Le sénateur Anton Beliakov a déposé à la Douma un projet de loi provocateur pour la Russie, visant à aligner le statut juridique du mariage et du concubinage. Tout à fait dans l'air du temps, surfant sur la vague néobolchévique qui s'est emparée de l'Europe, le texte passe mal et au Conseil de la Fédération et à la Douma. Il faut dire que loin de faire penser à la Suède ou à la France, la Russie a l'expérience historique qui lui permet de se souvenir des sources premières de ce mouvement - les années 20.
Le sénateur Anton Beliakov siège au nom de la région de Vladimir à la chambre haute du Parlement russe, le Conseil de la Fédération, où il est membre du comité pour la politique économique. L'on comprend parfaitement que, de nos jours, l'économie explique "tout", qu'il s'agisse de la politique ou du social, et que tout s'explique à son tour par l'économie. C'est certainement la raison pour laquelle il propose une réforme non pas économique, mais familiale. La famille vue du point de vue "rationnel" de l'économie donne à peu près cela.
Dans sa proposition de loi, il envisage l'égalisation juridique du statut du mariage et du concubinage. En ce sens, 5 ans de vie commune entre un homme et une femme, ou deux ans si le couple a un enfant, permettraient d'entraîner toutes les conséquences juridiques du mariage. Dans sa logique, cela s'explique par deux faits. Tout d'abord, l'année 2016 a montré la chute du nombre des mariages en Russie, les jeunes Russes ne verraient plus la nécessité d'un "tampon dans le passeport", selon l'expression russe consacrée, pour que leur union de fait soit un mariage juridique. Ensuite, le sénateur s'insurge, comme en 2015 l'avocat des stars A. Dobrovinsky qui avait déjà lancé l'idée, de ce que des personnes vivant ensemble de nombreuses années sans être officiellement mariées ne puissent bénéficier des garanties reconnues par le mariage.
Le raisonnement est des plus spécieux, mais des plus amusants. Tout d'abord, l'on pourrait rappeler que le mariage est aussi un contrat juridique. Alors pourquoi s'arrêter au mariage. Mais ces avocats et politiciens ne demandent pas la fin des contrats écrits, ne demandent pas de revenir sur le formalisme juridique, car cela reviendrait à remettre en cause le droit lui-même. Or, ils en ont besoin pour leurs affaires. Non, il ne s'agit que du mariage. Et l'on voit ici poindre l'idéologie. D'autant plus lorsque l'initiateur du projet, en tout cas celui qui le porte en Russie, explique qu'il faut en finir avec cette distinction entre les "bons" citoyens qui ont un tampon dans le passeport et les "mauvais" qui n'en ont pas". Qui parle de bien et de mal? Personne à part lui.
Il ne s'agit pas de bien et de mal, mais de responsabilité. Personne n'empêche les gens vivant ensemble de se marier en mairie. Ils pourront ainsi bénéficier des avantages du mariage concernant les pensions, la répartition des biens, etc. Mais ils doivent, en contrepartie, en accepter les obligations et s'engager. En voulant égaliser le concubinage de fait sur le mariage, c'est vouloir les avantages sans avoir à s'engager. Le beurre, l'argent du beurre et la crémière en prime.
C'est tout à fait dans l'air du temps. Celui des éternels adolescents, incapables de prendre leur responsabilité, mais réclamant toujours tout comme un dû. Ils existent, donc ils ont droit. A tout. Point.
Et cette dimension idéologique se voit dans les tendances de certains partisans à déjà pousser à l'extrême. Pourquoi prévoir un délai de 5 ou 2 ans? Il s'agit de régler des questions matérielles, de répartition de biens. Il faut donc prendre en compte le moment de l'acquisition du bien. L'instant contre le temps. C'est aussi le signe de l'époque. Destructeur. Tout ce qui se construit nécessite du temps et des efforts. Ce qui est ici défendu, c'est l'absolu de l'instant. Je te vois, je te veux, j'achète, je te jette. Maintenant, protégez-moi. Aucune société ne se construit sur ce mécanisme.
Au-delà des aspects juridiques visant au délai de vie commune, aux moyens de preuves, au temps de versement des pensions, aux cas de multiples vies communes, à la gestion de l'adultère, au recoupement des familles de fait, cette tendance n'est pas propre à la Russie, loin de là, mais elle y prend une couleur particulière.
Le sénateur en question prétend que la Russie, à l'instar d'autres pays dont le caractère "tolérant" est hors de discussion, comme la Suède, la France, la Hollande, doit permettre une plus grande protection juridique ... des personnes qui refusent de grandir et de s'engager. Il faut donc inciter au développement de l'infantilisme social. Il est vrai qu'une société infantilisée est plus facilement manipulable et cet Etat, en conséquence fragilisé de l'intérieur, fait place aux ficelles extérieures.
Mais la Russie, lorsqu'on lui parle de reconnaissance du mariage de fait ne pense pas à l'Europe, elle se souvient d'une triste page de son passé, celle du bolchévisme agressif des premières heures, de ces heures où il fallait détruire l'ancienne société, faire peau neuve avant de reconstruire. Au moment de la révolution bolchévique, le mariage religieux, évidemment, a été pris pour cible, comme l'est aujourd'hui le mariage étatique. Il a alors été remplacé par le mariage civil, comme aujourd'hui on tente de le remplacer par le mariage social. Mais techniquement se posait alors un problème qui expliquait le phénomène: les archives des mariages étaient essentiellement tenues par les églises othodoxes. Comment prouver, lorsque les archives furent partiellement détruites, abîmées ou perdues que deux personnes étaient mariées depuis peut-être des années? Pendant une certaine période, jusqu'à la normalisation du fonctionnement de l'Etat, le mariage de fait a donc été reconnu. Puis remis en cause pour le mariage civil.
A cette époque le mariage de fait était une nécessité commandée par le combat contre le mariage religieux pour permettre une transition entre deux ordres idéologiques, pour limiter les conséquences juridiques de cette rupture idéologique. Quelle est la nécessité aujourd'hui de cette mesure "transitionnelle"? Lutter contre le mariage étatique, puisque le mariage civil est étatique? Donc il s'agit encore d'un des moyens de lutte contre l'Etat?
Or, si ces armes sont facilement introduites dans les pays européens néolibéraux et "tolérants" pour tout sauf pour les traditions et l'Etat, la Russie porte une société plus traditionnelle, comme le rappelle le comité de la Douma pour les questions familiales. La même position est défendue au Conseil de la Fédération. Porter atteinte à la famille, c'est porter atteinte à la stabilité de la société et du pays.
La Russie a réussi à dépasser le bolchévisme, mouvement revisité dans lequel l'Europe s'enfonce. Espérons que ce vaccin lui permettra de ne pas faire la même erreur.
L'Europe est infestée par le trotskisme, qui voudrait achever le travail interrompu en Russie et trouve toujours un traître pour essayer de pourrir la société russe encore résistante. Ils font comme chez nous, ils essaient et ils voient les réactions. Qui nous délivrera de cette peste internationale qui nous détruit tous?
RépondreSupprimerBonjour,
RépondreSupprimerJe ne parlerai pas du fond du sujet, nous risquerions d'utiliser les mêmes raisonnements pour arriver à des conclusions inverses.
Mais une chose m'intrigue fort. Vous utilisez l'expression "vague néobolchévique" pour désigner l'ambiance dans l'U€. Or ça me ferait rire aux larmes si je ne soupçonnais pas une large manipulation là dessous. Le Étasuniens, surtout la droite dure depuis les ultra-conservateurs jusqu'aux libertariens utilisent aussi ce terme de bolchevique, et parlent aussi de "marxisme culturel" pour désigner les libéraux et ultra-libéraux. Mais quel rapport entre ceux-ci et les bolcheviques ou les marxistes, pourriez-vous me clarifier ça, s'il vous plaît ? Merci d'avance.
Non2.
J'ai été très heureusement touchée par un reportage diffusé sur la chaîne suisse RTS « La double vie, petite histoire de la sexualité en URSS » par Inara Kolmane (je les survole ou les ignore généralement vu le mauvais esprit actuel). Les Allemand de l’Est comme les Russes n’ont pas un rapport avec la nudité malsain – je l’avais constaté au travers de voyages et films - contrairement aux Français ou aux Suisses romands- et ce reportage me l’a confirmé et démontré. L’égalité des sexes et la fracture du système marital… vous en avez été les précurseurs ! Révolution que nous entamons seulement aujourd’hui… en bien ou en mal… il y a des 2. Le fait est que nbre de traditionalistes français rêvent du modèle russe actuel : retour à la religion et au mariage... raté! comme leur révolution et les Suisses eux ont touj. eu une vision très paganiste à la nordique : manger bio, marche et sport dans la nature tous les dimanches! Soljenitsyne doit être heureux et nous les croyants sommes admiratifs de votre capacité à rester vous-mêmes – en plus avec ttes vos ethnies qui cohabitent aussi bien qu’en CH -, à vous construire selon votre modèle !
RépondreSupprimer"ne verraient plus la nécessité d'un "tampon dans le passeport","
RépondreSupprimerIls ont bien raison. Ce qui compte, c´est la natalité.
Les Russes ont su émerger du Bolchévisme destructeur en retournant tout naturellement à leurs fondements chrétiens, valeurs essentielles qu'ils ont su conserver dans leur coeur. A l'inverse des Européens qui sont restés des Trokystes attardés, accrochés pour leur perte, à un atlantisme destructeur de leurs propres valeurs de civilisation.
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