La CEDH vient de rendre plusieurs arrêts à l'égard de la Russie, la condamnant en raison des violences commises par les forces de l'ordre lors de l'interrogatoire des personnes "présummées coupables" et de l'inefficacité des enquêtes menées dans le pays sur ces faits.
Par exemple, en août 2003, Valentin Nitsov, est soupçonné d'avoir assassiné un policier. Il est arrêté, reconnaît les faits et malgrè cela est battu par les policiers pendant plusieurs heures afin de venger la mort de leur collègue. Condamné à 8 ans de réclusion, il a signalé les coups dont il fut l'objet, mais l'enquête n'a mené à rien. Il s'est alors adressé à la CEDH sur le fondement de l'article 3 (torture) et la Russie a été condamnée à lui verser 15 000 euros en réparation du dommage moral.
C'est également le cas de Valentin Salikhov, habitant de Novossibirsk, arrêté en juin 2004 et soupçonné de viol. Selon ses dires, lors de l'interrogatoire, il a été battu avec un bâton, les policiers lui ont retirer de force son linge de corps, lui ont coupé les ongles et voulu lui prendre du sang sans son consentement. Quand il s'adresse en 2004 à la justice pour ces mauvais traitements, aucune suite sérieuse n'est donnée à sa requête. Devant la CEDH, il s'est également plaint des conditions inhumaines de détention en préventive: à la place de toilettes, un pot de chambre, un repas par jour et uniquement les jours ouvrables, etc. La Russie a été condamnée à lui verser 20 000 euros en réparation du dommage moral.
Ces faits peuvent être multipliés, diversifiés, tant et si bien qu'ils montrent non pas des dérapages mais une tendance. Une tendance des forces de l'ordre à ne pas considérer la personne arrêtée comme présummée innocente, mais coupable. Et un coupable n'est plus un être humain que l'on doit respecter comme tel. N'est plus un être humain qui a des droits.
Ces personnes, même coupables des faits qui leur sont reprochés, ne perdent pas leurs droits. Là est la substance de l'Etat de droit. La justice ne peut être privatisée par quelques policiers zélés, elle ne peut être expéditive dans un Etat moderne qui se respecte et donc respecte ses citoyens.
A la lumière de ces nombreux exemples, on comprend à quel point il était nécessaire de mener une réforme en profondeur de la police. Mais le changement d'appellation n'a pas permis de rénover l'institution, de la moderniser, ni de l'humaniser. Les affaires récentes montrent que ces pratiques perdurent. Comment inverser la tendance?