http://ria.ru/society/20130312/926863484.html
http://pravo.ru/review/view/83381/
L'élection, cette année, du doyen de la faculté de droit de MGU est étrangement au centre d'un combat médiatique, comme si le seul fait que des élections se passent, quel que soit l'endroit, ait la faculté de provoquer un engoûment médiatique qui sort de la normale.
La situation est pourtant simple. Le doyen sortant, Alexandre Golitchenkov, en place depuis deux mandats, se représente. Face à lui, un jeune professeur de procédure civile, Dmitry Maleshin présente sa candidature. Sur les 16 Centres de la faculté de droit, 6 soutiennent la candidature de Maleshin, une qui au départ a soutenu le doyen sortant, selon la presse aurait annoncé sa neutralité, mais l'information a été rapidenment modifiée et corrigée, les autres soutiennent Golitchenkov et personne n'a annoncé le contraire.
Jusque là rien d'extraordinaire. Une élection, deux candidats, c'est plutôt bien. Une élection dans l'une des 40 facultés d'une des Université russe - même si c'est la plus prestigieuse. Et contrairement à ce qu'affirme le journal Izvestia, ce n'est pas la première fois et le directeur du Centre de droit pénal en avait fait les frais à l'époque en perdant en 2008. On se rappellera également du combat de titans en 1998 entre Sukhanov, doyen alors en fonction, et Martchenko, ex-doyen. Donc les jeux aujourd'hui sont ouverts.
Mais pourquoi tout à coup le "parti" Maleshin lance le gant dans la presse? Alors que jusqu'à présent, une élection de doyen restait une affaire intérieure à la faculté. On ne peut pas dire que les élections de ce type fassent la une des journaux français.
Au fur et à mesure des publications, le ton et les informations changent. Tout d'abord, Maleshin a 6 Centres derrière lui, finalement il en arrive à la moitié, ce qui est faux. Le doyen est accusé de recourir à des pressions sur les directeurs des Centres, mais personne ne parle des pressions exercées par les Centres contestataires sur leurs membres lors du "vote" pour choisir le candidat à soutenir (certains n'avaient même pas dit que le doyen se représentait). Du fait que Maleshin ne soit plus vice-doyen, qu'un remplaçant soit nommé par interim, cela devient une mesure de répression presque stalinienne. Dans son interview il annonce même continuer à être professeur, comme si cela aurait été remis en cause. Bref, le discours tend à l'absurde.
Il faut également revenir sur une des personnes qui a lancé ce mouvement de contestation, le professeur Tomsinov, directeur du Centre d'histoire du droit en congé académique, très virulent dans Izvestia à l'égard du doyen actuel. Sa position est compréhensible et son combat très personnel. Depuis des années, il annonce régulièrement qu'il a les informations pour que Golitchenkov finisse en prison. Mais ne fait rien d'autre que parler. L'année dernière, après les élections, lors de son cours en histoire du droit (sur l'Angleterre) il dérape totalement et décrit les élections passées comme s'il se trouvait dans le café du coin, recourant à une vulgarité inacceptable dans les milieux académiques. Discours immédiatement mis en ligne sur Youtube. Suite à cela la presse bien pensante s'interroge: mais quand sera-t-il démis de ses fonctions? Une victime du système, un héros de la liberté à portée de main. Or rien ne va en ce sens, et ils sont très déçus que la liberté d'expression soit défendue dans le cadre universitaire. En revanche, il lui est demandé de rester dans le cadre de son cours et de s'exprimer correctement. Sa haine envers le doyen actuel est connue de tous, sa position est évidente.
Si l'on voit la réaction du directeur du Centre de droit civil, le professeur Sukhanov, alors qu'il soutient également Maleshin, sa position est plus rationnelle: il y a deux candidats, c'est normal et très bien, que le meilleur gagne.
Pourtant ... pourtant. Tout ne semble pas aussi simple. La Russie se trouve aujourd'hui dans une période non seulement de réformes intenses sur le plan juridique, mais également à un croisement où un choix idéologique de système se met en place. Où il est important de déterminer l'emplacement de ce difficile point d'équilibre entre libéralisme et conservatisme. Et la direction de la faculté de droit d'une des universités les plus importantes du pays semble devenir un enjeu de taille.
Dans ce combat, il est traditionnel d'opposer deux Ecoles de pensée. Celle, récente, de l'Ecole supérieure d'économie (tedance libérale et anglo-saxonne) et celle, historique, de MGU (tendance conservatrice et européaniste). Avec la "prise" de la banque centrale par Elvira Nabiullina, la tendance libérale anglo-saxonne se renforce et l'Ecole supérieure d'économie, dirigée par son mari, peut devenir le centre "intellectuel". (voir à ce sujet http://izvestia.ru/news/546503). Mais MGU est encore là. Et Golitchenkov, avec tous ses défauts et cette absurde faculté privée de Genève, reste dans le courant conservateur, défend la position traditionnelle de la faculté de MGU. Un Maleshin soutenu par Tomsinov irait, il en est certain, dans un tout autre sens. Est-ce là le fond de l'affaire?
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