Voir: http://izvestia.ru/news/570863
Сурковъ @SurkovRussia Follow
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Почитал интервью "Известиям" зам. главы Роскомнадзора какого-то ксензова... Захотелось вступить в "Правый сектор".
Twit de Surkov: "J'ai lu l'interview à Izvestia du vice-directeur de Roskomnadzor, un certain ksenov ... J'ai eu envie d'entrer dans Secteur droit."
Internet est devenu le lieu de tous les fantasmes et de toutes les peurs. Chacun y écrit sa vie, ou celle qu'il aimerait avoir. Il peut virtuellement devenir une autre personne, même incognito, avoir des amis virtuels, vivre des aventures virtuelles, bref vivre dans notre monde moderne ... virtuellement. Chacun ses choix et cela a peu d'importance. Mais internet est aussi un moyen de faire passer des informations en masse, donc d'avoir une influence sur le mode de penser, la manière de voir le monde, la manière de le concevoir. Il a une influence directe sur notre comportement et la diffusion d'un système de valeurs. Il peut avoir une incidence directe sur la vie d'individus très concrets.
Or, dans notre société mondialisée, les valeurs et le modèle est avant tout américanisé. Cela ne pose pas de problèmes fondamentaux en Europe, le processus est depuis longtemps à l'oeuvre, il fut indolore et à dose homéopathique. Et vus les résultats, il est possible désormais d'affirmer que l'homéopathie est très efficace.
Mais en dehors du bloc Etats-Unis Europe, il existe encore des pays qui veulent défendre leur culture nationale, à une autre dimension que "l'exception culturelle" à la française. La Russie en fait partie, la Chine ou la Turquie d'une certaine manière aussi et leurs modèles sont très critiquables.
Lorsque l'on regarde l'internet chinois ou turc, le premier qualificatif qui vient à l'esprit est la fermeture. L'internet est "filtré", certaines ressources comme Facebook, Youtube, Twitter ou Google peuvent être selon le pays soit simplement interdit, soit d'accès restreint car ces ressources sont considérées comme un élément de l'américanisation des sociétés. L'efficacité à court terme est incontestable, l'efficacité "retour" à long terme également: l'interdiction générale provoquant l'envie, ces pays cultivent très activement la radicalisation de leur opposition et l'amour irréfléchi pour une Amérique qui redevient idéalisée et donc idéale.
Entre le laisser tout faire et le tout interdit, la Russie tente de trouver sa voie, une voie qui lui permette de protéger la population contre les dangers réels d'internet: l'extrémisme, la pornographie, la pédophilie, l'incitation à la haine religieuse, l'incitation au suicide, ect. Ces problèmes existent dans tous les pays et une coopération entre les gouvernements et les entreprises du secteur virtuel est incontournable.
La Russie aussi a adopté ces mesures, mais elle se rend compte de la difficulté de les faire appliquer. Par exemple Twitter, entreprise totalement américaine, ne le fait quasiment jamais, Facebook et les autres, plus implantés dans différents pays, discutent, mais sont difficiles à convaincre. Et dans ce contexte de délicate coopération, une loi sur le statut des bloggers entrera en vigueur au 1er août et les obligera à s'enregistrer.
Cette loi concerne non pas tous les bloggers, mais certains, les plus célèbres, russes et russophones, ceux-qui ont plus de 3000 entrées par jour, donc ceux qui ont la possibilité d'influencer l'opinion publique. Ces bloggers, sans être totalement assimilés à des masses médias, en reprennent certains traits: l'obligation de vérifier la véracité de l'information publiée, le droit de diffuser des publicités, l'obligation de respecter la législation concernant l'extrémisme, la langue etc. A la différence, ils revêtiront une responsabilité personnelle quand la responsabilité des journalistes est souvent assumée par leur rédaction, ils ne bénéficieront pas des accréditations lors des conférences de presses, etc. Mais, ô bonheur, le concept de blogger sera fixé par la loi, ils auront le droit de chercher l'information, de la diffuser, notamment en ce qui concerne les organes publics.
Et là on voit à quel point le vice-directeur du département à peu près équivalent au CSA, se moque du monde dans l'interview qu'il donne à Izvestia en expliquant le plus sérieusement du monde toutes ces absurdités. D'un autre côté, il n'a pas le coix, la loi a été adoptée, il va devoir l'appliquer et manifestement ne sait pas du tout comment.
Bref, l'absurdité consiste en ce que la loi n'apporte rien en matière de droit pour les bloggers, qui, comme tout individu, avant l'adoption de cette loi, ont toujours eu le droit de communiquer avec les organes publics pour demander des informations. C'est déjà dans la législation, cela s'appelle le principe de transparence et l'administration est obligée de répondre à toutes les questions des administrés, en Russie aussi. Ensuite, les contenus publiés sur les plateformes, en russe ou en Russie, doivent être conformes à la législation russe. Et déjà aujourd'hui, si vous incitez les gens à la ségrégation raciale, au suicide, vous appelez à la pédophilie, votre publication doit être retirée et vous risquez une condamnation pénale. Si le contenu est faux, son auteur peut être attaqué en diffamation. Donc, rien de nouveau non plus ici. Les bloggers ne seront pas a priori accrédités comme journalistes pour les conférences de presse, donc la loi fixe la pratique et ne la modifie pas. Autrement dit, techniquement, elle n'apporte quasiment rien. Sauf l'obligation de vérifier la véracité de l'information, ce qui est plutôt flou.
Son apport est "politique". Elle fixe la politique du pays face aux bloggers russes et russophones et elle la place sur le terrain de la restriction, voire de la défensive. L'accent n'est pas mis sur la liberté de communication, d'expression, mais sur la restriction, la méfiance. Car reste vivante, et parfois non sans fondement, la peur des réseaux sociaux comme plateforme révolutionnaire. Dans le même temps, tout le monde comprend bien que le modèle chinois est trop radicale. Remarquez, la Russie veut développer un produit concurrent, nationale, mais de qualité équivalente pour attirer l'attention des utilisateurs. Pourquoi pas. Il y déjà des produits comme Vkontakte ou yandex etc. Ce qui n'ôte rien à la popularité des produits internationaux ou purement américains. L'intérêt est ailleurs, sans oublier l'habitude.
La fin de l'interview donne la réponse: avec cette loi, en cas de réel danger socio-politique, il y aura la base légale pour fermer les ressources comme Facebook ou Twitter afin d'éviter des désordres sociaux majeurs. Donc, faire légalement ce que la Turquie avait fait dans l'urgence.
Le but n'est pas de surveiller les bloggers: aucuns nouveaux moyens ne seront attribués à cet effet, ni en budget, ni en personnel. Il faudra se débrouiller avec les moyens existants. Les compagnies internationales ne coopéraient que du bout des doigts avant la loi, elles continueront après: pour elles rien n'a changé. Donc la loi "blogger" n'est pas une loi de situation normale, c'est une loi de situation d'urgence, une loi d'exception pourtant adoptée dans une situation ordinaire. C'est une loi qui est adoptée dans le contexte de la peur de la propagation des révolutions.
Mais juste pour finir un petit rappel. Si les révolutions de couleurs sont arrangées de l'extérieur, elles sont également, au début, soutenu à l'intérieur par une partie significative de la population, en raison principalement des problèmes de corruption de ces régimes, corruption qui met à mal leur légitimité. Or, s'il est possible à court terme de bloquer les discussions concernant les problèmes réels dans le pays, cela ne les règle pas. Et s'ils ne sont pas réglés dans le Parlement, dans le Gouvernement, dans les tribunaux, ils finissent par l'être dans la rue. Il est alors trop tard pour bloquer internet.
La loi "Blogger" est donc une loi inutile, qui ne fait que traduire la peur des parlementaires et d'une partie de la sphère gouvernante. Il serait préférable de donner des signaux forts de la lutte contre la corruption, pas seulement en paroles mais en actes. Et la possibilité d'appliquer l'amnestie à Serdiukov est un contre signal de poids qu'aucune loi ne fera digérer.