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mercredi 4 décembre 2019

Vladimir Lepekhine : un nouveau projet global contre la Russie ?



Dans la lignée de notre publication d'hier, je voudrais attirer votre attention sur l'interview de Vladimir Lepekhine, directeur de l'Institut EvroAzEs concernant la situation politico-économique de la Russie, le caractère totalement volontaire des réformes aussi improductives qu'impopulaires menées par le bloc néolibéral du Gouvernement russe et la préparation d'un projet global devant largement chambouler l'équilibre politique, portant à nouveau le risque d'une disparition des institutions étatiques. Ces perturbations sont inévitables, car les décisions centrales de la politique intérieure, selon Lepekhine non pas en fonction des intérêts nationaux, mais d'intérêts extérieurs. Les grandes lignes en français pour les non russophones.


Le directeur de l'Institut d'étude des problèmes du développement de l'Union eurasienne (EvroAzEs) a donné une interview, passablement détonante, à la chaîne en ligne DenTV, qui a en substance été reprise sur le site wec.ru, disponible ici en russe. 

L'intégralité de l'interview est disponible ici :


Selon Vladimir Lepekhine la Russie est actuellement dans une impasse, notamment économique, liée à l'affaiblissement des institutions politico-étatiques. En ce sens, des analystes russes établissent un parallèle entre la situation actuelle et celle de la fin des années 80. De leur côté, les politiciens font des déclarations principalement émotionnelles, mais pour autant leurs décisions sont parfaitement rationnelles et ne s'excusent pas par l'incompétence.

En 2004, la décision d'implanter la monétarisation de l'économie, ce qui est le point de départ de la situation actuelle, le Président Poutine a demandé à deux groupes d'établir les critères d'évaluation de l'efficacité des politiques dans les régions. Le premier groupe, celui du ministère du développement régional alors créé, sous la direction  de Elvira Nabiullina (elle dirige depuis 2013 la Banque centrale, son époux est le président de l'Ecole supérieure d'économie - radicalement néolibérale), a traduit en russe les exigences du FMI, mais sans que ces critères proposés n'aient le moindre lien avec le but affiché, celui de l'évaluation de l'efficacité des régions. 64 critères financiers techniques ont été retenus, le PIB a par exemple était écarté. Le second groupe, celui dont faisait parti Lepekhine, proposait d'intégrer des critères sociaux et économiques, mais qui ne furent pas retenus, car ils n'intéressent pas le FMI - ni le Gouvernement. Ainsi, il est impossible de mettre en évidence la carte du développement réel des régions. Il semble bien, par cet exemple notamment, que quelque chose n'aille pas dans le système de gouvernance. 

En ce qui concerne le système politique, rappelons-le centré autour d'une personnalité, dont c'est le dernier mandat, il démontre une faiblesse interne importante. Selon Lepekhine, ce système est programmé pour disparaître (justement parce qu'il n'a pu devenir système) et les tentatives pour renforcer le système social sont vouées à l'échec. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder la manière dont le Gouvernement sabote la réalisation des projets nationaux et des décisions présidentielles. "La catastrophe est en ce qu'ils ne peuvent être réalisés, car un système n'est pas constitué par une seule personne". Or, la plupart des individus qui travaillent à des postes de direction, "ne réfléchissent pas avec leur coeur ou leur esprit, mais avec leur estomac", je cite.

La question centrale est finalement de savoir s'il s'agit d'une incompétence ou d'une volonté ?

Ici, pour Lepekhine, la réponse est claire : c'est un sabotage - volontaire. Pour lui, le Gouvernement ne semble pas intéressé à ce que le pouvoir d'achat s'améliore, que l'économie reparte : les prêts des particuliers sont facilités et favorisent l'endettement, quand les entrepreneurs ont les plus grandes difficultés à obtenir un emprunt pour développer leur affaire.

"Tout se qui se passe aujourd'hui en Russie ne l'est pas en raison de la stupidité des fonctionnaires. Ce manque d'entrain qu'ils démontrent laisse penser qu'il existe en Russie des barrières cachées au développement de l'économie, parce que tout est fait pour cela, si ce n'est même plus. Et c'est justement pour cela que nous entrons dans l'OMC, que nous augmentons l'âge de la retraite, augmentons les impôts (augmentation récente de la TVA - note du traducteur), l'on peut donner beaucoup d'exemples.
Il est aussi possible de jeter un oeil sur les recommandations du FMI, qui conseillent au Département d'Etat américain d'investir de l'argent dans leur industrie, quand, à la Russie, il est recommandé d'investir ses capitaux à l'étranger. Et que font les pouvoirs ? Nous remarquons une fuite constante de capitaux vers l'étranger, en obligations,  actions etc., et maintenant voila l'Afrique qui s'approche. La classe dirigeante en Russie n'a pas de motivation. (...)
Si l'on s'appuie sur ce qui vient d'être dit, il n'y a qu'une conclusion qui s'impose : quelque chose se prépare à l'égard de la Russie. On a la sensation que le pays retient son souffle, en attente de quelque chose. Je pense que ces prochaines années va émerger un projet global de forces politiques extérieures, mais dont nous serons un des participants. Et je suis certain que l'Occident a déjà déposé ses hameçons où il faut".
Cette vision de la situation est particulièrement noire et suppose l'existence d'une réelle force politique en Occident, ce qui est largement discutable. Mais il est vrai que le sentiment d'impasse du cours politique néolibéral mené oblige à s'interroger. Nous avons plusieurs fois soulevé la douloureuse question du rôle de certaines élites dans les choix politiques les plus contestés, que ce soit à l'égard des sanctions économiques, sportives (JO), de la difficulté à capitaliser politiquement les victoires acquises (Syrie, Crimée). A ce sujet, je vous rappelle ce texte, dans lequel il nous semble aussi que la Russie se trouve à un tournant, qu'elle doive choisir entre 1941 et 1991




5 commentaires:

  1. Les Russes auraient le choix entre se battre ou capituler? La vérité c'est que ça va mal partout. En France aussi ça va mal et je ne vois pas comment on va pouvoir s'en sortir. C'est déprimant.

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  2. Karine tu en dit trop ou pas assez c'est a dire sur quoi pense tu que cela puisse deboucher ,une ouverture au mondialisme ?,une perte
    d'identité ? Cet article m'inquiète
    Richard Tailhardat

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  3. Vos inquiétudes sont pour moi préoccupantes. Ici, nous n’avons que des informations fausses de Russie, et malgré nos désaccords vous êtes pour moi une observatrice en langue française du plus grand intérêt. Contrairement à la Chine, la Russie est une démocratie «contrôlée» et de ce fait est le «maillon faible» pour l’Empire américain en lui permettant nombre d’entrées sur le terrain russe. Or il est divisé, entre les sanctions économiques contre la Russie ou contre la Chine. Les sanctions russes pouvaient permettre le développement interne de la Russie mais sa politique étrangère pour retrouver son rang antérieur sur la scène internationale lui revient en boomerang ! «1941-1991»? 1941, c’est le «front patriotique» victorieux, crée par les élèves rescapés des meilleurs officiers tsaristes (un tiers d’entre eux) ralliés à la révolution pendant la guerre civile, partisans de la guerre moderne mécanisée contre l’armée à cheval de Staline, qui était effondré et désarmé devant la trahison d’Hitler. L’histoire reste encore à écrire ! Ces mêmes officiers exigèrent en 1953, l’élimination de Béria qui s’apprêtait à faire ce que fit Elstine 38 ans plus tard en 1991 ! Ce répit leur permit de construire une armée moderne qui encore aujourd’hui tient en respect l’armada américaine et nous protège jusqu’ici de la 3ème guerre mondiale nucléaire ! Un nouveau sursaut patriotique comme en 1941 ?

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  4. Très très intéressant, et réellement inquiétant. Ceux qui vivent ici en Russie ressentent ce resserrement, cette stagnation et le sentiment d'un cul de sac. L'inquiétude des Russes est réelle, les moyens d'existence sont en régression. Cette intervention de Vladimir Lepekhine et de ceux qu'il représente est très bienvenue. Mais je persiste à croire qu'il y a des structures suffisamment puissantes et déterminées en Russie pour s'opposer à cette tactique de dépersonnalisation de la Russie, et qui sauront s'opposer à ce plan. Car il est certain qu'un tel plan existe pour tenter de amener la Russie à être occidentalo-compatible. Ce qu'elle n'a jamais été, même sous les Romanov qui ont développé tant de liens avec l'Europe occidentale, lorqu'on lui en laissait l'occasion. Les années à venir sont pleines d'interrogations, et de risques.

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  5. Votre article donne une explication aux incohérences que je perçois, entre ce qui est proclamé par Poutine, et ce qui a lieu dans les faits, et une forme à mon inquiétude. Il me semble que la société est moins atteinte qu'en occident, et qu'il pourrait y avoir un sursaut, avant que les forces mondialistes à l'oeuvre puissent complètement la pourrir.Pourrait-on espérer une reprise en mains par l'entremise d'un coup d'état militaire et une dictature de salut public, face à l'hydre mafieuse mondialiste? C'est ce qui sauverait la France, mais je crains qu'elle ne puisse même plus compter sur son armée. Cela peut paraître scandaleux de souhaiter une chose pareille, mais au point où nous en sommes tous, c'est soit une dictature de salut public nationale, soit la dictature mondialiste de la mafia.

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