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lundi 12 octobre 2020

Khabarovsk, de Fourgal à Navalny : l'impasse de la politique globaliste en Russie aussi

"Europe adopte des sanctions"

Après l'arrestation du gouverneur LDPR en exercice de la région de Khabarovsk (Extrême-Orient), Sergueï Fourgal, des manifestations sont organisées quasiment tous les jours dans différentes villes de la région, essentiellement à Khabarovsk, qui en est le centre administratif. Ainsi, depuis le 11 juillet des manifestations s'enchaînent, exprimant au départ plus un ras-le-bol autour du slogan "rendez-nous notre gouverneur", que des revendications précises. Ce sentiment de rejet du Centre fédéral n'a pu être contrôlé par l'expédition sur place par V. Poutine du député LDPR Degtariev en guise de remplaçant, dont la carrure politique est à peine suffisante pour les intrigues de couloir et les photos collectives derrière Jirinovsky, mais pas pour la gestion d'une crise politique profonde. Et comme tout mouvement de contestation, aujourd'hui, semble avoir pour vocation à être récupéré faute de leader politique réel dans l'opposition modérée, Khabarovsk ne fait pas exception et des demandes de sanctions contre la Russie au nom de "Saint-Navalny" font leur apparition, en même temps que des tentes sur mode Maïdan devant le siège de l'exécutif local. Et pendant ce temps, l'on s'inquiète de savoir combien de personnes ont été contaminées par le Covid lors de ces manifestations, interdites sur ce fondement, renforçant encore l'exaspération de la population. Le décalage entre le danger que présente ces deux "périls" et l'attention qui leur est portée n'est pas rassurante. Décidément, c'est le bon sens qui est masqué dans ces crises.


Depuis le 11 juillet 2020, pratiquement tous les jours, les gens se réunissent à Khabarovsk, contestant l'arrestation de leur gouverneur Sergueï Fourgal. Rappelons que Fourgal est arrivé au pouvoir lors des élections régionales de septembre 2018, qui ont marqué l'échec flagrant des technologies électorales employées par Kirienko, en charge de la politique intérieure à l'Administration présidentielle, pour reprendre la main dans certaines régions (voir notre article ici). Dans la région de Khabarovsk, dès le premier tour, Chport, gouverneur Russie Unie sortant, est en mauvaise position contre Fourgal, tous deux étant à 35% de voix. Au second tour, la participation augmente et le soutien à Fourgal est sans appel : 69,57%. Ainsi, lorsqu'un an et demi plus tard, leur gouverneur est interpellé dans le cadre d'une affaire criminelle, ça passe mal. Ca passe même très mal. La question n'est pas de savoir si réellement il est pourri ou non, il y a même des chances qu'il le soit réellement (voir notre texte ici). Mais les faits remontent aux années 2004-2005 et sont mis à jour ... 15 ans plus tard, après la défaite du gouverneur Russie Unie, quand Fourgal a eu un soutien massif de la population.

Le feu a été mis aux poudres et un sentiment de rejet du pouvoir central monte. La tragédie du vide objectif de l'opposition est une donnée de notre époque et la Russie ne fait pas exception à la règle. Mais la montée des manageurs remplaçant les politiques, bien moins présentables - et contrôlables, met en difficulté et la majorité. Pour remplacer Fourgal, Poutine nomme par intérim quelqu'un du même parti, Degtariev, mais parfaitement aligné, sans aucune carrure politique, député de la Douma principalement visible dans les photos de groupe, où il est bien placé derrière l'épaule de Jirinovsky.

Bref, Degtariev est parachuté à Khabarovsk et enchaîne les bourdes. Entre snobisme primaire et incompétence crasse, non seulement il n'est pas apte à calmer la situation, mais il renforce le sentiment de rejet, non seulement dans la population, mais également dans des milieux traditionnellement non-contestataires. Par exemple, pour redorer son image trop moscovite, il se rend dans le port de la région de Khabarovsk à Vanino, qui est le port le plus important de l'Extrême-Orient russe, un lieu stratégique du transport du bois, du charbon, du fer ou encore du pétrole. Un port parfaitement opérationnel, qui certes a vu son importance baisser à la chute de l'URSS, mais la baisse de l'activité dans la Russie post-soviétique a concerné tous les secteurs industriels, de production, et les ports aussi.

Notre Degtariev débarque à Vanino fin juillet, peu après sa nomination. C'est, normalement, une sortie médiatique facile, avec un public bien loin de l'opposition, un public qui travaille et qui est fier de son travail. Et cet imbécile, imbu de lui-même, déclare en regardant le port avec un dégoût manifeste : "Mais ce sont des technologies de grand-pères!" Fallait-il être idiot à ce point ? Manifestement, oui. Le rejet fut immédiat, tout comme la réponse : appeler une technologie, qui est utilisée par des centaines de ports dans le monde, de "technologie de grand-père" manque pour le moins de respect pour les gens qui travaillent ici, d'autant plus que c'est infondé

Et pour qu'il n'y ait pas de doutes, avant les manifestations du 23 et 24 juillet, suite à sa visite, il a déclaré que, de toute manière, il partait de la ville, il avait à faire dans la campagne. En effet, c'est plus simple. Cerise sur le gâteau, alors qu'il est incapable de calmer la situation, il vient de déclarer qu'avec quelques travaux, manifestement sur le mode Sobianine, Khabarovsk dans 20-30 ans pourra être la nouvelle capitale de la Russie. Il semblerait que Moscou devienne hors-jeu, selon lui, pour des raisons géopolitiques. Degtariev est, semble-t-il, un adepte de la pensée complexe ...

Donc, la situation s'est dégradée. Tout ce qu'ils ont trouvé à dire, en août, est que l'augmentation du Covid dans la région de Khabarovsk est liée aux manifestations. Lorsque les gens sont suffisamment à bout pour sortir régulièrement dans les rues exprimer leur mécontentement, il est difficile de trouver une réponse plus stupide, qui exaspère encore. Maintenant, le Covid est l'excuse idéale pour interdire une manifestation initialement autorisée le 10 octobre.

Comme l'opposition est objectivement vide, qu'il n'existe pas un seul mouvement apte à proposer une voie alternative qui ne soit pas une alternative à la Russie, l'opposition radicale, parfaitement instrumentalisée de l'extérieur, prend ce qui lui est offert avec tant d'insistance. Ce week-end, le groupe de Navalny reprenait les choses en main, des slogans demandant l'adoption de sanctions contre la Russie sur fondement du mystérieux "empoisonnement" de "l'opposant numéro Un" pour l'Occident et même des tentes ont été dressées devant l'exécutif à Khabarovsk, comme au bon vieux temps du Maidan.

Heureusement, la police est intervenue, les tentes ont été enlevées et des responsables interpellés. Maintenant, un député local du Parti communiste a saisi la Procuratura pour vérifier l'action des policiers. 

Le danger - politique - ici est que des gens qui a priori ne soutiennent pas Navalny, des gens qui ne veulent pas renverser le pouvoir sur le mode du Maïdan, se trouvent dans une impasse faute d'une véritable alternative politique, constructive, rationnelle, posée. Et qu'ils se retournent vers le pire, ne pouvant plus supporter la situation dans laquelle ils se trouvent. Qu'il s'agisse de la réforme globaliste des retraites, de la désindustrialisation du pays dans sa course folle vers le tout-numérique comme dans tous les pays européens, de la gestion globalisée du Covid avec la déstructuration de l'école, de l'économie, etc. 

Le monde proposé est une impasse à tous les niveaux : l'humain est réduit à une vie biologique, la société à une contrainte ou un danger et l'Etat à un mécanisme d'implantation des règles globales.

Cette impasse est ressentie assez fortement dans la population, dans cette partie qui n'est pas écrasée par la peur. En Russie, comme ailleurs. Mais en Russie, à chaque fois que les "libéraux" ont pris le pouvoir, en février 1917 ou à la fin des années 80, à chaque fois que le pouvoir en Russie a joué le jeu de l'Occident, les conséquences ont été terribles et il a fallu des années pour s'en remettre avec une perte de territoire à chaque fois. Espérons que les leçons de l'histoire seront, pour une fois, retenues. 

6 commentaires:

  1. Que fait le parti communiste, n'est-il pas la 2ème force politique derrière Russie Unie et le 1er opposant au gouvernement actuel? Les autorités russes ont reconnu que la CIA était derrière Navalny, pourquoi le parti de ce traitre n'est pas interdit? J'ai l'impression que la Russie est aussi mal gouvernée que la France.

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  2. On en arriverait à regretter l'URSS!

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  3. Lorsque « que le pouvoir en Russie a joué le jeu de l'Occident » une première fois en février 1917, la conséquence « terrible » a été la sortie de l’Occident et la seconde fois « à la fin des années 80 », l’intégration à l’Occident , provisoire, certes ? N’est-ce pas contradictoire ? Serait-ce pour vous aussi terrible d'en sortir que d'y entrer ?

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  4. Je ne connaissait pas la situation dans cette région, c'est hallucinant. Il y a du boulot pour nettoyer tout ça.
    Xavier Moreau a fait un point dessus:
    https://www.youtube.com/watch?v=ASTpf7YuEoY

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  5. In fine, d'ici on se rend compte que "le monde libre" (ah ah) soutient des mafiosos qui ont littéralement des décennies d'activités dont les actes comprennent des assassinats. Pas mal même pour les critères décadents de l'ouest.
    L'histoire nous enseigne qu'il en a toujours été ainsi. Soutiens plus qu'actif d'un certain Adolph Hitler, Pol Pot, Suharto et j'en passe... Génocide et argent facile font bon ménage. On a effectivement de quoi donner des leçons de morale.

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  6. Il faut bien comprendre que les libéraux sont totalement discrédité en Russie depuis l'époque Eltsine. P-e dans 20 ans, qui sait?

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