Ce 19 avril, la Cour Internationale de Justice de La Haye vient de rendre une décision qui déboute l'Ukraine de la quasi-totalité des ses accusations contre la Russie et ne retient aucune accusation liée au terrorisme. La Communauté internationale saura-t-elle en tirer les conclusions qui s'imposent?
Début mars, l'Ukraine dépose un recours devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) accusant principalement la Russie de soutenir le terrorisme en Ukraine. Accessoirement, pour renforcer le dossier, elle l'accuse également de discrimination contre les ukrainiens et tatars vivant en Crimée. Comme l'écrit le journal Le Monde:
« La Russie met en œuvre sa politique étrangère sans égard pour la vie humaine », a dénoncé Olena Zerkal, vice-ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, selon laquelle l’intensification récente des bombardements dans l’est du pays prolonge une situation « dangereuse et imprévisible ». (...) Pour Mme Zerkal, les tactiques russes « comprennent le soutien au terrorisme et aux actes de discrimination raciale, ainsi que la propagande, la subversion, l’intimidation, la corruption politique et les cyberattaques ». Et, assure Harold Koh, l’un des avocats de Kiev, l’approvisionnement en fonds et en armes de « groupes illicites » se poursuit même durant les audiences.
Autre argument avancé par la partie ukrainienne : le drame du MH17 est bien un acte terroriste et « une attaque contre l’humanité », selon son représentant, qui prévient que des lance-missiles comme celui qui a permis d’abattre l’avion de ligne de la Malaysia Airlines en juillet 2014, au-dessus du Donbass, entraînant la mort de ses 298 passagers, pourraient de nouveau entrer en action.
Si l’Ukraine ne demande pas à la Cour de se prononcer sur sa souveraineté sur la Crimée, elle dénonce les discriminations contre les Tatars, dont certains « ont disparu, ont été enlevés », tandis que des élus « ont été exilés ».
Or, ce 19 avril, la CIJ vient de rendre une décision intermédiaire particulièrement mauvaise pour l'Ukraine, qui laisse présager de sa décision définitive défavorable. L'ensemble des accusations portées sur le fondement du soutien au terrorisme ont été écartées d'un revers de manche. Il faut dire que pêle-mêle, l'Ukraine visait même les convois humanitaires, l'aide apportée aux entreprises du Donbass suite au blocus ... La Cour a, pour sa part, déclaré:
The Court observes that the acts to which Ukraine refers have given rise to the death and injury of a large number of civilians. However, in order to determine whether the rights for which Ukraine seeks protection are at least plausible, it is necessary to ascertain whether there are sufficient reasons for considering that the elements set out in Article 2, such as intention and knowledge, as well as the element of purpose, are present. The Court is of the view that, at this stage of the proceedings, Ukraine has not put before it evidence which affords a sufficient basis to find it plausible that these elements are present. Therefore, it concludes that the conditions required for the indication of provisional measures in respect of the rights alleged by Ukraine on the basis of the ICSFT are not met.
La CIJ s'est alors rabattue sur les tatars et ukrainiens auxquels il faut permettre un enseignement dans leur langue et la possibilité d'une institution représentative. En ce qui concerne l'accès à la langue, la critique est surprenante, puisque contrairement à l'Ukraine, la Russie a immédiatement reconnu les trois langues (russe, tatare et ukrainienne) en Crimée, puisque les langues des minorités sont reconnues dans toute la Fédération de Russie. La Crimée n'est pas ici une exception. Par ailleurs, le Président russe a adopté un oukase sur la réhabilitation des tatars, ce qu'aucun président ukrainien n'a pensé ou voulu faire et ce dont les tatars de Crimée lui sont extrêmement reconnaissants. Ce qui est beaucoup plus surprenant encore est la question de la réhabilitation du Mejilis, qualifiée d'organisation terroriste par la justice russe après le blocus de Crimée et les actions violentes commises. Imaginez que l'on ait recommandé à l'époque à la France de reconnaître le FLN comme organisation de représentation des algériens en France ...
Par ailleurs, la CIJ intime aux deux parties de ne prendre aucune action qui pourrait aggraver la situation et rappelle les accords de Minsk:
"La Cour attend des parties qu'elles s'emploient à mettre pleinement en oeuvre, tant individuellement que de manière concertée, l'+ensemble de mesures (en vue de l'application des accords de Minsk)+ afin de parvenir à un règlement pacifique du conflit dont l'est de l'Ukraine est le théâtre".
C'est donc bien une défaite pour l'Ukraine. D'ailleurs les réactions dans la presse, en dehors de celles de Poroshenko qui doit garder la face, sont significatives:
“Après trois ans de conflit, les juges hésitent encore à condamner la Russie pour la mort de milliers d’innocents. Je suis stupéfaite”, s’emporte, de son côté, la journaliste Anastasia Magazova, spécialiste de la situation dans le Donbass. La partie ukrainienne demandait, entre autres, la reconnaissance de la responsabilité russe dans le crash du Boeing MH17, le 17 juillet 2014 : 298 personnes avaient péri dans l’explosion d’un missile sol-air “BUK”. De nombreuses enquêtes avaient prouvé que celui-ci avait été acheminé de la Russie quelques jours avant le drame. “Malgré cela, ils ne nous croient pas…”, se désole Anastasia Magazova.Quelques remarques en guise de conclusion.
Tout d'abord, cela montre bien que le dossier ukrainien est totalement vide. Où sont les preuves de la présence militaire russe, des actes de terrorismes commis par la Russie en Ukraine dont ne cessent de parler les politiques ukrainiens et européens? L'Ukraine n'a même pas tenté de déposer un recours sur ce fondement, mais uniquement au regard du financement et du soutien.
Même en ce qui concerne le soutien au terrorisme, le dossier ukrainien est suffisamment vide pour n'avoir obtenu aucune injonction intermédiaire à l'encontre de la Russie. A la place de cela, elle a repris en plein visage les accords de Minsk et l'obligation de ne pas aggraver la situation.
Par ailleurs, l'Ukraine n'a pas tenté de contester ce qu'elle qualifie d'annexion de la Crimée, elle n'a touché que la question des tatars qu'elle instrumentalise. Il est vrai qu'il aurait alors fallu revenir sur les circonstances du coup d'Etat du Maïdan, de la révolution ou non et donc de la continuité de l'Etat ... Ce sont des considérations qui risquent de ne pas être dans l'intérêt du Gouvernement ukrainien aujourd'hui.
Mais le jeu de l'Ukraine est ailleurs, il faut maintenir la pression et la justice internationale est idéale pour cela, car les procédures durent extrêmement longtemps. C'est sur cela que veut jouer l'Ukraine, surtout que les médias complaisants ne vont pas trop insister sur cette défaite et pourront médiatiser de manière sélective:
Un verdict positif aussi pour la journaliste Tetiana Kozak, qui anticipe “des années d’audiences à venir”
La communauté internationale pourra-t-elle tirer les conclusions de cette décision? C'est à en douter. L'hypocrisie qui dicte la politique aujourd'hui permet d'ignorer ce qui dérange, quitte à en payer le prix lourd plus tard.
Je suis entièrement d'accord avec votre conclusion. Ce qui m'accable au plus haut point, c'est cet acharnement débile des dirigeants ukrainiens vis à vis des russes, comme s'ils n'avaient rien de mieux à faire.
RépondreSupprimerPassé inaperçu en France et aux USA!
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