mais comme il ne s'agit pas de lutter contre le nazisme, l'UPA ou Armée insurrectionnelle ukrainienne, branche de l'armée nazie, est consacrée armée de libération. Autrement dit il ne s'agit pas de décommunisation mais de désukraïnisation.


Le 9 mai, la Rada adopte par une majorité de 254 députés (la majorité est à 226 voix) le projet de loi sur l'interdiction de la propagande des régimes communismes et nazis, mettant formellement sur le même plan ces deux régimes, ce qui est devenu très à la mode dans les milieux révisionnistes. Mais comme ils deviennent nombreux, il n'est plus de bon ton de les appeler révisionniste.  Si ce mouvement concernait réellement une tentative de lutter contre le nazisme, nous n'aurions pas vu le même jour, la signature par le Président du projet de loi faisant des nazis de l'Armée insurrectionnelle ukrainienne des héros de la lutte nationale. Ces lois sont entrée en vigueur le 15 mai, lors de la signature présidentielle.

Tout d'abord, en ce qui concerne la "décommunisation". Selon le projet de loi, il sera désormais interdit de faire publiquement la propagande de ces régimes totalitaires, d'utiliser publiquement leur symbolique. Cela concerne les personnes morales, les partis politiques, les masses médias, qui peuvent se faire interdire et fermer sur ce fondement. 

Concrètement, les partis politiques et les associations ont un mois après l'entrée en vigueur de la loi pour mettre leurs statuts en conformité. Les commerçants qui utilisent les symboliques interdites ont 6 mois pour les modifier conformément à la loi. Les médias qui faisaient de la propagande pour le communisme ou pour le nazisme doivent arrêter leur activité, modifier les symboles utilisés et se réenregistrer. Ici, l'on peut s'interroger sur l'ampleur de l'impact que cela aura sur ce qui reste de liberté de la presse, lorsque l'on sait que le simple fait de montrer des images de la télévision russe est considéré comme une trahison. Cet aspect, d'ailleurs inquiète le représentant de l'OSCE pour la liberté d'information, qui critique Poroshenko pour avoir signer des lois qui portent potentiellement atteinte à la liberté d'expression.

Mais cette loi va concerner également le démontage de tous les monuments historiques dédiés à la période soviétique, à la seule exception - théorique - des monuments dédiés à des personnalités soviétiques ayant participé au développement des arts et de la culture ukrainienne. Ainsi, il ne sera plus nécessaire de les attaquer la nuit à la massue, les municipalités ont 6 mois pour légalement tout démonter. Et enfin ces municipalités ont également 6 mois pour présenter à la Rada une liste de noms de communes qu'il faut modifier, car lié au passé soviétique.

Памятник "Родина-мать" в Киеве

De cette manière, l'Ukraine veut abolir une partie d'elle-même. Un peu comme ces maniaco-dépressifs qui se mutilent volontairement en pensant se sentir mieux après. Et comme ensuite ils ne se sentent pas mieux, ils recommencent et recommencent, jusqu'à ce qu'on les arrête ou jusqu'à ce qu'ils en meurent. Car en voulant rejeter son passé, en reniant son appartenance viscérale presque charnelle au Monde russe, l'Ukraine se renie elle-même. Elle ne sera pas plus européenne de cette manière, elle sera simplement déracinée et affaiblie.

Cette hypocrisie est flagrante lorsque l'on considère l'adoption le 9 avril par la Rada de la loi faisant des barbares de l'Armée insurrectionnelle ukrainienne des héros de la libération nationale. Loi que le Président ukrainien Poroshenko vient de signer avec les autres. 

In article b083e59ccb

Sans même insister sur le fait qu'ils devront sérieusement revoir leur symbolique nazie, on rappellera brièvement, car nous avons déjà traité cette question ici, que ces charmants "combattants" dépendaient, lors de la Seconde Guerre Mondiale, de l'armée allemande, qui ensuite s'est débarrassée d'eux. Ils se sont donc, pendant ces glorieuses années, retournés contre les populations juives et polonaises et ont fait près de 200 000 morts. Ce qui explique la réaction quand même un peu tendue de la Pologne face à ces textes. A partir de 1946, ils ont commencé à "collaborer" avec les services français, britanniques et américains et leur combat contre le pouvoir soviétique s'en est d'autant plus renforcé. Bref, quand Poroshenko, sans sourciller affirme que cette Armée insurrectionnelle ukrainienne et le nouveau héros ukrainien Bandera, avaient ouvert un "nouveau front contre le fascisme", il faut être totalement amnésique et stupide. Cette armée dépendant de l'armée allemande, elle ne combattait pas le nazisme, elle était financée par les nazis pour combattre l'Ukraine. Etranges héros ...

Poroshenko est en train de finir ce que Bandera n'avait pu faire: définitivement détruire l'Ukraine. Et cela très facilement en instaurant un "Jour de la réconciliation entre les assassins et les victimes". Non, ce n'est pas une plaisanterie. Juste deux remarques. Si les membres de l'Armée insurrectionnelle ukrainienne sont des héros libérateurs qui ont combattus le nazisme, pourquoi ce "jour de la réconciliation" et pourquoi des "assassins" et non pas le jour de la célébration des héros nationaux ... Deuxième remarque, si la réconciliation nationale est toujours importante après les conflit internes violents, la théorie de justice réparatrice, technique anglo-saxonne très efficace aujourd'hui en tant que technique de destructuration nationale - un peu comme une psychanalyse sans fin imposée à la société - oblige cependant, premièrement, à reconnaître les bourreaux et à les appeler comme tel et non comme héros, deuxièmement, engage le pardon lorsqu'il y a reconnaissance des erreurs et crimes commis et volonté de réparer par les responsables. Or, ici, il s'agit pour les victimes de reconnaître le droit des assassins à devenir des héros nationaux à leur détriment. La réconciliation nationale ne se fait pas sur le fondement de la reconnaissance des fautes passées et de la demande de pardon, mais sur le fondement d'une réécriture de l'histoire qui frise avec la schizophrénie, obligeant les victimes à bien voir des bourreaux en leurs bourreaux, mais à les appeler héros.

Il est difficile d'imaginer comment la société ukrainienne pourra survivre à cette folie. 


2 commentaires:

  1. Et difficile d'imaginer comment l' UE, si prompte d'habitude à monter au créneau pour défendre les valeurs civilisationnelles européennes, peut tolérer cette ignominie!

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  2. Je ne sais pas si Porochenko sera président de l'Ukraine pour encore longtemps ou bien juste le temps que les Américains procèdent au remplacement de tout le gouvernement avec ses ministres de la Junte ukrainienne.
    En fait, maintenant, le gouvernement ukrainien est en sursis et il est locataires des pouvoirs étatiques.
    Si demain, il doit être démis, je pense qu'il le sera, il faudra bien trouver une parade pour absoudre les crime qu'il a commis, peu importe si le cerveau et les commanditaires sont des étrangers au pays, peu importe s'il n'a été que les bras tueurs. Dans tel cas, le président Porochenko et tous ses ministres sont passibles de poursuite pénale sur le plan international.
    En décidant de promulguer une loi qui interdit le nazisme et le communiste, la Junte fait d'une pierre, deux coups: blanchir leurs nazis et incriminer les communistes dans le but de les empêcher de leur fairele procès de crimes (plusieurs d'entre eux ont été torturés, enlevés et assassinés) contre l'humanité. Vu que les communistes vont se trouver dans l'obligation de se battre juridiquement pour faire reconnaître leur droit d'association et de participation à la vie politique garantis par les Droits de l'Homme, il différeront l'autre combat.

    Depuis près de six mois, la Junte s'est employée à réécrire l'histoire dans laquelle elle fait abstraction de tous les autres acteurs impliqués et de toutes les nations victimes. Comme si l'Ukraine avait été l'unique protagoniste dans la 2è guerre mondiale.

    La junte perd pied et perd tout réalisme. La Junte est aux abois.

    Les Occidentaux ne pipe mot. C'est une ignominie qui discrédite totalement les prétendues démocraties occidentales et l'Organisation des Nations Unies, elle si prompte à condamner le moindre manquement aux libertés individuelles.

    Pour moi, cet opéra de mauvais goût a assez duré. On devrait, avec les USA en tête, classer l'Union Européenne et l'OTAN dans la catégorie de menaces massives à la paix mondiale et la stabilité régionale.
    Le sourire de Kerry en donnant la main à Poutine à Sotchi n'inaugure rien de rassurant. Ça n'est qu'une main de Judas car l'autre tient le poignard toujours prêt à frapper.

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