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mardi 18 juillet 2017

Le ministère de la santé veut radicaliser la lutte contre l'alcoolisme en Russie



L'ombre de Gorbi n'est pas loin. Le ministère de la santé russe revient sur l'idée d'un durcissement de la politique de vente d'alcool dans le pays et propose, cette fois-ci l'interdiction totale de vente le week end. Après les nombreuses limitations intervenues en la matière, cette idée passe mal. Même au sein du Gouvernement.


La Russie a déjà introduit, selon les recommandations de l'OCDE, l'interdiction de vente d'alccol la nuit, l'interdiction de vente d'alcool aux mineurs, le prix minimum, etc. Bref, toutes les recommandations de l'OCDE sont pieusement suivies (voir notamment le rapport du 12 mai 2015). Le problème est que si d'autres pays de l'OCDE ont également adopté, par exemple, l'interdiction de vente aux mineurs, la caissière ne va pas demander à une personne de 40 ans de montrer une pièce d'identité, elle n'appelle pas les vigiles lorsque l'homme en costume lui demande si elle se moque de lui et ne menace pas, drappée dans la suffisance de sa bêtise, d'appeler la police. Cette scène ubuesque n'est pas imaginaire, j'en fut le témoin ébahi il y a quelques mois. Bref, au lieu de protéger les jeunes contre la consommation précoce d'alcool, ce qui est une bonne idée (mon Dieu, comment a-t-on suvécu?), l'on en arrive à simplement provoquer des tensions sociales par abus de formalisme et de bêtise, par cette incapacité chronique à prendre sur soi un minimum de responsabilité. Le but de la réglementation se perd bien loin de la pratique quotidienne.

Les mesures préconisées pour réduire la consommation "nocive" d'alcool sont très simples et on les retrouve dans presque tous les pays européens: augmenter les prix (la cirrhose devra être de qualité et pour ceux qui en ont les moyens) et forte règlementation des lieux de vente en Suède, règlementation de l'âge en France ou en Suisse, règlementation des horaires de nuit à Lausanne, etc. 

La relativité de l'efficacité, finalement, de ces mesures est soulignée par l'OCDE. Tant en ce qui concerne l'effet des politiques générales:


Qu'en ce qui concerne les effets positifs de certaines politiques ciblées:


Surtout que, toujours selon ce rapport, la consommation modérée d'alcool est bonne pour la santé:


Autrement dit, l'on en revient au fondement de ces actions publiques incontestables. En effet, qui peut s'opposer à la lutte contre l'alccolisme? De la même manière, qui peut s'opposer à la lutte contre la corruption? Si la question est importante, cela ne signifie pas pour autant que toute réponse soit indiscutable.

La Russie suit ici la voie de l'Estonie, qui avait tenté d'interdire la vente d'alcool le dimanche. Le ministère de la santé veut même dépasser ce petit pays et interdire en Russie la vente d'alccol tout le week end, espèrant que cette mesure sera adoptée dès cette année. Donc soit vous allez au restaurant ou dans des bars (ce qui est bien pour les villes et pour les personnes ayant des revenus confortables) ou bien vous vous débrouillez (ce qui concerne finalement la partie de la population la plus touchée par l'alcoolisme). Dans le même temps, l'on trouvait jusqu'à peu dans des distributeurs en toute liberté ou dans les pharmacies des petites bouteilles d'alcool de plante, certes formellement non prévues pour la consommation. Ce qui a permis aux alcooliques de très simplement contourner la limitation et de s'intoxiquer légalement. Ce qui change tout. Le ministère de la santé estime, sur les conseils du Centre de recherche en matière de prévention, que justement l'accent n'est pas suffisamment mis sur la prévention de l'alcoolisme. Et la meilleure prévention semble être l'interdiction. Logique.

Une telle radicalité en fait pas l'unanimité dans le Gouvernement. Le vice-ministre de l'industrie et du commerce V. Evtoukhov s'oppose à cette idée, tout comme le vice Premier-ministre Khloponine en charge, notamment, de la question de la vente d'alcool en Russie. L'interdiction a déjà été testée sous Gorbatchev. Elle a permis de particulièrement efficacement développer le marché parallèle et la vente l'alcool frelaté, sans n'avoir eu aucun impact bénéfique l'alcoolisme à long terme. 

Au Conseil de la Fédération, l'accueil n'est pas plus favorable. Les sénateurs estiment peu probable que cette initiative ne passe sous cette forme. Si l'idée d'une réduction de la consommation d'alcool fort est bonne, de cette manière elle sera improductive, car les gens soit en trouveront ailleurs, soit le fabriqueront eux-mêmes avec tous les dangers que cela comporte.

La radicalité de la mesure proposée par la ministre de la santé et l'insistance avec laquelle elle revient sur cette question laisse songeur. Comme d'habitude dans ces cas d'implantation pure et simple de recommandation internationale, la source première (OCDE, FMI, OMS, OMC etc) de l'idée géniale n'est pas avancée. Elle vient soit disant d'un Cente de recherche, du ministère lui-même ou autres fables permettant de "nationaliser" l'idée. L'on pourrait peut-être commencer par assumer les origines des normes adoptées? Un peu comme pour les ONG, qui deviennent "agent étranger" lorsqu'elles reçoivent un financement étranger pour exercer une activité politique. Signaler l'origine étrangère (organismes internationaux, cabinets de conseil, Think tank et autres plateformes de globalisation des législations - et donc des idéologies - nationales). Cela répondrait pour le coup à cette mode de la transparence totale, qui est aussi un élément de cette idéologie contemporaine, mais étrangement n'est pas ici revendiquée ... Notamment, par les ces organes qui habituellement en font tellement la promotion.

Un peu de bon sens ne serait pas de trop. Si les gens doivent faire attention à leur consommation d'acool, ils ont aussi le droit de se détendre le week end. Il ne s'agit pas d'alcool au travail, pas d'alcool dans la vie courante, pas d'alcool au volant (s'ils boivent chez eux et non au restaurant). Il s'agit de boire un verre le week end avec des amis ou en famille. Bref, d'avoir des rapports humains, réels et détendus, certes en dehors des réseaux sociaux. Evidemment, on peut avoir des rapports humains réels sans boire un verre, mais est-ce un crime? Doit-on avoir l'impression d'être un alcoolique en puissance parce que l'on aime le vin ou la vodka? Faut-il avoir mauvaise conscience et acheter des bouteilles en avance, presque en cachette? 

Je ne suis pas certaine que ce genre de mesures assez primaires permettent de développer en Russie, comme ailleurs, une culture apaisée de l'alcool.






2 commentaires:

  1. Rien n'empêche les Russes d'acheter leur vodka le vendredi pour la déguster pendant le week end. Je ne comprends absolument pas pourquoi ils suivent les recommandations de l'OCDE au lieu de les ignorer tout simplement. Ils ne sont pas assez grands pour solutionner eux-mêmes leur problème d'alcoolisme?

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  2. Bonsoir Karine, sauf erreur de ma part la loi sèche de Gorbatchev avait eu un effet désastreux sur la santé publique et également sur le budget

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