Depuis décembre, l'intérêt grandissant de la Turquie, membre de l'OTAN, pour l'Ukraine inquiète ceux qui ne veulent pas la guerre totale dans le Donbass et sa possible extension au continent européen. En effet, l'accord militaire passé entre les deux pays, prévoyant une production commune pour l'Ukraine de ces drones de combat, qui ont donné la victoire à l'Azerbaïdjan, et la livraison d'une première partie, laisse attendre de nombreuses victimes civiles dans le Donbass et un risque d'extension du conflit. Car tout l'intérêt est là pour les Atlantistes : la Russie va-t-elle s'en tenir à un soutien caché et à des déclarations diplomatiques, et perdre politiquement tant à l'intérieur qu'à l'internatonal, ou bien va-t-elle laisser entendre être prête à défendre le Donbass russe contre cette agression, somme toute, de l'OTAN ? Les globalistes ayant eux-mêmes changé l'équilibre international par le développement d'une politique d'agression massive des pays non-alignés, la question longtemps écartée par la Russie de l'intégration du Donbass pourrait retrouver tout son sens dans ce nouveau contexte conflictuel.
En décembre 2020, la Turquie et l'Ukraine ont passé un accord militaire concernant la production commune de drones de combat avec transfert de technologie. Et en attendant la mise en route de cette production, l'Ukraine se disait prête à acheter des drones Bayraktar TB2, ces mêmes drones qui ont fait la différence dans le conflit du Haut-Karabakh. Il semblerait, selon certains experts, que la Turquie ait été aidée par les Etats-Unis à prendre la "bonne décision", celle d'une implication active dans le conflit ukrainien, suite à des sanctions imposées à ses entreprises de production d'armes. Cette délicate incitation expliquerait certainement le prix de vente incroyablement bas. En février 2021, l'information tombe d'une vente de 6 drones de combat à l'armée ukrainienne à un prix 16 fois inférieur à celui du marché.
L'intensification de l'activité des forces armées ukrainiennes, en violation directe des Accords de Minsk, oblige effectivement à poser la question d'une reprise "finale" du conflit. De son côté, la Russie appelle les Occidentaux à dissuader l'Ukraine de se lancer dans une folie guerrière, tout en soulignant que l'armée ukrainienne est soutenue, armée et entraînée par ces mêmes Occidentaux. Aucun conflit armé ne peut être contrôlé, il sort toujours des limites initialement prévues et entraîne des conséquences imprévisibles. Les Occidentaux ont-ils réellement envie de se battre pour l'Ukraine ? L'on peut sérieusement en douter. Mais s'ils laissent faire, comme ils le font actuellement, ils pourront être embarqués dans un conflit qui mettra à genoux une Europe, déjà triste fantôme d'elle-même.
La situation est ici extrêmement complexe (voir notre texte ici). Le Donbass n'est pas le Haut-Karabakh, en cas d'affrontement militaire, la Russie ne peut pas se permettre de rester en retrait. Certes moralement, comme le déclare Kourguiniane, la question du choix entre les néo-nazis de Kiev et les Russes et Ukrainiens du Donbass ne se pose pas : "Personne en Russie ne se permettrait de faire un autre choix, même s'il le voulait". Et le clan dit libéral, présent dans les organes de pouvoir, le voudrait fortement, espérant ainsi enfin entrer dans la danse occidentale, répétant à satiété le choix de 1991 et les erreurs qui l'ont accompagné.
Mais surtout, la situation est complexe sur le plan de la sécurité internationale, car la reprise dans le sang du Donbass par l'OTAN, sous drapeau turco-ukrainien, remettrait totalement en cause, au minimum, la stabilité sur le continent européen. Ce qui, in fine, servirait le fantasme globaliste.
D'un autre côté, la menace d'une intervention de la Russie, doublée d'une intégration du Donbass dans la Fédération de Russie, pourraient être le seul élément qui fasse réfléchir à deux fois avant de lancer les troupes. Car il y a une différence entre faire la guerre à LDNR et faire la guerre à la Russie.
Cette option de l'intégration avait longtemps été écartée par la Russie pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le scénario de Crimée était unique et n'illustrait pas une vision expansionniste. Ensuite, la Russie n'avait pas la volonté de remettre en cause la stabilité internationale, ce que démontre ses appels incessants à exécuter les Accords de Minsk, qui inscrivent le Donbass dans le cadre de l'état ukrainien, soulignant que dans le cas contraire, l'Ukraine pourrait définitivement perdre le Donbass comme elle a perdu la Crimée. Enfin, car elle espérait, à terme, voir réintégrer l'Ukraine post-Maïdan au Donbass, c'est-à-dire pacifier l'Ukraine, la rendre à elle-même.
Or, la situation géopolitique a changé. L'intensification de la confrontation entre le clan atlantiste et la Russie modifie la donne sur de nombreux points. Si de toute manière des sanctions sont adoptées en chaîne contre la Russie, si de toute manière la rhétorique anti-russe continue à prendre de l'ampleur, si de toute manière les Atlantistes veulent faire de la Russie un état-terroriste, un paria, pourquoi alors ne pas réagir ? Les réactions asymétriques sont les plus efficaces et l'intégration du Donbass peut être l'une d'elles. Puisque de toute manière, avec ou sans lui, le combat entre dans une phase finale, une raison sera toujours trouvée (voir notre analyse ici) pour combattre la Russie, tant que l'obéissance ne sera pas totale, tant que la Russie ne se reniera pas sur la place publique.
Soit les globalistes n'ont plus le choix, ils doivent gagner ou périr, soit ils n'apprennent pas de leurs erreurs : le Maîdan, cette erreur de trop, qui a conduit à l'intégration de la Crimée, au retour de la Russie, décomplexée, sur la scène internationale, avec la Syrie ou le Venezuela. Dans tous les cas, la Russie a les cartes en main, elle aussi doit faire un choix stratégique, avec toutes les conséquences existentielles que cela implique.
Bonjour,
RépondreSupprimerPuisque l'on parle de l'Ukraine, voici un SITREP depuis la Hongrie avec un sujet qui reste sous le "radar" des médias "occidentaux"...
http://thesaker.is/ukraine-sitrep-as-seen-from-hungary/
KG.
Merci !!
Supprimerje croyais naïvement jusqu'ici que la Russie avait le contrôle total du ciel au-dessus du Donbass ? ce qui limiterait les interventions ukrainiennes au sol ?
RépondreSupprimerNous avons l’exemple en Libye, lorsque les Turcs ont fourni à Tripoli des drones Bayraktar TB2 qui leur donnaient un avantage certain dans les airs...Les Russes ont dû faire voler des Mig 29 sans marquage partis de la base de Hmeimim pour les contrer.Et ce n'était pas sur leurs propres frontières !
SupprimerDans l'hypothèse d'un "scenario Haut Karabakh" dans le Donbass, va-t-il falloir envisager une réaction de Moscou sur l'ensemble de l'axe Kiev-Ankara-Bakou ? A moins que l'Ukraine n'implose entre-temps...? Ou bien, plus vraisemblablement, Erdogan rendra-t-il une énième visite à Poutine à Sotchi ? Ou avec, "America is back"... peut-être encore quelques donuts à distribuer avant qu'une main discrète et généreuse ne mette une nouvelle fois le feu à la mèche... Qui veut aller se battre en Ukraine ? Il est bien loin le temps où Gorbatchev évoquait le projet de la "Maison commune"... Dans ce monde aujourd'hui en pagaille, peut-on encore espérer un raisonnement civilisateur ?
RépondreSupprimerSi l otan prévoit un Kosovo bis dans le donbass avec l envoi de nazis et d islamistes,ils devraient bien réfléchir avant
RépondreSupprimerLa Russie se fait largement rouler par la Turquie. L'espoir de Mr Poutine de détacher la Turquie de l'OTAN est vain. Les avantages économiques ( Southstream, centrales nucléaires, vente des S400 ) sont trop largement compensés par la situation en Syrie, en Libye, en Ukraine, en Arménie. Il serait temps que la Russie fasse comprendre cela à Erdogan. Peut-être n'en n'a-t-elle pas réellement les moyens.
RépondreSupprimerPoutine ainsi que Lavrov maîtrisent l'art de la négociation et de la médiation. Ils interviennent sur de nombreux points d'équilibre géopolitique en lisière du territoire de la Russie et dans les régions que vous citez. L'action diplomatique se mesure le plus souvent sur un long terme. La situation n'est pas figée. Elle évolue partout à des degrés d'intensité variable. Quant à l'OTAN et la Turquie, n'a-t-on pas observé depuis quelques années une érosion interne de leur cohésion et de leurs outils de puissance ?
SupprimerL otan devra bien réfléchir avant de provoquer un Kosovo bis avec leurs alliés nazis et islamistes.
RépondreSupprimer