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jeudi 16 avril 2020

Récession : Le miracle de l'économie numérique imposé sous poussée covidée n'a pas eu lieu



Cela fait des années que l'on nous explique que le monde est en train de se transformer fondamentalement sous l'effet de la dernière révolution, numérique, qui renvoie à l'âge de pierre les industries lourdes, les industries tout court. Smartphone main, dans un monde léger et propre, l'homme numérisé n'a plus besoin de rien que d'un écran. Et la nouvelle économie de ce nouveau monde est évidemment l'économie numérique. L'arrivée inespérée du coronavirus a permis de réaliser par la force ce fantasme et l'élan salvateur vers le tout-numérique était attendu. Or, les populations assignées à domicile, coincées entre une fenêtre et un écran, contre toute attente de nos élites progressistes, ont choisi ... la porte. Récession mondiale en vue, le miracle de l'économie numérique n'a pas eu lieu, ce n'est pas Facebook et les services de livraison de nourriture qui vont faire tourner le monde. Surtout que pour "livrer", il faut bien "produire". Ce que vous commandez "à distance" ne sort pas directement de votre volonté pour se matérialiser en surgissant de votre smartphone. Une contraction de l'économie mondiale de 3 points, la chute vertigineuse des déficits publics, bref la récession attendue pour 2020 à la place du miracle du nouveau monde. 


Le dogme global de miracle économique numérique

Les grands discours sur le miracle de l'économie numérique font grand bruit ces dernières années. Discours d'autant plus caricaturaux, que les économies nationales stagnent : 
"En effet, quand on regarde les statistiques économiques sur les 30 dernières années, le taux de croissance de la France n’a cessé de diminuer, passant de 3% à 0,5% (soit un peu moins désormais que le niveau auquel on se situait au XVIIe siècle). Aux Etats-Unis, la croissance est un peu plus forte de l’ordre de 1%, mais si l’on entend ce que dit Thomas Piketty dans Le capital au XXIe siècle, pour 90% de la population américaine, il n’y a eu aucune progression ces 30 dernières années. « Toute la croissance a été captée par les 10% les plus riches, et les 1% les plus riches ont capté plus de la moitié de la croissance." 
Cette fuite en avant a ses prêtres :
"Pour Kurzweil ou McAfee, les transformations majeures sont à venir. D’ici 2050 on devrait pouvoir faire tenir l’intelligence d’un cerveau humain sur une clef USB. D’ici 2070, c’est la totalité de l’intelligence humaine qui pourrait être téléchargée… " 
Pour être complet, le miracle numérique doit s'accompagner d'un miracle énergétique :
"Dans l’échange qui suit sa présentation, Andrew McAfee, tente de modérer son ode au technosolutionnisme. Mais il ne tient pas longtemps. A peine confie-t-il que la technologie ne suffira pas, qu’il évoque que le miracle énergétique qu’attend Bill Gates pourrait bien advenir. La diminution du coût du solaire permet de l’envisager à grande échelle – même si on a le droit d’être moins confiant« Nous avons besoin d’un miracle énergétique et nous en aurons un », assure McAfee. Toutes les nouvelles technologies ont toujours développé des angoisses et des inquiétudes, comme les collectionne Pessimists Archive. La télévision ne devait-elle pas détruire la civilisation ?, ironise McAfee. On y a survécu !"
Nous apprécierons le crash du prix du pétrole qui plombe également l'économie mondiale sous cet éclairage ... 

Bref, le miracle numérique pour inverser la tendance de décroissance. Et le rouleau compresseur global est en marche. L'ONU, organe incontournable du monde global, supervise cette orientation. Des conférences sont régulièrement tenues sur le sujet de l'économie numérique, présentée comme la panacée pour pallier les problèmes de développement, dès que quelques détails techniques seront résolus. Ce groupe sur l'économie numérique présente, dans son rapport 2019, un état du monde numérique intéressant, dominé par les Etats-Unis et la Chine:
"L’économie numérique n’est pas caractérisée par le traditionnel clivage Nord-Sud. Elle est invariablement dominée par un pays développé et un pays en développement : les États-Unis et la Chine. Ainsi, à l’échelle mondiale, ces deux pays cumulent 75 % des brevets relatifs à la technologie de la chaîne de blocs, 50 % des dépenses consacrées à l’Internet des objets et plus de 75 % des parts du marché des services informatiques en nuage publics. Peut-être plus frappant encore, ils représentent plus de 90 % de la capitalisation boursière des 70  premières plateformes numériques au monde. La part de l’Europe est de 4 % et la part cumulée de l’Afrique et de l’Amérique latine s’élève à seulement 1 %. Sept « superplateformes », à savoir Microsoft, puis Apple, Amazon, Google, Facebook, Tencent et Alibaba, représentent deux tiers de la valeur totale du marché. Par conséquent, le reste du monde, en particulier l’Afrique et l’Amérique latine, accuse un retard considérable sur les États-Unis et la Chine dans le développement de nombreuses technologies numériques. Certaines des tensions commerciales à l’œuvre aujourd’hui sont le reflet d’une volonté de domination mondiale du secteur des technologies de pointe."
Une sorte de fantasmagorie semble se mettre en place : le numérique est à un tel point entré dans la vie des gens ... qu'il peut la remplacer ? Car, in fine, c'est bien ce que l'on nous propose.


Puisque l'on vous dit que le processus de dématérialisation est en route. Quand les gens ne cessent d'acheter des produits de faible qualité en quantité toujours plus importante made in China. Quand il est impératif d'avoir le dernier smartphone, même si plus grand-chose ne change finalement. Quand l'on doit toujours prendre l'avion, le train ou la voiture pour se déplacer - rien "d'immatériel" n'a été inventé pour cela. En dehors du discours. Bref, pour ces fanatiques, le monde est prêt pour passer le pas, faire le grand saut. En tout cas eux le sont, il devient même urgent de le faire, la stagnation devient dangereuse.

Mais de lui-même, le monde n'est pas prêt. Il faut bien l'aider un peu. L'arrivée du coronavirus est une aubaine, sous prétexte sanitaire, il est possible de mettre tout le monde à la maison et ainsi de forcer le télétravail, les achats en lignes, l'enseignement en ligne, les restos en ligne. Bref une vie en ligne. 

Sauf que le miracle ne s'est pas produit, l'envolée de l'économie numérique libérée de la concurrence du réel nous enfonce dans une récession aussi brusque que violente, car la réalité implique des mécanismes toujours beaucoup plus complexes que n'importe quel fantasme.

Le miracle de l'économie numérique a conduit à la récession globale

Des éléments techniques numériques ont évidemment, avec le temps, été intégrés dans les mécanismes de production et de consommation, mais cela ne signifie pas qu'ils puissent en monopoliser le champ. Là est la frontière entre le rationnel et le fanatisme.

Et ici, l'on retrouve encore le message, plus vraiment subliminale, de l'ONU :
"Selon l'analyse, la crise du coronavirus a accéléré l'adoption de solutions, d'outils et de services numériques, accélérant ainsi la transition mondiale vers une économie numérique."
Et l'ONU de déplorer que tous les Etats ne soient pas aussi prêts ... Cela ressemble à un appel à une fuite en avant. Le résultat est sans appel, selon les dernières déclarations du FMI, le monde attend la plus grande crise depuis 1929, qu'il s'agisse d'une contraction de l'économique globale estimée à 3%, de l'explosion de la dette mondiale passant à 96,7%, dans la zone euro la dette devrait passer à 97% PIB  (France - 115%, Italie - 155%, Allemagne - 68%) et à 131% du PIB pour les Etats-Unis. La chance de la Russie est d'avoir un endettement très faible, environ 15% du PIB, elle a plus de marge de manoeuvre.

Parallèlement, le monde réel se rappelle à nous avec un risque de famine artificiellement créé, puisque les denrées existent, mais l'acheminement est mis en péril en raison du confinement. En effet, il faut des hommes, circulant dans le monde réel, pour que ce monde puisse fonctionner.

La réaction de l'UE est assez symptomatique du décalage existant entre ces fonctionnaires progressistes et les attentes très concrètes des populations - qui aimeraient voir un peu mieux leurs gouvernants gouverner. Une levée de fonds est organisée pour que l'UE puisse en fait retourner une partie des fonds aux Etats, sous forme d'aide ou de prêts. Logique ... Le problème de l'UE est qu'elle a absolument besoin de montrer qu'elle existe, sinon le Roi pourrait apparaître dans toute sa nudité (et son inutilité), ce qui signerait la fin de ce triste spectacle. Une citation de Charles Michel, président du Conseil européen (organe réunissant les chefs d'Etat et de gouvernement des pays de l'UE) :
Le fait que la crise coïncide avec la fin d’un cycle budgétaire européen est en outre selon lui une occasion à saisir pour "transcrire dans ce calendrier la transformation digitale, le pacte vert", les deux priorités stratégiques adoptées par la nouvelle équipe dirigeante de l’Union
C'est effectivement avec cela que l'on va relancer l'économie dans les pays européens ... Le numérique et l'écologie. La part d'idéologie dans ces milieux a dépassé depuis longtemps les limites du rationnel.

En Russie, en revanche, une certaine prise de conscience de la catastrophe économique, et donc sociale, qui se profile dans le sillon de l'envolée politique globaliste autour du coronavirus, commence à faire jour. Il faut dire que dès le début de cette crise politico-sanitaire, de nombreuses voix s'élevaient dans tous les médias russes, comme une incantation lancée au dieu de la post-modernité, célébrant les bienfaits de cette chance pour la Russie, cette chance d'enfin passer en un saut dans le monde du futur. Les héros du tout-numérique sont très nombreux dans les organes de pouvoir et leur entourage proche, l'emballement fut de règle. Aujourd'hui encore, le fantasme de la voiture sans pilote (techniquement le pilote automatique existe déjà, mais passons) refait jour et des financements publics sont lancés. Les rues sont désertes, autant en profiter ... A chacun ses priorités : le monde de demain ou le peuple d'aujourd'hui.

Le Président Poutine, lors de sa réunion sur les questions économiques du 14 avril, a acté l'échec du miracle de l'économie tout-numérique. D'aucuns attendaient que, finalement, les gens étant coincés chez eux, changeraient leurs habitudes de consommation, qu'ils seraient par la force des choses contraints à entrer de plain-pied dans le monde merveilleux de la technologie. Le résultat est sans appel, rien que pour ce début d'avril, la consommation courante a plongé de 35%. Ce qu'annonce le Président, avec injonction de réfléchir à la chose et de soutenir l'économie. Pour éviter une propagation. Je cite :
"Cela (les 35%) montre à quel point instantanément le marché s'est contracté"
Ce qui devient un problème pour les entreprises. Problème confirmé, de son côté, par l'ancien Premier ministre Medvedev, à la tête du parti majoritaire Russie Unie, qui lors d'une réunion avec le business déclare :
"Dans de nombreux domaines de l'économie, la situation devient critique. "La situation en fin de compte rappelle crash, il n'y a simplement plus rien.". (...) Beaucoup d'entreprises, pour faire face à cela, sont obligées de réduire leur personnel et "l'on peut douter que la situation s'arrange dans un avenir proche"."
En réaction à cette chute aussi rapide qu'inattendue, Poutine a organisé une réunion de travail hier avec le Gouvernement, enjoignant à renforcer le soutien de l'Etat. Pour cela, les domaines d'activité qui peuvent obtenir une aide publique ont été augmenté des PME ne produisant pas de l'alimentaire, le secteur de l'aviation a obtenu une subvention, les régions aussi.  Les salaires doivent être payés.

L'on retiendra en particulier une mesure présidentielle : pour les entreprises appartenant aux secteurs protégés, si elles conservent leurs effectifs au moins à hauteur de 90% de l'effectif au 1er avril, elles obtiendront une aide pour le paiement des salaires des salariés à hauteur du salaire minimal (qui est au minimum vital, soit 12 130 roubles / mois - 151 euros environ). Le problème est que cette aide peut être lue différemment, et les juristes d'entreprise n'y manqueront pas. Alors que précédemment, le Président incitait à ne pas mettre des gens au chômage, maintenant les entreprises peuvent réduire leur staff de 10%. Par ailleurs, elles peuvent également remplacer, en cette période de crise, le salaire qu'elles versaient à leur personnel, par ces 12 130 roubles - ce qui entraînera une baisse significative des revenus. Donc ne permettra pas de relancer la consommation, comme attendu. 

Finalement, le seul moyen de relancer la consommation, de relancer la production, de sauver l'économie est de mettre fin à toutes ces mesures privatives de liberté, dont la nécessité est plus que contestable. Sur le plan sanitaire, nous l'avons déjà souvent montré. Mais également sur le plan idéologique - la bataille est perdue. Le fantasme de l'économie numérique, pour un monde progressiste, vient de se briser contre la réalité. Maintenant, le véritable risque, est celui de la récession. Et ce ne sont pas les voitures sans pilotes, ni la livraison généralisée des hamburgers à domicile qui nous sauveront d'un péril bien plus réel et bien plus grave que cet énième virus.
 

1 commentaire:

  1. Le numérique permets une production optimisée (allant jusqu'à la robotique), la gestion des stocks, la publicité et les paiements. Ce qu'elle permets aussi et surtout c'est la destruction des circuits commerciaux ancien pour les concentrer dans les mains de quelqu'uns (Amazon et Alibaba). C'est pas mon I-Phone qui produit mes carottes et qui les bouffes. Le tout numérique par sa complexité et les investissements gigantesques est simplement un instrument totalitaire au services des maîtres de la création monétaire.

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