Voir: http://pravo.ru/news/view/89420/
Hier 10 octobre, la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie vient de rendre une décision très attendue dans les milieux juridiques. En juillet 2012, le législateur a modifié les règles électorales: les personnes condamnées à plus de 10 ans de prison ne peuvent plus, à vie, se présenter à des élections, de quelque niveau que ce soit. Sur le recours de plusieurs personnes s'étant vu refuser par la commission électorale le droit de participer à des élections, la Cour constitutionnelle a déclaré cette disposition inconstitutionnelle.
Le représentant du Conseil de la Fédération estimait que l'interdiction est fondée car elle ne peut être individualisée et elle ne constitue pas une sanction supplémentaire à la peine prononcée. Pour leur part, les démandeurs s'appuyaient sur le fait que ce "filtre criminel", comme il est appelé, non seulement contrevient à la Constitution, mais également à l'art. 86.6 du Code pénal disposant que l'exécution ou la suppression de la peine annule toutes les conséquences juridiques qui lui sont liées.
La Cour constitutionnelle russe a pris le parti des demandeurs. Elle rappelle que s'il est effectivement important de limiter le droit d'être élu pour protéger des intérêts légitimes, la restriction de ce droit doit être proportionnée et permettre la réalisation du but fixé. Ce qui ici n'est pas le cas. La Cour rappelle également la position de la CEDH en la matière et la nécessité d'individualiser les modalités de restriction, en fonction de la personnalité du condamné, du type d'infraction, etc.
La Cour estime également que cette interdiction constitue bien une sanction supplémentaire à la peine prononcée. Le législateur est alors enjoint à modifier la loi sur les droits électoraux, pour introduire des mécanismes d'individualisation et de proportionnalisation de l'interdiction de participer à des élections.
Les débats parlementaires qui vont suivre ne manqueront certainement pas d'intérêt sur le fond, mais surtout en ce qui concerne la forme. Car le législateur va enfin être obligé de modifier sa méthode de régulation sociale: il n'est plus possible d'écraser une mouche avec un marteau-pillon, le législateur va devoir rechercher les moyens juridiques lui permettant d'atteindre le but qu'il s'est fixé avec un peu plus de finesse, ce à quoi il n'est pas habitué ces derniers temps.