Voir: http://www.genproc.gov.ru/smi/news/genproc/news-83567/
Après en avoir présenté les grandes lignes au Président russe, le procureur général Y. Tchaïka, a fait une longue intervention devant le Conseil de la Fédération, la Chambre haute du Parlement, concernant l'activité et le financement des ONG russes et l'application de la nouvelle législation concernant le financement étranger des activités politiques de certaines ONG, dès lors appelées agent étranger.
Le rapport du Procureur général montre l'ampleur du financement étranger ces dernières années des ONG russes. Ainsi, de novembre 2012 à avril 2013, 2226 ONG russes ont touché 30,8 milliards de roubles de l'étranger. Et dans ce chiffre, on décompte 358 ONG créées par des structures étatiques, ayant touché 6,6 milliards de roubles de l'étranger, ce qui n'est pas négligeable non plus.
Comme les ONG ne s'enregistrent pas sur le registre spécial pour les agents étrangers, le procuratura générale a vérifié les statuts d'un millier d'ONG. Parmis celles-ci, 215 présentent dans leur sphère d'activité des signes d'activité politique et ont reçu entre 2010 et 2013 plus de 6 milliards de roubles. 22 d'entres elles remplissent absolument tous les critères et ont reçu plus de 800 millions de roubles, sans se reconnaître agent étranger. Pour autant, elles participaient dans les processus électoraux, dans les évènements publics, à l'élaboration des projets de lois et rendaient compte de leur activité à leurs "sponsors" étrangers.
Cela est le cas, par exemple, du Conseil indépendant d'expertise juridique, financé par l'ambassade de Grande Bretagne et par le fond américain pour le développement de la démocratie NED à hauteur de 5 millions de roubles. Son activité concerne l'analyse et l'appréciation des processus politiques en Russie, la préparation et l'adpotion de décisions par les organes publics (législatifs, exécutifs et judiciaires) et des propositions de modifications de la législation russe.
D'une manière générale, cela concerne principalement les ambassades en Russie des Etats Unis, de Grande Bretagne, de Belgique, d'Allemagne, des Pays bas et de Suisse. Le recours à des ONG implantées en Russie pour interférer dans les affaires internes du pays où se trouve l'ambassade peut poser des problèmes au regard du droit international.
193 ONG parmis les 300 touchant plus de 5 milliards de roubles de l'étranger ont, depuis l'entrée en vigueur de la loi, soit cessées leur activité politique, soit ne perçoivent plus de financement de l'étranger.
Mais cet aspect reste discutable, car des schémas sont mis en place pour contourner la législation. Il s'agit notamment de dons par des personnes privées ou par des structures qui elles reçoivent cet argent de l'étranger, le "nationalise" et le reverse à des ONG russes. Comme la provenance de l'argent des finançeurs n'est pas un critère, s'ils sont russes, leur argent aussi le devient.
Dans la plupart des cas, seuls des avertissements ont été prononcé à l'encontre des ONG vérifiées et en infraction. Car, souvent elles sont également en infraction à la législation fiscale et parfois l'utilisation des fonds alloués soulève quelques questions.
Un dernier exemple. L'ONG Memorial à Saint Petersbourg a perçu 400 000 roubles pour la réalisation d'un programme de soutien aux personnes âgées. Finalement, seulement 15% de la somme a été utilisée à cette fin, le reste a servi au paiement de salaires, du loyer et autre.
D'une manière générale, le rapport soulève également la question de l'implantation de ces ONG dans les structures d'influence, de soft power. En effet, 4 des ces ONG, par exemple sont membres du Conseil auprès du Président de la Fédération de Russie pour les droits de l'homme et le développement de la société civile. Elle participent donc activement à l'expertise des projets de lois et à l'élaboration de la politique législative. Plus concrètement, afin de mieux séparer les milieux des ONG de celui de la fonction publique, le Procureur Général préconise une interdiction pour les fonctionnaires d'entrer dans les ONG.
C'est peut-être pour ces raisons que la vague de vérification lancée par la Procuratura générale a eu un tel retentissement dans la presse libérale russe, mais aussi à l'étranger...